C’est le matin. Tôt. 5 heures et une brouette de minutes.
Je me lève, un peu dans le cirage, j’ai mal dormi.
Je me dirige vers la cuisine, pour brancher la bouilloire électrique, histoire de faire chauffer l’eau nécessaire à la confection du breuvage qui me tirera de ma torpeur. Je n’arriverai pas jusque là.
Elle est là, elle me toise avec ses yeux jaunes. Mon esprit embrumé se rend à l’évidence : pour éviter d’infliger à mon ouïe des sévices pratiquement irréparables, je dois satisfaire son appétit. Je me saisis d’un sachet contenant une mixture nauséabonde, dont je jette une partie du contenu dans son écuelle (c’est ça la vie, je dois payer la sauvegarde d’un de mes sens par le sacrifice d’un autre).
C’est bon, je peux reprendre le cours de mes activités.
Après avoir déjeuné, je procède à mes ablutions, m’habille, fais mon sac et m’apprête à partir (dans le froid) pour prendre mon train. La voilà qui vient me gratifier d’un long frottement sur la jambe. La Créature, quand elle est rassasiée, est affectueuse. Elle veut être sûre que l’on reviendra. C’est mignon. Mais dans cette grande preuve d’affection, elle laisse tout de même une sacrée traînée de poils sur mon jean, que j’ai choisi sombre aujourd’hui. Pas de roll-roll à l’horizon, je suis à la bourre, j’essayerai d’enlever ça au mieux dans le train.
Un "roll-roll" (crédit image : 3M)Vous avais-je dit que j’avais mal dormi? C’est bien parce que la Créature exerce ses pressions même pendant son sommeil (et, partant, le mien). Je n’aime pas les appartements surchauffés. En hiver, la nuit, il fait en général un peu frisquet chez moi.
C’est pourquoi la Créature vient chercher de la chaleur. Le problème c’est qu’elle vient la chercher contre moi. Et que, moi, je n’aime pas trop qu’on me colle la nuit. Ce qui fait que, malgré un lit en 180*200 cm, mes nuits ressemblent assez à cela.
Toute exagération dans les mensurations n’est pas fortuiteMais cela n’est pas tout. La Créature ronfle. Peut-être parce qu’elle se met dans des positions exotiques dans le but vil, mais assumé, que le maximum de surface de son petit corps (petit mais trapu, la Créature fait dans les 7 kilos) colle au mien.
Mélangez tout ça, vous comprendrez bien que la nuit peut ne pas être aussi reposante qu’elle devrait l’être.
"Ferme la porte!", me direz-vous. Ouais. Vous savez combien c’est fatigant d’entendre des bruits de griffures pendant la nuit ? Ça l’est trop pour moi en tout cas.
La journée, elle, se passe d’une manière somme toute assez normale.
En rentrant, j’ai le droit à un accueil en toute démesure. La Créature avait raison, je suis rentré. Partant, je peux lui prodiguer les caresses dont elle est avide, elle manifeste son contentement de manière sonore (je ne comprends pas la Créature, mais je suis convaincu qu’elle me dit "c’est bien, humain"), ce qui me vrille moins les tympans que le matin, probablement parce que mes oreilles, violées consécutivement par des travaux pratiques de droit des obligations et par un cours de droit international, trouvent que ce bruit guttural est finalement assez doux.
C’est peut-être pendant ce genre d’opérations que la Créature cache le mieux son jeu. En effet, son pelage tigré est d’une douceur rarement vue sur ce type de spécimen, mais ne dit-on pas que les plus tranchantes des épées s’abritent dans les fourreaux les plus doux?
Mais la Créature m’a fait un cadeau. Une merveilleuse pelote de rejection trône sur le carrelage de l’entrée (couleur : blanc virginal). Je nettoie, je désinfecte, ne gronde pas la Créature, elle n’y est pour rien (encore que je suis sûr que cela se passerait mieux dans son délicat estomac si elle arrêtait de se goinfrer des plantes de la voisine, qui commence d’ailleurs à en avoir marre).
Je me mets à mes révisions. La Créature est curieuse. Elle doit savoir ce que je fais. Fort heureusement, le bureau est le dernier bastion de résistance face à son règne sans partage. Des fois, elle essaye de monter dessus, mais elle comprend vite que ce n’est pas sa place. De plus, mes genoux sont bien plus moelleux qu’une planche de bois, ce serait dommage de se priver.
Une Créature n’est pas un chien, on ne lui donne pas d’ordre, on lui adresse des requêtes, auxquelles elle choisit de donner suite ou non.
