C'est à mon tour de vous présenter, chères lectrices, chers lecteurs, tous mes voeux pour la nouvelle année : puisse celle-ci être pleine de bonnes surprises, de joies et surtout puissiez vous être tenus éloignés de la maladie. Car s'il y a bien une chose qui est très précieuse, c'est la santé ; sa propre santé !
Je vais d'ailleurs profiter que nous soyons encore dans la période propice aux bonnes résolutions — ou du moins aux tentatives de bonnes résolutions — pour vous présenter un ouvrage qui s'adresse à tout le monde : « Bien vivre avec sa maladie » des Professeurs André Giordan et Alain Golay, aux éditons JC Lattès. Ce livre va proposer des « conseils éclairés et rassurants pour mieux vivre avec sa maladie », dixit l'éditeur. Et je dois dire que j'avais une certaine appréhension quand à la lecture de ce livre : je me suis dit que c'était encore un ouvrage « marchand de rêves » — promettant une guérison en un claquement de doigts — ou à la stigmatisation facile... Or, c'est tout sauf cela !
Des conseils éclairés et rassurants pour mieux vivre avec sa maladie
Un livre s'adressant à tout le monde... oui tout le monde !
En Suisse, 1,5 million de personnes vivent actuellement avec une maladie chronique : soit environ une personne sur cinq vit avec une pathologie dite « de longue durée à évolution lente » et il est donc certain qu'au moins une personne de votre entourage (ou vous-même) ait à faire à l'une ou l'autre de ces maladies chroniques (asthme, cancer, diabète de type I ou II, maladies cardiovasculaires, obésité, etc...). C'est dans cet état de fait que cet ouvrage prend tout son sens, car il ne s'adresse pas uniquement aux malades, mais également à leur entourage, aux soignants et même à toute personne en « bonne santé ».
D'ailleurs, comme il est bien décrit dans le livre, nos sociétés occidentales ont la fâcheuse habitude d'opposer la « bonne santé » à la maladie : on fait automatiquement partie d'un groupe sans possibilité d'appartenir aux deux. Et c'est fort regrettable ! Car il est faux de séparer les gens dans deux entités totalement hermétiques. D'ailleurs, Messieurs les Professeurs Giordan et Golay préfèrent parler du « capital santé » : chaque personne dispose d'un capital santé et être malade ne veut pas dire qu'on perd celui-ci. Il est à la limite un peu réduit, mais clairement pas dissout. Cela permet à la fois aux patients de comprendre que malgré leurs maladies, ils ont encore des choses à défendre et à préserver, mais également aux biens-portants de ne pas stigmatiser les personnes atteintes d'une pathologie chronique.
Le corollaire à ce « capital santé » est qu'il est indispensable de comprendre qu'on ne nait pas avec le même capital et qu'il est important de gérer celui-ci au mieux. Mais — et j'insiste lourdement sur le mais — il est totalement faux de croire que si des personnes venaient à être diagnostiquées comme malades chroniques, celles-ci sont automatiquement de mauvais gestionnaires ! Car tout le monde peut être confronté à une pathologie chronique, même les plus actifs et sportifs d'entres nous.
Un livre également pour les soignants !
Le principal défaut de la médecine occidentale, c'est qu'elle a tendance à se focaliser sur la maladie, oubliant — parfois volontairement — le patient dans sa globalité. Heureusement, les choses changent et les premiers chapitres de ce livre vont permettre aux soignants une nouvelle prise de conscience de l'importance de voir la maladie et le patient comme un tout. Certes, la médecine moderne permet de résoudre bien des situations, mais dans le cas d'une maladie chronique, il est également important d'inclure toute la situation autour du patient. Car comme le relèvent les auteurs, une partie de la solution se trouve aussi dans l'environnement et la vie quotidienne de celui-ci.
Les auteurs développent un autre thème qui intéressera les soignants : la philosophie de « l'éducation thérapeutique du patient ». Celle-ci a pour but d'apprendre au patient à comprendre et connaître sa maladie pour ensuite mieux la gérer et savoir faire face aux éventuelles crises ou rechutes. Ceci va avoir comme implication de donner des responsabilités thérapeutiques au patient, voir dans certains cas, le considérer comme cothérapeute.
Last but not least... Un livre destiné surtout au malade !
