«Les journalistes, tous des vendus! Tous des ignares!»
J’ai dû entendre cela cent fois, et pas seulement sur CUK.
A cette affirmation, on peut opposer quelques faits qui ont leur importance.
Depuis 2003, on compte 882 journalistes tués au travail; depuis 2010 (il n’y a pas de statistiques avant), 117 net-journalistes sont morts à cause de leurs activités journalistiques; il y a 187 journalistes et fixeurs en prisons à l’heure où je vous écris, ainsi que 166 net-journalistes.
On ne parle ici que de journalistes enregistrés comme tels dont la mort ou l’emprisonnement ont été signalés.
A ceux-là, viennent s’ajouter des journalistes qui ont échappé à la mort, parfois seulement parce qu’ils étaient suffisamment connus. Un des derniers exemples pourrait être Simon Ostrovski, qui travaille pour la BBC et pour MSNBC et qui couvre l’Ukraine depuis des mois, particulièrement bien parce qu’il parle couramment le russe. Il a été emprisonné, menacé de mort et seule une campagne de deux des plus populaires chaines TV du monde, flanquées de journaux prestigieux tels The Guardian, a permis de le libérer. Il raconte son aventure ici – et vous remarquerez qu’il dit vouloir retourner en Ukraine en dépit des risques.
Simon Ostrovsky en pleine action en Crimée (image YouTube)
On pourrait aussi parler de Richard Engel, kidnappé et emprisonné en Syrie, soumis à un simulacre d’exécution; il avait informé le monde entier sur des sujets que lui seul avait recherchés et vus, pour lesquels il s’était exposé et avait maintes fois risqué sa vie. Il est encore vivant, car, pendant qu’il était transféré d’un point à un autre, et après avoir entendu (il parle arabe) qu’il allait être tué pour de bon, il a réussi à profiter d’un moment de confusion pour s’évader, et a réussi à passer en Turquie. Quelques mois plus tard, où croyez-vous qu’il soit? En Ukraine, où vous pouvez le voir tous les soirs, il était en Afghanistan il y a quelques semaines. Il a raconté l’histoire cauchemardesque de son enlèvement ici.
Richard Engel et son collègue turc Aziz Akyavas viennent d'arriver en Turquie après avoir échappé à leurs ravisseurs (photo Jonas Fredwall Karlsson)
Vraiment vendus, Ostrovski, Engel (les deux exemples que je donne parce que je les ai suivis) et tous ceux qui font comme eux? Vraiment ignares, les plus de mille reporters morts, qui exerçaient une des professions les plus dangereuses du monde? Et qu'est-ce que c'est que ce métier qui excite tant d'enthousiasme et tant d'injures?
En fait, il y a face au journalisme une ambiguïté qui fait qu’on tend à viser le messager sans voir la réalité qui se cache derrière lui (ou elle).
Dessin de l'Ecole de Journalisme de Marseille
La presse «libre»
Dans une démocratie, la presse n’est pas, en principe, contrôlée par l’Etat. Idéalement, elle devrait être constituée, par exemple, en coopératives, en associations. Et être contrôlée par ceux qui la font. Son but devrait être l’information, l’éducation même, et non le profit. Cela n’exclut pas la presse d’opinion, bien entendu, dans la mesure où les opinions sont clairement exprimées. Mais même les journaux d’opinion devraient rester soumis à la déontologie de la branche.
Dans le passé, cela a amené à l’existence, à côté de grands journaux d’information, de journaux d’opinion qui n’en manifestaient pas moins une grande marge d’indépendance et qui ne reculaient pas devant la publication d’idées contraires à celles du parti ou organisation qui finançait le journal.
Pour ne prendre qu’un exemple suisse, je citerai la défunte Gazette de Lausanne, quotidien libéral pour lequel je n’ai, sur le plan politique, jamais eu la moindre sympathie. Elle était flanquée d’un supplément, La Gazette Littéraire, une véritable référence culturelle pour tout le monde francophone; elle était dirigée par Franck Jotterand, un homme de droite, mais qui n’a jamais hésité à laisser s’exprimer toutes les opinions. «Je ne juge que la qualité des œuvres ou des articles que je reçois, pas leur contenu politique», avait-il l’habitude de dire.
Mais cela, c’est le passé.
Aujourd’hui, les choses ont changé.
Dans une lettre écrite en 2009, Gilles Pouzin, secrétaire général du Syndicat des journalistes français, résume la situation ainsi:
«De tout temps, des gens ont voulu influencer l'opinion publique, et influencer l'opinion par l'intermédiaire de la presse quand celle-ci existait. Influencer l'opinion par l'intermédiaire de la presse a d'autant plus de valeur pour ceux qui la manipulent que cette dernière est libre, car son message est alors crédible. C'est là que se situe l'enjeu déontologique de la presse qui doit veiller à ce que la crédibilité que lui accorde l'opinion publique ne soit pas trahie ou manipulée par des intérêts particuliers. Cet enjeu a pris une nouvelle dimension avec l'industrialisation des relations publiques par opposition à l'artisanat des entremetteurs talentueux d'antan. Aujourd'hui, la manipulation de la presse est l'objet d'un commerce florissant en France et partout dans le monde. Aidés par le développement des relations publiques, les gens qui veulent influencer l'opinion publique sont devenus convaincus, probablement à juste titre, qu'il est dans bien des cas plus facile, plus efficace et moins coûteux de déployer leurs efforts pour agir directement sur le contenu éditorial plutôt que par d'autres moyens comme la publicité.»
On peut lire la suite de son plaidoyer ici. Mais la clé du problème me paraît être dans la phrase: Aujourd'hui, la manipulation de la presse est l'objet d'un commerce florissant en France et partout dans le monde.
Je prétends que si l’on veut faire «un commerce florissant» de la presse, cela tue la presse.
(Dessin Oldiblog)
On me dira: oui, mais c’est normal que ça rapporte. Sans doute, c’est normal que cela rapporte un peu. Mais il en va de la culture (et j’associe le journalisme à la culture) comme de l’agriculture: si vous voulez leur faire rapporter plus qu’elles ne peuvent produire, vous les tuez – à petit feu peut-être, mais sûrement.