C’est l’heure du repas. Il faut quand même que je me nourrisse. Mais avant de faire quoi que ce soit, il faut nourrir la Créature. Les conséquences d’un oubli pourraient être catastrophiques. En plus des manifestations sonores qui en découleraient, la Créature ne me laisserait pas me sustenter.
C’est l’heure d’aller s’affaler devant la télé. La Créature, repue, viendra se caler sur moi, repu aussi, et donc avec un travail de digestion qui s’accommode assez mal d’une pression sur l’estomac. Elle se frottera à ma barbe, se tournera, se gaufrera sur le côté. Et restera tranquille.
C’est l’heure d’aller se coucher. La Créature a un coup de sang (on appelle ça "avoir son quart d’heure", je crois). Pendant ces longues minutes, tout peut arriver : embuscades en sortant d’une pièce, galop dans les couloirs avec virage en drift, planque dans la baignoire (ce qui lui permet de me surprendre quand je me brosse les dents), déterrage d’un jouet ô combien bruyant et ô combien oublié, car bien planqué, pour le joindre à l’activité du galop.
La Créature est crevée, cette nuit, elle choisira d’aller dormir dans la corbeille à draps sales. Elle est à moitié vide, et je l’ai poussée volontairement près du radiateur dans l’espoir que la Créature la choisisse comme couche. Moi aussi je suis crevé, et je vais pouvoir dormir cette nuit normalement, de tout mon saoul. Peut-être que la Créature viendra demander un câlin en pleine nuit. Mais c’est toujours plus agréable que de se faire réveiller par une sirène de pompier, on dira.
NB : j’espère que vous l’aurez compris, j’adore mon chat, c’est un compagnon tout ce qu’il y’a de plus chouette, mais il faut dire que certaines journées comme celle racontée plus haut, on a vraiment l’impression de subir! Et vous, vous avez des bestiaux? Lesquels?
, le 03.12.2013 à 00:42
Eh oui ! Tu habites chez le chat et non pas l’inverse. J’ai un chat (un persan à poils longs et soyeux) qui fait sa vie. Avant, c’était pareil : grattage de porte pour rentrer dans la chambre et 5 minutes après, monsieur veut sortir. Retour dans la nuit pour dormir à côté de la tête. Enfin, j’ai le sommeil facile, ça me réveille pendant la montée du félin à pattes de velours et je me rendors avant qu’il ne ronronne.
Depuis que nous avons un chien (ah oui, depuis 2 ans nous avons pris un compagnon pour le chat), ledit félin reste avec lui. Bon, ce ne fut pas facile au début : qu’est-ce que c’est que cette énorme boule de poil ? Il est idiot, il ne sait pas se servir de ces pattes ? Bref, ce fut un peu mouvementé au début avec la jalousie du chien ne pouvant pas monter sur le canapé alors que ce vil animal (le chat, le fourbe) pouvait rester près de ses maitres !
C’est vrai qu’il y a des inconvénients : poils, véto, promenades, etc. Mais c’est quand même un grand plaisir de les savoir à côté de nous et de venir chercher une caresse (bon, plusieurs jusqu’à en devenir pénible) ou des câlins façon « je t’aime énormément, on ne se quitte pas ! »
Le chat persan s’appelle Saphir (parce que sa robe est bleue [pour moi, c’est gris pâle]) et le chien, un jeune terre-neuve, s’appelle Gwaihir.
, le 03.12.2013 à 05:36
Voilà quelques années, je rencontrai un chaton famélique au poil noir errant sur les pavés de la cour du boulot. Bien décidé à squatter un home, il finit par me convaincre de l’héberger. Je cédai avec réticence n’ayant jamais eu l’occasion de soigner un compagnon à quatre pattes…
Nous passâmes deux années merveilleuses avant qu’il ne disparaisse mystérieusement lors d’une de nos sorties dans le grand square voisin. Je ne me suis jamais remis du départ de ce jeune casse-pied fourré comme un nounours et doté d’un caractère de cochon.
, le 03.12.2013 à 05:55
Suis pas fan des chats. C’est plus toi qui tient compagnie au chat que l’inverse. Rêve d’avoir un chien, comme lorsque j’étais jeune, chez mes parents. Mais sujet de divorce avec ma Femme. Seuls animaux admis à la maison: 2 enfants et 3 poules. On vit en autarcie pour les oeufs.