Malgré tout ce que j'ai écrit ci-dessus, ce livre nous est principalement destiné. Il va nous permettre d'apprendre à mieux gérer notre/nos maladies de longues durées, de savoir quelles attitudes et attentes avoir auprès de nos soignants. Mais surtout, il va nous donner quelques pistes pour tenter d'améliorer notre quotidien et redevenir acteur de notre propre vie ; voir de pouvoir « grandir avec notre maladie » ! On y apprend également à profiter de moments exceptionnels, tout comme savoir reconnaître les signes que nous envoie notre corps...
Il va être également utile à nos proches, car cela leur permettra d'appréhender les changements nécessaires pour la prise en charge d'une maladie chronique, de mieux comprendre quelles questions nous sont brutalement imposées et comment nous devons gérer des choses simples de notre quotidien...
Un livre pour tout le monde, vraiment !
Annexe : Pour ceux que cela intéresse, j'ai trouvé, après avoir écrit mon article, cet interview du Prof. A. Golay à l'enseigne du Journal de 12h45 de la RTS.
, le 02.01.2014 à 02:28
J’ai une affection de longue durée, j’ai donc appris à être acteur de ma thérapie pour ne pas paraître une victime aux yeux de mes proches, et quand j’ai un coup de mou personne ne dramatise plus que de raison.
, le 02.01.2014 à 06:32
Merci pour ce témoignage !
Ce qui est intéressant avec ce livre, c’est qu’il s’adresse tant à de nouveaux malades chroniques qu’à des gens vivant depuis longtemps avec leur(s) maladie(s) : il propose quelques pistes de réflexions philosophiques très pertinentes.
, le 02.01.2014 à 09:31
Très intéressant!
J’ai la chance de ne connaître ni diabète, ni cancer… Par contre en lisant « obésité » je me suis senti concerné. Encore que j’aie tendance à considérer mon obésité comme une sanction (une punition) de mes habitudes alimentaires que comme une maladie. Et même si je suis passé d’une obésité « sévère » à une « modérée », j’ai tout le mal du monde à faire comprendre à mon indice de masse corporel (IMC) à jouer profil bas…
Ce qui m’a le plus interpelé, c’est la distinction que fait le Prof. Golay entre volonté et engagement dans le sujet du 12:45 que tu as mis en lien:
« La volonté ne tient pas longtemps habituellement. Alors que l’engagement personnel, c’est à long terme, ça vient de l’intérieur, c’est une survie… »
J’ai tendance à lier les deux: sans volonté, pas d’engagement possible. Ça m’intéresse donc vraiment de comprendre la distinction qu’il fait.
Par ailleurs, je vois que ce Prof. Golay a commis quelques ouvrages dont les titres m’accrochent:
Pourquoi nous n’aimons pas le sport
Comment motiver le patient à changer ?
Le seul problème, c’est que cela semble être des bouquins destinés aux professionnels de la santé, ce que je ne suis pas…
Mais merci en tout cas pour cette présentation, je m’en vais acheter (et lire!) ce livre très vite!
, le 02.01.2014 à 10:07
Ce billet résonne en moi. J’ai exercé 40 ans dans un domaine où les maladies chroniques sont le quotidien, des patients et aussi des soignants.
Avec l’allongement de la durée de vie, on vivait en moyenne 35 ans de moins au début du XX ème siècle, les maladies chroniques ont pris le devant de la scène, au point de devenir LE problème essentiel de santé public de notre temps, et de notre monde. Qui dit santé publiques dit finances.
Il est salutaire de lire un titre tel que « Bien vivre avec sa maladie », encore que le « sa » me fait tiquer. C’est un tic de langage détestable utilisé par les soignants pour désigner « sa prostate, sa pneumonie, son hypertension ». Il me semble que « Bien vivre avec la maladie » ferait tout aussi bine l’affaire sans connoter le tic professionnel de langage.
le contenu du titre a heureusement, dans les dispositions actuelles, l’exaspérante appréciation que je n’ai que trop connue « il/elle n’accepte pas sa maladie », prononcée par des soignants répétant comme des ânes ce qu’ils avaient entendu, et qui ne faisait que traduire la faiblesse de la prise en charge de l’époque: on renvoyait au patient notre propre incompétence.
Ce qui n’est pas abordé ici, je n’ai pas lu le livre, est le sentiment de perte que traduisent tous les « atteints ». Cette perte correspond au sentiment très confus de l’invincibilité héritée de l’enfance. Cet aspect est vécu plus ou moins douloureusement. Le corollaire est la perte d’autonomie, non citée non plus.. Et qui dit perte dit deuil, et que faire avec ce qui reste ?