Vouloir qu’un journal ou un groupe de journaux rapportent autant qu’une quelconque spéculation boursière, cela signifie qu’on va prendre un certain nombre de mesures. On va les rendre attractifs à la publicité, et cela passera avant la prise en compte du lecteur, dont on va occuper les neurones pour qu’il consomme, comme disait M. Bouygues à propos de la pub sur TF1, avant de se préoccuper de son information. Ainsi, peu à peu, on glisse dans l’information-spectacle pour un public dont on méprise l’intelligence. L’information n’est ainsi plus l’essentiel de la presse, elle est le prétexte à la publicité. Les exceptions sont honorables, magnifiques, mais minoritaires. En France, ce seront Le Canard Enchaîné ou Le Monde diplomatique, par exemple. En Suisse romande ce sera par exemple Le Courrier, en Suisse alémanique Die Wochenzeitung. Quant à nos chaînes TV de service public, elles ont abdiqué une totale indépendance le jour où elles ont ouvert la porte toute grande à la publicité. Il n’y a même plus besoin que les grands annonceurs censurent, ou demandent des changements de programme. Il a suffi d’instaurer l’audimat pour cela. On mesure combien de personnes regardent telle ou telle émission, si elle n’atteint pas le but fixé (par qui? comment? selon quels critères? – pas clair, c’est le moins qu’on puisse dire), elle est supprimée.
Le paradoxe
Je voudrais ici éclairer le paradoxe.
Les véhicules de l’information sont des entreprises qui doivent rapporter du profit. Mais les personnes qui produisent cette information, les journalistes, sont le plus souvent des gens qui font cela par vocation.
Certes, il y a de bons et de mauvais journalistes, des journalistes honnêtes et des journalistes vendus, tout comme il y a de bons et de mauvais médecins, autre métier où une vocation joue souvent un rôle. Mais le fait que tant de jeunes rêvent d’être le nouveau Jack London ou le nouvel Albert Londres n’en demeure pas moins bien réel.
J'ai un budget minuscule, un équipement emprunté, quelques contacts dans les milieux miniers, je baragouine l'espagnol... Je suis fin prête (image maxime centerblog)
La charte du journaliste, que l’on trouve ici, implique que le journaliste fera tout (y compris risquer sa vie) au service de la vérité. Les trois premiers articles de la charte ne lui laissent pas le choix:
1)Respecter la vérité, quelles qu’en puissent être les conséquences pour lui-même, et ce, en raison du droit que le public a de connaître la vérité. 2)Défendre la liberté de l’information, du commentaire et de la critique. 3)Publier seulement les informations dont l’origine est connue ou les accompagner, si c’est nécessaire, des réserves qui s’imposent ; ne pas supprimer les informations essentielles et ne pas altérer les textes et les documents.
Cependant, à mon avis, la charte comporte un talon d’Achille, l’article 10 : Refuser toute pression et n’accepter de directives rédactionnelles que des responsables de la rédaction.
Refuser toute pression, OK, mais les directives rédactionnelles des responsables de la rédaction? Dans l’état où est la presse, écrite ou télévisée qu’elle soit, les responsables de la rédaction sont-ils au-dessus de tout soupçon? Eux qui choisissent les sujets traités, l’espace qu’ils donneront à chaque nouvelle, eux qui sont responsables face à des actionnaires ou parfois des financiers qui ne comprennent rien au journalisme et ne voient que les cordons de la bourse? Eux qui sont plus proches des politiques qu’on ne le souhaiterait? Sont-ils, eux, immuns aux pressions?
La réponse est clairement NON.
Car, plus souvent qu’à leur tour, ce sont des administrateurs, qui ne sont pas (ou plus) liés à la charte des journalistes et à leur code d’honneur.
En fait, je le sais d’expérience, le journaliste est souvent bien seul face aux choix qu’il est forcé de subir. Et lorsqu’on l’a obligé à traiter un sujet très sérieux en dix lignes, ou en 40 secondes, il doit se battre à la fois avec ses contraintes, avec sa conscience qui lui impose d’informer, et avec une frustration d’autant plus grande qu’il sait: c’est de lui qu’on dira ensuite qu’il était trop superficiel, alors qu’il est souvent très bien informé et ne demanderait qu’à approfondir et à communiquer.
Dessin Nadja El Awadi
Laissez la bride sur le cou à cette petite armée de journalistes désillusionnés, et vous serez étonné. Je me souviens de l’information continue offerte par la TV d’Etat italienne lors d’un tremblement de terre, il y a quelques années. Ces journalistes et ces cameramen mornes, assommés par les directives berlusconiennes, qui avaient fini par ressembler à des singes savants ânonnant la dictée, sont soudain redevenus, dans l’urgence, parce qu’ils étaient sortis sans directives et ne s’étaient pas préoccupés d’ordres, des journalistes magnifiques. On mesurait alors ce que peut la chape de plomb de la frivolité qu’on impose de plus en plus souvent à l’information.
Dans ce contexte, le seul choix du journaliste est de se taire ou de râler et s’en aller. Mais le marché est très étroit, dans un monde où les journaux disparaissent un à un, dans des pays (France ou Suisse) où X journaux ou chaînes TV font partie d’une même entreprise.
Journalistes, tous vendus? Non. Il ne faut pas confondre. Il y a des vendus parmi les journalistes comme il y en a dans toutes les professions. Mais dans l’ensemble, ce ne sont pas les journalistes qui sont vendus ou/et ignares. Ce sont les supports censés porter l’information qu’ils recueillent, souvent au prix de leur confort, et parfois au prix de leur vie (on trouvera de nombreux exemples dans Reporters sans frontières).
PS. Dans ce contexte, on pourrait aussi parler des Ecoles de journalisme. Je m'abstiens pour ne pas faire trop long, mais je vous renvoie à un article excellent, ici
, le 13.05.2014 à 00:19
Merci,Anne pour cet utile rappel des réalités toutes crues de la presse actuelle.
Le fameux »temps de cerveau disponible » est bien issu du groupe Bouygues, mais fut prononcé par le PDG de TF1 il y a maintenant dix ans.
, le 13.05.2014 à 01:23
Supprimer le conditionnel du langage journalistique devrait vider les contenus des chaines infos et éviter ces débats type café du commerce avec ces commentateurs, et non plus journalistes, de l’actualité réelle ou fabriquée.
, le 13.05.2014 à 03:03
Et bien, le soir où j’avais un programme assez chargé, me voilà passablement distrait par Cuk.
Bien souvent, quand un journaliste parle de ce métier, il fait référence aux morts de la profession pour dire à quel point le métier est noble et que cette corporation paye un lourd tribu à l’humanité en se sacrifiant pour nous apporter l’information tant attendue à 20h00. D’ailleurs, pour la Syrie ou même l’Ukraine, on se rend bien compte comme c’est utile et que ça change tout d’être bien informé ou pas.
Pour 883 journalistes morts depuis 2003, je pourrais opposer les 1’043 mineurs qui sont morts dans les seules mines chinoises pour l’année 2012 uniquement.
Mais à mon avis cette comparaison macabre n’a pas de sens même s’il est important de garder les choses en perspective. D’ailleurs le Committee to Protect Journalists parle d’environ 70 journalistes tués par année dans le monde alors que la profession compte environ 2 millions de journalistes à travers la planète. Alors sans rentrer dans des détails et statistiques lugubres, il est tout de même important de noter que journaliste ne sort même pas dans top 50 des métiers les plus dangereux au monde… et je parle bien de métiers et non de loisir ou autre sport extrême.
