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Vagabondage autour des Misérables

Les livres sont des visages, parfois des paysages; ils nous accompagnent bien au-delà de la lecture, ils suscitent une attente, quelquefois une peur, ils libèrent la pensée et deviennent un souvenir. Il est des livres que l’on évite et des livres vers lesquels nous revenons toujours, il est des livres que nous récitons presque entièrement. Et il est des livres-monstres, des livres qui sont des figures imposées, presque des monuments nationaux, ceux-là mêmes que nous pensons connaître par cœur et qui nous sont peut-être finalement inconnus à force de n’être qu’un titre ou une image d’Épinal. Les Misérables de Victor Hugo sont de ces livres-là.

 

Pourtant chacun de nous connaît l’œuvre de ce monstre sacré que fut Hugo, que l’on aime le style ou non, on ne saurait dissimuler son importance; après tout, André Gide n’a-t-il pas répondu avec facétie « Victor Hugo, hélas » alors qu’on lui demandait de nommer le plus grand poète français? Et chacun de nous pourrait évoquer une page des Misérables, ce roman colossal paru en 1862, tour à tour imaginé et délaissé par Hugo à plusieurs âges de sa vie, et qui provoqua une émeute le jour de sa sortie; pour certains, la quête de lumière de Valjean s’imposerait à l’esprit, pour d’autres ce seraient les pas de Cosette perdue dans la nuit qui résonneraient dans leur mémoire, pour d’autres encore, ce serait une barricade dressée dans Paris. Toutefois, quelle que soit l’approche que nous avons des Misérables, elle ne devrait pas, justement, être barricadée par le souvenir du forçat généreux et de la fillette apeurée. Les pages des Misérables ne sauraient tomber en poussières sur les bibliothèques, la littérature ne devrait pas impressionner, rebuter ou même lasser, car elle est vivante, Les Misérables sont vivants, et les lire ne peut que parler à notre siècle pétri de balbutiements et d’autant de progrès. C’est pour cela que je souhaite à présent me promener avec vous sur les lignes tracées par Victor Hugo; et qui sait si ce vagabondage parsemé de-ci, de-là de citations du livre ne nous conduira pas vers ce beau voyage que représenterait une nouvelle lecture?

 

« Ce n’est rien de mourir; c’est affreux de ne pas vivre. »

 

Certes, relire Les Misérables demande un peu de temps, le roman de Hugo faisant environ mille cinq cents pages; et Les Misérables demandent également de l’attention, car de l’évêque de Digne à la poupée de Cosette, de la déchéance de Fantine au sauvetage de Marius par Valjean dans les égouts, nous suivons bien des digressions, nous revenons à Waterloo et nous apprenons tout du gamin de Paris. Ce qui nous donne le droit de supposer qu’une telle œuvre cache forcément une ossature rigoureuse; or, il n’en est rien, car il ne reste comme ébauche de plan que ces quelques mots laissés par Hugo sur une feuille, « Histoire d’un saint. Histoire d’un homme. Histoire d’une femme. Histoire d’une poupée. » Ce qui n’empêche pas Les Misérables d’être structurés, les thèmes et les personnages se répondant; il s’agit de relater la rédemption d’un homme, presque un saint, dont la mort achèvera le récit, un récit qui avait commencé par la description d’un autre homme, peut-être ce saint originel couché par Hugo sur son papier. Un voyage de l’ombre à la lumière, des pires bassesses à la grandeur de l’âme, le roman d’un juste qui doit sa vie à une femme cassée comme une poupée et à une petite fille qui rêvait de poupées, voilà Les Misérables.

 

Ce roman, c’est aussi un peu la vie de l’auteur dissimulée au fil des pages; un peu Valjean, beaucoup Marius, Victor Hugo se raconte. C’est ainsi que des chercheurs ont vu dans le premier matricule de forçat de Jean Valjean, 24 601, la date de la conception de Hugo, le 24 juin 1801 (l’écrivain naîtra prématurément huit mois plus tard), et dans le second matricule, 9430 (septembre 1843, le néant), le souvenir de la mort brutale de sa fille adorée, Léopoldine.

 

Mais Les Misérables sont avant tout le récit de la misère, comme le titre le laisse deviner, il s’agit d’un roman social; et pourtant, celui-ci ne s’intitule pas « La Misère » (même si le premier titre imaginé par Hugo était Les Misères), mais bien Les Misérables, ce qui met en avant la volonté évidente de parler des hommes. Qu’est-ce exactement qu’un misérable? Assurément une personne vivant dans le dénuement le plus complet, quelqu’un de malheureux pouvant appeler la compassion, mais aussi quelqu’un de méprisable. À la lumière de ces significations, nous pouvons remarquer que tous les personnages des Misérables sont précisément misérables, Fantine et Cosette connaissant la plus grande pauvreté, les révolutionnaires se rangeant aux côtés de ceux qui n’ont rien, et Thénardier étant un misérable au sens le plus abject du terme. Seul Javert échappe peut-être au qualificatif, même si son suicide, la seule issue concevable pour cet inspecteur inflexible, pourrait le rendre misérable et susciter la commisération du lecteur.