, le 03.12.2013 à 07:14
Nous sommes (ma femme et moi) fans des chats, nous en avons deux, totalement différents physiquement et aussi de caractère. Ils vivent dehors principalement, mais passent presque toutes les nuits dedans. Nous avons de la chance, çe ne sont pas des chats “gratteurs”, de plus je suis à moitié sourd et je dors comme un plomb, alors je vis que les bons moments avec eux et il y en a beaucoup.
C’est tellement simple que nous allons dans quelques jours accueillir une jeune chienne, tout est prêt; je sens que la période des fêtes de fin d’année sera mouvementée, je me réjouis.
Miaouh !
, le 03.12.2013 à 10:09
Bientôt quarante ans de vie commune et 5 chats plus tard:
– un siamois diaboliquement intelligent et hyper sensible qui venait s’installer sur les genoux de ma douce en miaulant tout en lui montrant une patte. Signification: coupe mes griffes. Le même devant un miroir allant chercher derrière l’intrus. Combien de promenade pédestre avec lui, sans laisse, et on ne l’a jamais perdu
– une petite chatte Sacrée de Birmanie indifférente à tout, ayant peur de tout
– son fils, adorable, se mettant sur le dos à nos pieds afin qu’on lui caresse le ventre
– une petite chatte intégralement noire, d’une beauté sauvage … comme son caractère. Mais quand elle décidait, il fallait lui faire de la place et la câliner.
– son frère, d’un caractère aimant, adorable, paisible compagnon de vie.
Tous ont dormi avec nous, dont l’un sur ma tête systématiquement.
J’ai revécu les scènes de distribution de nourriture avec joie.
, le 03.12.2013 à 10:55
Le problème, c’est pas la Créature, c’est le cours de droit international !
Courage pour les poils, du plus bel effet sur un pantalon – pull noirs !
, le 03.12.2013 à 12:28
Tout mais alors TOUT ce que tu as écrit, je le vis avec ma chatte.
Mais on l’aime et elle nous fait rire, et puis, elle est tellement sympa!
, le 03.12.2013 à 12:40
Merci pour ce billet qui ma bien fait rire!
J’aime les animaux et les chats en particulier. Mais je n’ai pas envie d’en avoir. Je pourrait l’envisager si je vivais à la campagne, mais en ville, j’ai du mal.
Ceci dit, je serais volontiers client, s’il y en avait à Genève, d’un Bar à chats. Ça doit être assez génial.
, le 03.12.2013 à 12:46
Depuis ma naissance, j’ai toujours vécu entouré de ces petits félins. Mon intérêt pour eux est probablement la seule et unique chose héritée de mes parents… Aujourd’hui, ce sont deux chats siamois qui m’accompagnent, Arthur (Seal Point) et Pénélope (Blue Point). Ramenés chatons de l’archipel des Açores en 2001, ils miaulent portugais et ont fait le tour de la planète avec moi, jusqu’à Tahiti.
@TroncheDeSnake : Un café à chats a récemment ouvert ses portes à Paris.
, le 03.12.2013 à 12:58
Oui smop, j’avais vu. Mais depuis Genève ça fait un peu cher le câlin!
, le 03.12.2013 à 13:07
Nos chats doivent être des clones. Même caractère, même tête
, le 03.12.2013 à 13:37
Nous, c’est sûr, on a le plus gentil chat du monde!
16 ans et demi qu’il partage la vie de notre famille.
, le 03.12.2013 à 14:01
Toujours voulu un animal de compagnie et comme je n’ai pas encore trouvé une femme*, je pense sérieusement à prendre un compagnon à 4 pattes… mais ça serait plutôt un chien mais avec la vie que je mène, ça serait compliqué…
, le 03.12.2013 à 14:33
Ce magnifique texte, très drôle mérite d’être dans une anthologie consacré aux chats. Je me suis beaucoup amusé en lisant. C’est tout à fait notre chat
, le 03.12.2013 à 15:08
Je vous lis toujours tous avec attention, même si je ne comprends pas toujours tout. Bon, les jeux de Puzzo, ça va bien, les blogs culturels et sportifs aussi. L’informatique un peu moins. Alors aujourd’hui, j’ai passé un moment chat l’heureux sur ce texte qui m’a fait sourire du début à la fin. Merci iYannick ! Et pour répondre à ta question : j’ai actuellement 5 chats : Guimauve (15 ans environ), Shelly (1 ans 1/2) qui est aussi la maman de Zephir, Oreo, Tigresse et Fripouille (confiée à des amis, avec beaucoup de regrets, mais bon… ). Je n’ai pas le temps et pas le courage d’en faire un joli texte comme le tien, mais il y aurait matière à l e faire. La vie avec eux est aussi plaisante que fatigante. Il n’y a qu’à voir Fripouille suspendue à la tringle du rideau, Tigresse en train de grignoter le fil du chargeur téléphone, la tapisserie pendre lamentablement du mur etc… Mais je ne cesse de répéter à mon entourage que cette expérience de la maternité de Shelly a été l’une des plus jolies de ma vie. Aujourd’hui encore, alors que les petits ont 3 mois 1/2, je souris souvent en les observant, même si ce n’est que dormir.