Une fois qu’on a passé cette introduction purement émotionnelle, on peut se pencher sur l’affirmation du jour: « Les journalistes, tous des vendus! Tous des ignares! » et le plaidoyer d’Anne pour dire que ce n’est pas vrai.
Au-delà d’une phrase généraliste et de tout ce qu’elle peut comporter d’inexacte ou réductrice, personnellement je la trouve tout de même assez juste. Ce n’est pas parce qu’on parle des 70 personnes tuées par année que ça dédouane le boulot dégueulasse que 2 millions d’autres font.
Bien sûr, il reste le journalisme d’investigation âprement défendu et même revendiqué par les « vrais » journalistes comme Hervé Plenel. Ce dernier avec Mediapart se veut le renouveau de cette presse mourante au travers d’Internet et clame haut et fort que grâce à ses enquêtes le monde est mieux informé. Problème anecdotique, l’enquête de haut vol réalisée par Fabrice Arfi sur l’affaire Cahuzac par exemple à comme base une délation d’un ennemi politique qui s’est retrouvé par hasard avec un message compromettant sur son répondeur et l’a gentiment remis à ce journaliste qui a bien sûr enquêté après, facile. Moi aussi je pourrais gagner au loto si on m’annonçait les numéros à l’avance… mais je n’appellerais pas ça une enquête.
Ce simple exemple mais parfaitement en exergue un problème qui est ancien: la confusion des genres entre les médias et les politiques. Tantôt, selon le besoin, le politique appelle son pote journaliste pour lui donner des tuyaux sur ses ennemis ou amis et ainsi oriente totalement l’information qui est donnée au public. Pareil pour le secteur privé qui d’ailleurs est souvent la planche de salut pour d’anciens journalistes à un poste de communication… et je ne parle même pas du scandale quand privé et politique se côtoient sur un yacht ou dans un restaurant alors que c’est tout simplement honteux de penser une seule seconde remettre en question la déontologie et le professionnalisme d’un(e) journaliste qui partage sa vie privée avec un politique.
Et puis toutes ces informations judiciaires qui sont sous le sceau du secret de l’instruction mais qui finissent tout de même dans les médias sous le titre aguicheur de « nous nous sommes procurés la déposition » ou autres documents confidentiels qui n’ont rien à voir avec la politique. Comment est-ce que la confidentialité d’une procédure judiciaire peut finir aussi souvent dans les médias? Quel intérêt d’information y a-t-il à violer régulièrement la justice sous prétexte d’informer alors qu’il y aura un procès et que les audiences seront publiques ?
Pour bien comprendre de quoi je parle et bien mieux que je ne pourrai jamais le faire, je recommande ardemment un magazine en deux parties et qui est passé pas plus tard que la semaine dernière sur France 5 : Jeux d’influences, la série documentaire.
Tout y est dit et on y voit à la perfection comment les communicants prennent le pouvoir sur ces pantins de journalistes et leurs font dire ce qu’ils veulent. Tout y passe, de la boîte privée aux politique et même le sport. Ce qui est remarquable, c’est que ce n’est pas une contre-enquête mais réellement les acteurs de ce show parfaitement programmé à l’avance qui s’expriment et expliquent, sourire en coin, comment ils arrivent à faire débiter des conneries grosses comme un continent aux journalistes du 20h00 (et les autres hein).
Je passe outre les inexactitudes et erreurs qui sont de plus en plus communes et qui passent comme une lettre à la poste… pas le temps de revenir dessus de toute façon. J’oublie aussi de parler du manque d’enquête dans le propre milieu journalistique. Visiblement, dans ce milieu, aucun détournement de fonds, jamais d’abus sexuels (alors que le patron d’une radio connue a été condamné), etc. Les médias c’est plus propre que la lessive OMO avec de la javelle.
Bien sûr, je ne peux pas terminer ce laïus sans parler d’une petite expérience personnelle anecdotique mais qui reflète tellement bien ce milieu. C’était il y a 2 ou 3 ans et j’étais convié avec une centaine de journalistes européens dans une grande ville industrielle pour la présentation d’un nouveau produit. Bien entendu, avion, bus privé, hôtel 5 étoiles et superbe apéro offert juste après la présentation. Arrive le moment de se mettre à table avec un formidable menu préparer par un excellent chef et sa brigade. Au moment de m’asseoir, je réalise que j’ai plein de journalistes autour de moi que je n’en connais pas et ni une ni deux, je décide de faire connaissance. A mon voisin de droite, je lui demande tout simplement ce qu’il a pensé de l’excellente présentation à laquelle nous venions d’assister. Totalement blasé, le type me répond le plus sérieusement du monde : « Je ne sais pas, on n’a pas encore mangé. »
Bref, on me demande souvent pourquoi je suis toujours aussi remonté contre les journalistes et je suis surpris par cette question car quand je lis cette étude, je fais partie d’une majorité de personnes qui ont un problème profond avec la manière dont les médias véhiculent l’information. Et ce n’est pas une lubie ou une impression car en tant que consommateur, j’ai l’impression d’être dans un McDonald ou Quick et le type qui me sert sa camelote me dit, affirme et répète qu’il fait de la gastronomie.
T
, le 13.05.2014 à 07:56
Le pointeur de « Jeux d’influences, la série documentaire. » est incorrect « page introuvable ». Merci de corriger.
, le 13.05.2014 à 09:30
Je lisais hier sur « Mediapart » que l’investisseur caché dans le journal « Libération » était désormais connu et qu’il s’agissait de M. Patrick Drahi qui, outre le fait qu’il est le boss de Numéricable (et bientôt propriétaire de SFR), est aussi un exilé fiscal notable. Pour moi cela pose une vraie question éthique.
L’argent n’a pas d’odeur semble-t-il : y a-t-il eu une réaction des journalistes de « Libé »?
, le 13.05.2014 à 10:10
@totheend
un peu violente ta réponse ? Il y a sûrement un juste milieu entre Anne et toi.
Pour ma part, après CUK, le matin, je vais du côté d’Acrimed.
Plus que le travail des journalistes, je pense que les responsables de la hiérarchie des journaux sont à pointer du doigt.
La semaine dernière, par exemple, un journal de FranceInter à débuté par :
1) une femme entraineur d’une équipe de foot (2 ou 3 minutes)
2) Elections Européennes (1 mn)
3) Enlévement de jeunes filles au Nigéria (1 mn)
Et qui s’occupe de la titraille dans les journaux ? rarement le journaliste… d’ou cette même semaine, au sujet du Nigéria dans Le Monde, version numérique :
Titre « Plusieurs dizaines de jeunes filles enlevées au Nigéria »
Dans le corps de l’article : » De 180 à 200 jeunes filles… »
On dira que 200 c’est bien plusieurs dizaines, mais tellement moins important.