Alors oui, l’éducation thérapeutique permet de démystifier les zones d’ombre de la maladie. Dans ma spécialité, on a mis longtemps au premier rang, dès les années 1973, cet aspect: on proposait, voire imposait la dialyse à domicile aux patients qui devenaient ainsi « autonomes » après une période d’éducation de 3 mois environ. Il faut dire que le bénéfice ainsi réalisé – les coûts de personnel sont colossaux – était notable. La qualité et la durée de survie était nettement supérieure. Curieusement, mis à part au Canada et en Grande Bretagne, ce type de prise en charge a disparu.
J’espère que cet aspect n’est plus majoritaire.
Un livre pour tout le monde, peut-être mais certainement pas pour gérer la perte.
, le 02.01.2014 à 12:01
Curieux… En tant que patient je perçois ce possessif autrement: « la maladie » me donne l’impression d’un truc extérieur qui doit être vaincu avec des moyens définis uniquement par ses propres caractéristiques, alors que « ma maladie » me parle justement de la prise en compte de ma « globalité »; un peu dans l’esprit de l’homéopathie (du moins tel que je le comprends) qui ne s’attaque pas simplement au « rhume » mais s’applique à prendre en compte l’expérience concrète qu’en fait cet enrhumé-ci.
Mais bon, je parle de rhume où il est question de maladies beaucoup plus graves, dont je n’ai – à ce jour – pas eu à faire l’expérience, du moins pas personnellement…
, le 02.01.2014 à 12:27
Merci pour vos commentaires, c’est toujours plaisant de les lire :)
Je suis du genre à penser que trop d’informations tue en définitive l’information. Ce livre contient déjà beaucoup de pistes de réflexion et permet un engagement d’ores et déjà conséquent. D’ailleurs, les auteurs mettent en garde contre une partie de l’information que l’on retrouve sur Internet et précisent bien (dans le cas de l’obésité) que rarement les régimes fonctionnent à « part pour ceux qui l’ont inventé ».
Dans ton cas, pourquoi ne pas prendre contact avec l’équipe du Prof. Golay ? Il exerce aux HUG et je crois savoir que tu habites en région lémanique. Ce serait un bon moyen pour t’aider et t’encourager dans tes efforts !
Personnellement, je préfère le titre tel qu’il est car après avoir lu le livre, je pense que la volonté des auteurs est de responsabiliser le lecteur. Non pas sur la survenue de la maladie mais bien dans la gestion de celle-ci pour « apprendre à grandir avec elle ». Ainsi, le malade possède une partie de la solution entre ses mains et va être impliqué dans le processus thérapeutique. Ce faisant, le malade va pouvoir trouver des solutions qui lui correspondent. Ne dit-on d’ailleurs pas qu’il existe « autant de diabètes que de diabétiques » ?
A l’inverse, si le titre était « Bien vivre avec la maladie », je pense qu’il y aurait facilement une déresponsabilisation totale du malade au profit des soignants. C’est ce que veulent justement éviter les auteurs.
Tout le thème de l’annonce (et de la réception) du diagnostique ainsi que les conséquences pour les personnes nouvellement diagnostiquées sont traités dans le livre. J’aurai pu en parler car c’est effectivement un sujet très important, mais cela aurait rallongé d’autant mon article. Mea Culpa !
, le 02.01.2014 à 18:25
Dans mon cas je vais chaque mois en l’hôpital de jour suivre mon traitement, chaque patient perçoit à sa manière « sa »maladie, nous avons des résultats différents avec le même protocole ce qui personnalise la maladie. De plus c’est quelque chose que l’on a en nous, qui est ressenti que par nous, c’est mon truc à moi, je dialogue avec, nous vivons ensemble.
, le 02.01.2014 à 19:03
Je persiste à ne pas comprendre la propension à utiliser un possessif
, le 02.01.2014 à 21:21
@ysangrin
Je suis d’accord c’est irrationnel, mais cela aide à être un et pas un ensemble
@PhB
J’ai une maladie incurable pour le moment, je dois donc cohabité pour vivre avec le plus de confort pour moi et mon entourage.
Être acteur c’est connaître sa maladie, être partenaire de l’équipe médical, adapter son quotidien, donner le change pour rester soluble dans la société.