PS : “dans la corbeille de draps sales” ??? Les miens viennent systématiquement se reposer dans ma corbeille de linge propre à repasser…
PPS : je ne sais malheureusement pas insérer de photos ici… parce que de ce côté-là aussi, je me fais plaisir :-)
, le 03.12.2013 à 15:48
TTE: regarde du côté du lapin nain ou des cochons d’Inde. C’était assez compatible avec ma vie de (pigeon) voyageur
, le 03.12.2013 à 17:50
Equis, dans la neige
, le 03.12.2013 à 19:24
Si vous aimez les chats et les jeux de mots, je ne peux que vous conseiller un vieux livre parue à la fin des années 50 : portée de chats de Siné. C’est excellentissime : chat + pitre ; chat + peau… Je pense que ce livre ne se trouve plus qu’en occasion.
, le 03.12.2013 à 19:54
Un grand classique à (re)découvrir : Simon’s Cat
, le 03.12.2013 à 20:30
Félix est un chat très sympa avec nous.
Et nous sommes très sympa avec lui…
, le 04.12.2013 à 10:31
Quatre chats daignent nous héberger chez eux, un mâle dominant, le farouche Bibi, et trois de ses fils, dont la mère a été se faire voir ailleurs le jour où l’on a coupé les couilles à tout ces braves garçons. À l’instant même, Jaku vient de passer du dossier du fauteuil à mes cuisses, et il ronronne sobrement, c’est d’ailleurs assez rigolo : il ne supporte pas d’être sur les cuisses ailleurs que devant l’ordinateur, par contre, là, il va me chauffer pendant un moment… Kuro vient de rentrer d’une petite promenade, il est venu se frotter rapidement pour prévenir de son retour sain et sauf (il lui manque une patte postérieure, ce dont il s’accommode parfaitement –c’est lui qui cours le plus vite–, sauf, le pauvre, quand il essaye de se gratter de ce côté là). Quand à Anti, il adore faire du yoga…
z (qui a toujours cohabité avec des chats, je répêêêêêêêêêêêête : et les chiens m’adorent, mais ce n’est pas réciproque… keske c’est con, un clebs !)
, le 04.12.2013 à 19:33
C’est très amusant de lire tout ça. Ma compagne a un chat qu’elle est allé cherché à la SPA avec la patte arrière gauche en moins (opération suite à choc voiture vraisemblablement). La patte n’a pas repoussé, je lui ai dit d’aller se faire rembourser.
Pour ma part, j’ai un chat de 13 ans qui a un caractère qui empire avec le temps. Mais ça je peux le supporter. Par contre il pisse, et ça … J’ai prévenu mes filles (afin de préparer le terrain au cas ou) que j’en avais marre de nettoyer en rentrant du boulot, et que si un jour il pissait sur mon VTT ou un de mes Macs…. Il est bien nourri, peut sortir et rentrer quand il veut via sa chatière. J’adore lui faire des calins, mais cette façon qu’il a de montrer son mécontentement me lasse. J’ai acheté du répulsif qui fonctionne pas trop mal.
Ce sera mon dernier chat.
, le 04.12.2013 à 23:21
il a un nom le chat
, le 05.12.2013 à 11:10
Moi aussi j’ai un chat, depuis quelques mois… Il est adorable, même s’il nous réveille au milieu de la nuit en nous griffant les pieds, juste pour voir comment ça fait! Et si on tourne le dos 30 secondes, les rondelles de saucisson disparaissent mystérieusement. Et il a bien sûr un talent fou pour te regarder avec des grands yeux innocents. Au fond il est comme nous: on veut de l’Apple, du Canon ou du Nikon, lui, il veut du Sheba, du Almo Nature (super cher), mais pas du bas de gamme de la Migros, hein!
Tout est résumé dans cette video
, le 15.03.2014 à 19:59
Ils sont superbes tes chats Smop. Et les autres photos publiées ci-dessus aussi. J’ai eu beaucoup de chats dans ma vie qui ont donné place à des rats depuis quelques années. Mais ce qui n’empêche pas d’avoir également un ami félin, peut-être un jour…