, le 13.05.2014 à 10:12
Oups, c’est corrigé.
T
, le 13.05.2014 à 11:08
J’essayais d’apporter des nuances à une affirmation simpliste: «les journalistes», mais avec TTE c’est peine perdue. Je n’argumenterai pas, c’est inutile.
La seule chose que j’aimerais commenter, c’est le rappel «émotionnel» des morts. On peut qualifier d’émotionnel le rappel d’une réalité généralement presque oubliée, si on veut. J’appelle cela rappeler des FAITS. Par respect pour ces morts. Je vous prie d’aller jeter un coup d’oeil au site de Reporters sans frontières. Vous y découvrirez un monde différent: celui de gens qui sont prêts à toutes sortes de sacrifices (y compris la vie) pour mettre à jour des réalités dans un monde où la presse est généralement entre des mains privées qui n’ont à coeur que de défendre ses intérêts, politiques et économiques. C’est à ces courageux journalistes-là que je rends hommage, et je ne les amalgame pas à la presse en mains privées et ses laquais – bien que souvent ce ne soit que dans ce contexte-là qu’ils trouvent du travail.
, le 13.05.2014 à 11:33
C’est quelque chose qui m’a toujours rendue dingue dans les rédactions où j’ai travaillé. Celle qui m’est restée particulièrement en travers de la gorge, c’est le soir où au Journal télévisé on a consacré entre 2 et 3 minutes au grave problème du prix de la place pour les bateaux dans le lac de Neuchâtel, puis 30 secondes au résultat d’une enquête d’un collègue sur la pédophilie en Suisse.
Une autre des choses qui m’ont toujours rendue dingue, c’est la question: accident? tremblement de terre? combien de morts? trente? sujet. Trois, pas la peine, on n’en parle pas.
Ce sont des décisions qui échappent totalement au journaliste, elles sont prises par des responsables ad hoc. Souvent, ils ont été journalistes: ce qui m’a toujours impressionnée (et fait refuser le job lorsqu’on me l’a offert), c’est qu’on a l’impression que ces gens ont complètement oublié qu’ils ont été journalistes un jour.
, le 13.05.2014 à 12:04
Anne Cuneo dénonce les pressions économiques dont s’accommodent les dirigeants de rédactions. ToTheEnd déplore le manque de courage des journalistes pour renverser cette situation. Au final, les deux avis se rejoignent : la presse est en proie à un contrôle idéologique et financier dont elle ne peut que difficilement se défaire. Le pire est que ces contraintes empêchent souvent les journalistes de faire des articles de fond pour décrire et exposer les actions des pouvoirs en place.
À ce sujet, je vous encourage à voir les reportages co-réalisés par Pierre Carles :
– Fin de concession (2010)
– DSK, Hollande, etc. (2012)
, le 13.05.2014 à 12:13
Et un peu plus polémique : Les nouveaux chiens de garde
, le 13.05.2014 à 12:44
Ca m’ennuie un peu de le dire, mais à part quelques exceptions (je pense par exemple à Eric Zemmour), les journalistes ne sont que de simples fonctionnaires inféodés au pouvoir politique en place. Sincèrement, ça me dérangerait un peu moins
1) S’ils le disaient avec davantage de transparence
2) S’il n’essayaient pas de jouer aux « révolutionnaires téméraires » qu’ils n’ont pour la plupart jamais été!
Ceux qui me lisent ont bien sûr le droit de réagir à mes propos, je leur demande simplement, avant de le faire, de jeter un coup d’oeil ici. Après, on peut toujours en discuter…
, le 13.05.2014 à 12:58
Anne, 1/3 de la note du jour parle des morts et 2/3 parle du journalisme au sens large ou quelque chose m’échappe?
Je ne te reproche pas personnellement d’appartenir à cette catégorie professionnelle d’autant que je trouve plaisant de lire tes articles. Par contre, je cache mal mon agacement quand tu défends une profession au travers des actes de 1% d’entre-eux.
J’ai un certain respect pour ceux qui risquent leur vie pour de l’info même si je ne perçois pas très bien à quoi ça sert mais tu ne peux pas continuer de parler d’une profession comme si de rien était alors que très clairement, les médias sont en train d’abrutir les masses à coups de bulldozer et dynamite.
Pour le bien de tous, il faudrait que le métier de journaliste au sens large soit largement revu et que les médias subissent une profonde restructuration pour ne pas dire assainissement.
Ne pas reconnaitre ce point et continuer de parler du 1% des héros de la profession est, à mon humble avis, une erreur et me fait penser que la solution ne viendra donc pas de « vous » (au sens large donc).
Pire, le politique et le journalisme sont tellement imbriqués et se mélangent tellement les pinceaux qu’on ne peut que rire jaune en lisant le compte rendu du pot de départ de Sylvie Maligorne après 5 années passées à la tête du service politique de l’AFP.
T
, le 13.05.2014 à 13:48
C’est assez bien résumé.
Le hic est le suivant: lorsque l’on regarde la profession du dehors, lorsqu’on lit la charte déontologique, lorsqu’on voit les sacrifices consentis par une minorité, on a l’illusion que l’on va exercer un apostolat. Une fois qu’on est dans la plupart des rédactions, un piège se referme sur la plupart d’entre eux. Ils ne savent pas faire d’autre métier, maintenant ils ont une famille, ils sont coincés. Et les dérives commencent. Bientôt, l’idéal est perdu, le cynisme se pointe, et les compromissions peuvent commencer.
Le quotient de frustration dans les rédactions est énorme. Car avant de dériver, beaucoup de journalistes résistent. Pas assez longtemps, cela va de soi. Et – cela passe sous silence, mas n’en est pas moins réel – le pourcentage de pertes (journalistes, souvent brillants, qui s’en vont parce qu’ils ont la possibilité de faire autre chose) est assez haut.
J’ai eu personnellement beaucoup de chance: j’ai toujours travaillé à mi-temps, et je ne me suis jamais fait l’illusion de l’apostolat, comme d’autres.
Parfaitement d’accord, à ce détail près que je suis arrivée à la conclusion que seule une société différente peut assainir sa presse au point qu’elle devienne différente. Et les victimes, si on compte les persécutés, les emprisonnés, les bannis, en plus des morts, sont, dans le métier, plus de 1%.
, le 13.05.2014 à 18:24
Heuuuuu!
Vu que les gens suivent les médias de manière frénétique et qui aura bientôt 50 chaînes d’info avec un script d’horloge parlante (en boucle quoi), je vois mal la société changer et donc par extension les médias. Le vrai tour de force, ça serait de changer à contre-courant mais bon, ça n’en prend pas le chemin.
Entre temps, certains ferment, les rédactions se vident, les contrats sont toujours plus précaires et la polarisation s’accentue pour offrir des contenus toujours plus formaté et s’adressant à l’émotionnel en lieu et place de la raison. Débats absurdes, analyses lapidaires, points de vue extrême, etc. et il ne faudra pas s’étonner de voir le public choisir des positions toujours plus extrêmes, y compris dans les urnes.
T
PS: si dans les victimes ont compte le public, c’est sûr… par contre, si c’est juste pour le métier, au niveau OCDE, je veux bien monter à 2%.
, le 13.05.2014 à 20:12
Tu es un peu contradictoire TTE: lorsque tu veux montrer et prouver que les journalistes font un mauvais travail en général, tu prends des enquêtes de journalistes.
Au pire, tu ne devrais pas y porter attention, puisqu’ils sont tous pourris selon toi.
, le 13.05.2014 à 21:53
Je viens lire la chronique d’Anne ce soir, auparavant je prenais connaissance de cette nouvelle.
Le nombre de journalistes tués mentionné par Anne peut déjà être corrigé …
, le 13.05.2014 à 23:24
Je n’ai pas bien compris ta remarque car à l’exception du lien sur le documentaire qui met en exergue journalistes=pantins, tout le reste, c’est des statistiques ou des articles qui démontrent tout le problème que je décris. Je ne pointe pas ces articles pour dire qu’ils sont bons vis à vis de ce que le narrateur nous apprend. Ces articles sont bons pour voir la cohésion totalement malsaine du système politique/médias et de tous les effets pervers inhérents à ces genre de concubinage.
Je suis partisan d’un service professionnel pour diffuser l’information et qui, idéalement, soit spécialisé dans des secteurs spécifiques. Autrement dit, les journalistes ont parfaitement un rôle à jouer dans notre univers connecté et ultra-connecté de demain. Mais pas sous cette forme, pas avec des mots comme: « une source », « il se murmure » ou encore « on a été informé ». Derrière chacun de ces mots, il y a une manipulation ou une instrumentalisation dont le lecteur n’a aucune idée car il boit les paroles du journaliste comme si c’était un évangile pour un croyant.
Ceci dit, la communication ou les éléments liés aux médias, c’est des sujets qui devraient être abordés à l’école. J’ai vu il y a quelques mois un prof extraordinaire dans le Jura qui a monté un exercice avec ses élèves sur les votations fédérales. Groupe de pression, communication, décryptage, arguments, tout a été passé en revue et c’était bien parce que non seulement il a collé ça sur des heures « spéciales » mais en plus, tous les élèves ou presque ont participé. Impressionnant.
Il y a donc de l’espoir mais pas sous cette forme.
T
, le 14.05.2014 à 00:30
Je ne vois guère de contradiction entre les propos d’Anne et ceux de TTE. Anne nous a d’ailleurs rapidement donné les clés :
Encore que ce commentaire laisse à croire que la presse actuelle n’est pas idéale et serait contrôlée par l’état, quand elle souffre bien plutôt de son appartenance à Bouygues, Lagardère, Dassault, etc. pour ne citer que des exemples français. Pour des exemples anglo-saxons, on peut se reporter à l’excellente et toujours actuelle somme de Herman et Chomsky, La fabrication du consentement. Les liens déjà donnés sur les film satiriques de Pierre Carles ou les analyses de l’association Acrimed éclairent également cette problématique. Anne a raison de rappeler que le problème n’est pas l’individu journaliste, mais son insertion dans un système qui lui laisse bien peu de liberté, en contradiction avec la législation voulue en France par le Conseil national de la Résistance.
Je te comprends moins TTE quand tu fais mine de ne même pas voir l’intérêt du boulot abattu malgré tout par certains. Un éclairage distancé sur l’Ukraine, inutile ? Pour ma part je ne regrette pas ma très modeste contribution à l’existence d’un tel journalisme par l’abonnement à un site comme @rret sur images (sur la page d’accueil, les « vite-dits » en accès gratuit sont une mauvaise vitrine, les émissions sont souvent passionnantes), qui a donné récemment la parole à Piotr Smolar, journaliste qui donne un autre éclairage que TF1 (je n’ai pas la télé mais je me suis infligé chez des proches un ou deux « reportages » de cette chaîne pour le dire…)
, le 14.05.2014 à 08:40
Concernant les journalistes décédés, ont ils été plus souvent tués ou accidentés parce qu’ils étaient dans des milieux hostiles, ou parce qu’ils étaient journalistes justement ?
Il y a peu de cas ou le journaliste devait jouer les James Bond j’espère.
C’est une question hein. Un journaliste de guerre a t’il plus de (mal)chance de mourir d’une balle perdue ou sont ils visés pour ne pas diffuser l’information.
TTE, j’irai regarder ton lien « Jeux d’influences, la série documentaire » mais, s’ils manipulent les journalistes, ne vont ils pas me manipuler moi qui les regarde ?
Là, je retourne au taf.
, le 14.05.2014 à 09:52
Ce n’est pas ce que j’ai dit. Pour le moment, les faits sont assez simples et je vois mal ce qu’un journaliste va nous rapporter pour que l’occident change sa manière de traiter le problème. Quoi qu’il arrive et même si une guerre civile majeure venait à éclater en Ukraine, que ferions-nous? La France arrêterait de se fournir en gaz russe (32% des importations)? On enverrait nos chars pour qu’il y ait encore plus de morts? On bombarderait de manière chirurgicale femmes et enfants qui se trouvent trop près d’un char russe? Ah oui, les sanctions économiques… elles ont beaucoup changé la donne en Syrie ou ailleurs.
Si des journalistes veulent y aller, risquer leur peau pour que le bon occidental puisse être informé et en parler au café du commerce, tant mieux. Par contre, sur le changement du cours de l’histoire, je vois mal ce que ces informations pourraient changer. D’ailleurs, si la couverture médiatique d’un conflit pouvait tout changer, ça ferait longtemps que les 26 guerres en cours dans le monde serait terminée… or, à la lecture des derniers évènement dans ces zones de conflit, il n’en est rien.
Encore une fois, ça ne me gêne pas que des journalistes y aillent… je ne vois juste pas ce que ça va changer.
T
, le 14.05.2014 à 10:26
TTE, je n’en reviens pas.
Comme on ne peut rien changer, alors arrêtons d’informer.
Et arrêtons de nous tenir au courant de ce qui se passe dans ce monde.
C’est ça ton message?
Oui en fait.
, le 14.05.2014 à 11:31
Tu pourrais faire du journalisme en faisant question et réponse.
Pour répondre à ta question – si ça t’intéresse d’avoir ma réponse – c’est que informer c’est bien, mais ça doit avoir un impact. Encore une fois, si c’est pour que des gens en parlent au café du commerce, ce n’est pas très utile ni pour la population là-bas, ni pour nous.
Maintenant, si tu penses qu’envoyer 500 journalistes couvrir l’évènement changera quelque chose, alors pas de problème, je peux même participer aux frais de voyage mais le fait est que ça ne changera rien. Alors après, si tu te contentes du « oui mais comme ça on sait » c’est parfait… on pourrait même mettre une note dans la page wiki sur la Crimée: l’occident savait (avec 1 millions de liens sur des articles) mais n’a pas pu changer le cours de l’histoire.
Ceci dit, on s’éloigne un peu du sujet et quand je parle qu’il faut réformer le journalisme (ou la société selon Anne), je ne pense pas qu’il faille arrêter d’envoyer des journalistes dans des coins chauds à travers le monde. Pour moi ce sujet est totalement secondaire pour ne pas dire tertiaire car dans le fond, ça doit représenter quoi? 500, 1’000 ou 5’000 journalistes? Mon problème, comme déjà dit, ce n’est pas ceux-là mais les 2 autres millions de journalistes qui sont en train d’abrutir les masses.
T
, le 14.05.2014 à 12:21
Comment le savoir avant d’informer ?
L’information sur la guerre n’a jamais aucun impact ? Pour ne prendre qu’un exemple, l’information sur la guerre du Vietnam n’a pas changé l’opinion américaine ? On se demande pourquoi les belligérants prennent tant de mal à tenter de contrôler l’information (tu évoques toi-même les fameuses frappes chirurgicales que d’aucuns ont tenté de nous faire avaler…) Bien sûr, tu répondras peut-être, trop peu d’impact, trop rarement… Mais c’est bien pour cela qu’il faut en tirer une conclusion contraire à la tienne. Et on en vient à :
C’est un mépris un peu facile. Mais même si on fait ce constat, comment y répondre ? Éducation, information…
, le 14.05.2014 à 12:26
Éditorial de Daniel Shneidermann sur le site @rret sur images aujourd’hui, à propos de la journaliste Camille Lepage qui vient de se faire assassiner :
Qu’est-ce que ça change nous dira TTE ? Sans doute rien pour l’instant. Mais Camille montre la voie.
, le 14.05.2014 à 14:23
Et pour en revenir au premier post de TTE et au billet d’Anne, ce matin sur FranceInter (oui, je sais j’écoute pas les autres) dans l’ordre :
Info n°1 : « une photojournaliste, Camille Lepage, assassinée en CentreAfrique »
Info n°2 : » Près de 200 morts dans une mine en Turquie ».
Les statistiques sont du côté de TTE mais l’émotion du côté d’Anne et manifestement les journalistes ont privilégié une des leurs.
PS. Néanmoins puisque beaucoup s’intéresse ici à la photo, voir le travail de Camille Lepage sur son site Internet et le portfolio qu’elle avait réalisé pour « Le Monde » en février 2013 : La guerre étouffée du Kordofan du Sud
, le 14.05.2014 à 15:23
Nous sommes d’accord mais n’aurais-tu pas un exemple plus récent qu’une guerre qui s’est terminée il y a de plus de 40 ans maintenant?
Comme tu le soulignes, l’armée a aussi compris que l’enjeu, c’est d’avoir une bonne communication ou autrement dit, de la maitriser. L’invasion de l’Iraq s’est faite avec la bénédiction des médias et ce n’est pas seulement moi qui le dit:
Et rappelez moi, on a trouvé quoi en Iraq? La preuve que les médias ont très bien travaillé avec les différents services de communication de chaque département de l’état… de leur plein gré ou non.
Pour le moment, tout ce qu’elle a démontré, c’est que dans ces pays là, on a beau avoir une carte de presse, on se fait buter comme les autres. Dans les semaines qui viennent, je ne doute pas qu’on va parler de cette affaire et région, c’est ça le corporatisme de la presse. Mais dans les faits, pour les gens qui sont là-bas, rien ne changera malheureusement.
J’espère me tromper mais Camille, comme d’autres journalistes avant elle, est morte dans une région dont les médias et politiques n’ont absolument rien à fiche.
T
, le 14.05.2014 à 15:59
Je suis loin de chez moi depuis ce matin tôt et disserter à partir de l’iPhone…
TTE écrit depuis hier des posts-fleuves dans lesquels il se contredit, par rapport au sujet du jour mais aussi à tant d’autre fois. Dans une société régie par la libre concurrence et toutes ses dérives, y compris morales, il demande une presse pure comme si de changer la presse ça changeait la société.
Et des exemples comme celui de Camille Lepage ne sont pour lui qu’opportunisme émotionnel que les autres journalistes invoquent pour se donner bonne conscience.
Dans cette logique-là, rien ne changera jamais, même pas les journalistes.
, le 14.05.2014 à 16:57
Intéressant fil de discussion!
Etant relativement neuf sur le site, quelques années tout de même, il me semble qu’il y a un contentieux entre TTE et la famille Cunéo quant au thème du journalisme, et que cela fausse un peu les interventions de l’un et des autres.
Je suis personnellement très critiques vis-à-vis des médias en général, qui pour la plupart nous servent une bouillie d’informations ne ressemblant à rien. Internet et les technologies de l’information n’ont pas fait que du bien dans ce domaine. Je suis d’accord aussi pour dire que les liens entre politiques et journalistes ou entre groupes de presse et investisseurs n’amènent rien de bon.
En dehors de cette malheureuse majorité, certains organes de presse, journalistes, et rédactions font un excellent travail. A nous de sélectionner nos sources en fonction de ce que l’on cherche. Mais il est vrai que quand j’entends de personnes que j’estime et respecte recracher ce qu’ils ont consommé dans certains torchons de papier ou sur certaines chaînes de TV, cela me fait mal…
, le 14.05.2014 à 17:14
Hier:
Aujourd’hui:
D’abord pas envie, ensuite pas le moyen (iPhone) mais tout de même suffisamment de temps pour bien salir l’autre… ces journalistes, c’est inné.
Pour ce qui est « posts-fleuves » depuis hier, un petit fast-check s’impose:
Post 3 le 13 mai: 1’092 mots
Post 7 le 13 mai: 4 mots
Post 13 le 13 mai: 238 mots
Post 15 le 13 mai: 152 mots
Post 18 le 13 mai: 276 mots
Post 21 le 14 mai: 215 mots
Post 23 le 14 mai: 231 mots
Post 27 le 14 mai: 191 mots
Tout a fait d’accord avec le premier post mais après, c’est plutôt des petites interventions et à des personnes différentes qui s’adressaient à moi.
Je laisse les autres juger et n’interviendrai plus dans ce fil à moins qu’on m’interpelle…
T
, le 14.05.2014 à 17:18
Me voici revenue sur un ordinateur de dimensions normales.
@ggkrail Il y a effectivement un problème: TTE considère que les journalistes sont les pires des pires, et il devient vite insultant lorsque moi, qui gagne ma vie comme journaliste (j’utilise cette formule car je ne suis pas que journaliste) m’exprime, parfois sur le journalisme, parfois sur d’autres sujets.
J’essaie depuis longtemps de dire que je considère le journalisme un métier formidable pratiqué dans un milieu entre difficile et même hostile à l’expression de la réalité qu’il serait censé diffuser. Les deux plus grandes dérives sont a) que la presse est entre les mains de grands groupes privés qui n’ont pas à coeur premièrement l’intérêt public mais leur profit matériel et b) que tant ces groupes que certains des journalistes, ceux qui se font leurs complices, sont trop proches des pouvoirs en place.
Ce que j’essaie en vain de faire passer, c’est ce que tu dis:
Oui, ces personnes, et même ces rédactions, existent: ils s’appellent par exemple Camille, ou Simon, ou Richard, et ils nous rappellent régulièrement les règles élémentaires de notre métier.
Ce que je ne supporte pas, c’est que parce qu’il y a des ordures, tout soit considéré comme ordure.
, le 14.05.2014 à 20:44
Ayant eu plusieurs fois mailles à partir avec ce monsieur bien que n’étant ni journaliste, ni avocat, ni curé, ni médecin (j’en oublie sûrement), je me suis abstenu de tout commentaire, mais là, je dois dire que je me suis payé une pinte de bon sang : c’est l’hôpital qui se fout de la charité, là !
, le 14.05.2014 à 21:03
Echange intéressant, quoiqu’un peu raide parfois.
En France, 13% des gens font confiance aux politiciens, contre 40% aux journalistes. C’est aussi mieux que les 24% des publicitaires, et cela prouve que les français n’assimilent pas les journalistes aux uns ou aux autres.
D’accord, on est loin des pompiers et des urgentistes, mais le cas n’est pas complètement désespéré.
Je serai malgré tout critique comme la plupart : j’ai remarqué que quasiment chaque fois qu’un journaliste rendait compte d’un sujet que je connaissais vraiment (ce qui est rare), et bien il disait des âneries.
Comme je tiens quasiment toutes mes informations concernant le monde des journalistes, ça en dit long sur l’écart qu’il me reste à combler pour comprendre vraiment ce qui s’y passe !
, le 14.05.2014 à 21:30
Amis cukiens,
Pour faire suite à 33-Anapielsa je ne vais pas prendre parti ici, puisque je l’avais déjà fait, l’an dernier, en étant moi-même acteur d’un reportage biaisé dès le départ.
Des canards, il y en a des boîteux, des Colvert, des Enchaînés mais aussi d’exquis laqués. Vous avez deviné où mon inclination…penche.
, le 14.05.2014 à 21:40
Et pour faire suite à moi-même, je donnais dans cette humeur une citation :
“Toutes les contraintes du monde ne feront pas qu’un esprit un peu propre accepte d’être malhonnête”, écrit Albert Camus. “Or, et pour peu qu’on connaisse le mécanisme des informations, il est facile de s’assurer de l’authenticité d’une nouvelle. C’est à cela qu’un journaliste libre doit donner toute son attention. Car, s’il ne peut dire tout ce qu’il pense, il lui est possible de ne pas dire ce qu’il ne pense pas ou qu’il croit faux.
Et c’est ainsi qu’un journal libre se mesure autant à ce qu’il dit qu’à ce qu’il ne dit pas.”
, le 15.05.2014 à 00:15
Oui, « ni français » ;-) .
, le 15.05.2014 à 16:09
vais pas me faire des potes ici, encore une fois, mais bon:
prenons un exemple comme depart de ma connerie:
« Simon Ostrovsky en pleine action en Crimée (image YouTube) ». Superbe: je n’ai Jamais lu aucun article de « journaliste » qui me montre un ouvrier dans une mine de charbon ou dans un haut fourneau avec la meme mention « en pleine action », cheveux lavés, look playboy, habillé minet, lunettes de marques, les bras ballant et nous faire croire que c’est un hero, un gars qui se sacrifie, au peril de sa vie pour nous, pour un monde meilleur:
y a un peu de la vaseline quand meme, la, non?
Pour avoir fait des métiers a la con dans ma jeunesse et avoir vu des mecs partir, ca m’énerve un peu, beaucoup. Faudrait aller bosser de temps en temps dans certaines toute petites usines françaises de verrerie, de plastiques ou de métaux, je ne parle meme pas du bucheron, mineur ou marin pêcheur déclarés a mi-temps avec une pension de merde. Des gens simples, honnêtes, qui vraiment font un boulot dangereux pour notre comfort reel (et en plus pas par choix mais besoin) et qui pour 5 fois moins y laissent leur femme et gosses sans rien (pas vraiment la meme assurance-vie quad tu bosses sur un chalut, hein) et n’auront jamais la superbe légende sous leur photo: « en pleine action ».
Et vivant a l’étranger depuis 15 ans, lorsque je regarde l’info distribuée en France.. c’est juste pour lobotomiser les gens, c’est d’une niaiserie dantesque.
OUI, un journaliste est vendu! Il est payé pour ‘produire’ un résultat, un objectif de vente! Il est payé pour de « l’info » pour modeler la pensée, pour vendre, pour contrôler; parce que la grand mere qui souffre d’engelures au mois d’aout on s’en tape royal! Remarque, c’est pareil ailleurs, mais c’est pas une raison de manger de la guimauve ici.
On peut meme payer une gamine assez cone d’aller se faire buter pour nourrir la légende des super héros que sont les journalistes de terrain! On essaye quand meme de nous faire croire que ce sont des héros, des martyrs, des mecs couillus, formidables, nécessaire (!!!) et tout ca par amour de l’info, de la vérité, pour un monde meilleur (???), pas pour le fric et surtout, surtout pas pour nous satisfaire d’un voyeurisme pervert d’occidentaux ramollis du gland et du cervelet, et tout çaaa.
La marmotte emballe le chocolat pas qu’en en Suisse, et je suis très con, aussi.
, le 15.05.2014 à 19:24
J’ai souvent côtoyé des journalistes de tous poils, des bons à l’époque où je bossais au TJ (Labévière, Colin), époque où Anne était correspondante TSR à Zürich, des têtes brûlées en gilet pare-balle et des vraiment mauvais, genre JRI de la boîte à cons du côté du quai du Point-du-Jour. Le jour où ça a vraiment tourné, c’est avec l’arrivée des chaînes d’infos continues (chaque oligarque russe ou autre a sa chaîne perso) où la paire de loches de l' »envoyée spéciale » à Bruxelles est bien plus importante que sa compréhension de la politique européenne. J’ai décidé de ne plus cautionner ce monde par mon travail et me suis rabattu sur de la presse écrite de qualité (citée par Anne) et certaines émissions de radio qui gardent un semblant d’indépendance et d’esprit critique (par exemple sur France-Inter à 15h si vous voyez de qui je veux parler !).
, le 15.05.2014 à 23:24
La photo est peut-être mal choisie. Mais je ne ne te fais rien croire du tout, tu n’as qu’à vérifier par toi-même. J’ai pris une photo du jour où plus tard, il s’est fait kidnapper et tabasser.
C’est vrai il s’était lavé avant de sortir. Sa maman l’a fait joli. Et quand il s’est acheté sa dernière paire de lunettes, tant qu’à faire, il n’a pas choisi les plus moches. Pas sérieux, le mec, cqfd.
, le 23.05.2014 à 21:29
Puisque tu parles de ce « non-évènement » et que je suis bien placé pour connaître l’autre bout de la lorgnette, voici la mise au point de Sylvie Maligorne, communiquée en interne au personnel de l’AFP.
, le 24.05.2014 à 11:05
Smop, ce « non-évèvement » est tout simplement révélateur de la connivence qu’il existe entre les médias et les politiques au sens large. La réponse de Sylvie est en cela symptomatique: il n’y a rien à voir, circuler.
Cette façon que les médias ont de dire ce qui est juste ou ne l’est pas, c’est probablement ce qui m’énerve le plus. Et bien entendu, tout ce qu’ils font est juste ou sinon, c’est à cause du monde dans lequel on vit, il ne porte aucune responsabilité dans ce fiasco.
Être journaliste, c’est gagné à tous les coups (sauf en zone de guerre!). Tu sors une news de manière illégale, c’est ton métier d’informer. Tu sors une news sur un non-évenement, c’est pour montrer que personne n’est parfait. Tu fais des articles de complaisance, c’est parce qu’il faut bien nourrir la famille. Tu communiques avant tout sur l’émotionnelle, ce n’est pas pour informer, c’est pour vendre plus. Une/un journaliste se marie avec un politique, ne pensez pas une seule seconde que ça va altérer son jugement. Etc.
Le summum est atteint quand le 4ème pouvoir affirme qu’il n’est que le reflet de la société et qu’il ne peut rien changer. Pourtant, il peut faire le succès d’une entreprise, aider à l’élection d’un candidat à la présidence, conditionner la population à une idée ou objectif, etc. mais il ne peut pas changer la société… marrant pour ne pas dire absurde.
Pour revenir à ton intervention de Sylvie, faisons une analogie à 2 balles: pendant les 5 ans de présidence, Hollande va faire une douzaine de voyages politiques mais surtout économiques avec à bord de l’avion, des dizaines d’industriels en vue. D’autres Présidents l’ont fait avant et je pense que c’est normal, voire même absolument nécessaire. Quand il va partir, il va organiser un pot de départ avec son argent en invitant une dernière fois tous les industriels avec qui il a voyagé, discuté et serré des mains dans les jardins de l’Elysée… tu imagines les titres des journaux au lendemain de ce non-évènement?
Les médias en feraient leur choux gras pendant des semaines si ce n’est pas des mois mais bon, là c’est de l’info, pas un non-évènement.
T
, le 24.05.2014 à 13:25
TTE, j’ai toujours du mal à comprendre ton aversion pour les journalistes. Connivence sous-entend collusion. Où se situe la limite entre connivence et collecte d’informations ? Sylvie le dit clairement : pas de sources, pas d’informations, ou tout du moins, pas d’informations de première main. Il s’agit là d’une agence de presse, dont le rôle est de collecter l’information, de la vérifier, et enfin de la transmettre à ses clients. Le code de déontologie et les statuts de l’AFP sont très clairs (Loi n° 57-32). Sauf exceptions (critiques de films par exemple), il n’y a pas de travail éditorial à proprement parler. Les médias, clients parmi d’autres de l’AFP, travaillent selon un autre modèle. Ils peuvent en effet orienter leur ligne éditoriale selon leur sensibilité ou selon des impératifs commerciaux. Mais là aussi, on ne peut pas mettre tout le monde dans le même sac. Cela fait vingt-trois ans que je collabore, à divers titres, avec le monde de la presse et des médias. Je connais des journalistes totalement « habités » par leur mission. J’en connais d’autres qui ont démissionné d’un bon poste suite à un changement imposé de ligne éditoriale, faisant jouer la clause de conscience ( Article L7112-5). J’ai aussi été de l’autre côté de la barrière. Contact presse d’un éditeur de logiciels, et bien qu’ayant de bonnes relations avec des journalistes de médias spécialisés, j’ai vu combien il était difficile de « manipuler » ceux-ci à mon avantage.
, le 24.05.2014 à 14:22
Mon aversion peut s’expliquer très simplement et elle est liée à l’injustice flagrante de ce métier et de ses droits vis-à-vis des autres.
Ajoute à ça une collusion entre sources et médias est la messe est dite en terme d’indépendance et objectivité. Dire qu’il n’y pas d’info sans source, c’est tout de même avouer qu’en fin de compte, on répète ce qu’on nous dit à l’oreille et en cela, même si l’info est vérifiée, c’est tout simplement un boulot de perroquet.
Je t’invite encore une fois à visionner les deux documentaires « jeux d’influences » et de revenir vers moi pour me dire ce que tu en penses. Si tu as eu des difficultés « à manipuler » les médias, ce n’est pas le cas des communicants qui sont, pour la plupart, issus des médias…
Tout ça n’est qu’un jeu de dupe et je réaffirme qu’aucune autre profession dans le monde n’a autant d’influence et ne doit répondre de rien et à personne à part leur conscience… absurde.
T
, le 24.05.2014 à 16:11
J’ai failli argumenter, mais finalement, non. TTE tu ne discutes pas, tu te répètes, tu n’entends pas ce qu’on te dit, tu continues à généraliser joyeusement, tu es incrusté dans ta hargne. Restes-y. Mon seul vrai regret, à part le fait qu’elle est répétitive, c’est qu’elle est envahissante.
, le 24.05.2014 à 23:43
Merci donc pour cette intervention pertinente et qui permet d’élever le débat à la hauteur de Flevoland. Pour reprendre ton mot et n’ayant pas contribué à ce fil depuis le 14, j’espère ne pas être aussi envahissant que les médias qui font tous les jours des unes sur ce qui fait vendre mais pas ce qui compte.
Si je dis toujours la même chose, c’est que pour le moment, tout ce que j’ai entendu et lu, c’est toujours les mêmes excuses lancinantes pour décrire la profession: on n’y peut rien, c’est à cause de la société et il faut bien bouffer.
Enfin, avant qu’Anne n’affirme avec une grande perspicacité professionnelle que mes interventions sont « fleuves » et « contradictoires » entre 2 trains, bonne nuit.
T
, le 26.05.2014 à 18:08
CQFD