 

« Mes amis, retenez ceci, il n’y a ni mauvaises herbes ni mauvais hommes. Il n’y a que de mauvais cultivateurs. »

 

Il est donc bien question de misère dans Les Misérables, du fléau qu’elle représente et des ravages qu’elle engendre avec sa complice de sœur nommée ignorance. Et ce sont bien là des thèmes qui concernent notre époque, laquelle connaît toujours misère et ignorance et qui voit bien des larmes versées à cause d’elles; « Tant qu’il y aura sur la terre ignorance et misère, des livres de la nature de celui-ci pourront ne pas être inutiles », rappelait Victor Hugo dans l’exergue de son roman. On se souvient aussi de sa célèbre formule « Ouvrez des écoles, vous fermerez des prisons », elle concentre à elle seule le plaidoyer social des Misérables; Hugo souhaitait la gratuité de l’école, il espérait le progrès social et n’approuvait pas la peine de mort, il croyait en l’élévation des hommes par l’éducation et l’équité. Aussi Les Misérables peuvent-ils nous toucher parce qu’ils ne parlent que de cela, ils sont notre Histoire, ils sont notre souffle et nos aspirations, ils sont citoyens, non seulement français, mais également de l’humanité. Les Misérables rêvent d’une société qui offrirait aux femmes et aux hommes une lumière dans la nuit, et ce, quels que ce soient ces femmes et ces hommes, car le roman place ses personnages dans le creuset de leur époque et espère pour eux une étincelle de progrès; seul le couple Thénardier se dérobera à ce rêve.

 

« L’amour, c’est la salutation des anges aux astres. »

 

Mais si le roman de Hugo a pour thème central la misère, Les Misérables trouvent leur force dans les personnages, souvent des archétypes, presque des allégories; chaque personnage est en effet la figure éclairée ou obscure d’un monde qui cherche son soleil, peut-être son âme. « Ce livre est un drame dont le premier personnage est l’infini. L’homme est le second », écrivait Hugo. Et les personnages sont à ce point essentiels à l’œuvre que quatre des cinq parties du roman sont associées à un nom, Fantine ouvrant le récit, sa fille Cosette lui succédant, suivie de Marius, la partie nommée Jean Valjean étant la dernière partie, à savoir celle d’un homme qui meurt en ayant accompli son œuvre humaine. Seule la quatrième partie n’est pas liée à un prénom, elle s’intitule « L’idylle rue Plumet et l’épopée rue Saint-Denis » afin d’insister sur la composition en miroir chère à l’auteur et sur son désir de lier la petite histoire, l’amour, à la grande Histoire, la révolution.

 

Observons à présent les personnages principaux puisqu’ils font le roman. Jean Valjean est le héros de cette épopée sociale, un héros sans nom, il est ce voleur de pain d’autrefois qui chemine vers la rédemption grâce aux rencontres et aux méandres de la vie; l’évêque de Digne, figure quelque peu divine et paternelle, lui ouvre la voie de la bonté, vertu que Valjean ne cessera de mettre en œuvre au fil des pages, en révélant son passé de forçat afin de délivrer un innocent, en demeurant au chevet de Fantine mourante, en adoptant Cosette, et enfin en sauvant Marius, le jeune homme dont Cosette s'est éprise, de la fureur des barricades. Valjean est bien le héros des Misérables; pourtant il est un condamné rejeté de tous, il n’est qu’un numéro, un fugitif qui doit emprunter des identités jusqu’à être enterré anonymement, car il est seulement cet homme qui vivait pour l’ange terrestre venu un soir illuminer sa vie brisée : 

« Il dort. Quoique le sort fût pour lui bien étrange,

Il vivait. Il mourut quand il n’eut plus son ange;

La chose simplement d’elle-même arriva,

Comme la nuit se fait lorsque le jour s’en va. »

 

À la figure changeante, mais toujours digne de Valjean, répond le visage terrible et immuable de Javert. Comme Valjean, son personnage aurait été inspiré à Hugo par Vidocq, le Vidocq policier assurément, alors que le Vidocq force de la nature, forçat et échappant à son destin s’apparente logiquement à Valjean. Pour Javert, la loi est implacable et la réhabilitation impossible ; aussi, quand Valjean lui laisse la vie sauve le jour de l’insurrection, l’inspecteur ne reconnaît-il plus son système de valeur, il est « déraillé » comme le souligne le roman, et il choisir de mourir.

 

Thénardier n’a rien de la droiture de Javert ou de la grandeur d’âme de Valjean, il incarne le mal bien plus que le malheur; avec sa femme, il se joue de la misère, il en connaît les codes et les détourne à son seul profit. Tortionnaire d’enfants, manipulateur et menaçant, l’assassinat ne lui fait pas peur. Cependant, malgré tous ses forfaits, Thénardier ne meurt pas à la fin du roman, mais devient « négrier » en Amérique, le vice garantissant peut-être la survie de certains hommes bien plus que l’honneur ne l’offre à d’autres hommes; ce serait là un constat cynique, éventuellement réaliste, et je vous laisse le soin de juger. Toutefois, sans entrer dans des comparaisons quelque peu hasardeuses, il est fort à parier que nous connaissons tous des Valjean, des Javert et des Thénardier, car ils personnifient une attitude juste, morale ou malhonnête devant la vie et ses travers.

 

Et nous devons tous également côtoyer des Fantine, de ces êtres perdus dont les rêves deviennent des cauchemars et la rue le seul refuge; la déchéance dans laquelle la jeune femme tombe à cause des préjugés et son amour infini pour Cosette ne peuvent que toucher le lecteur. Fantine, c’est l’incarnation de la misère assassine.

 

Cosette, quant à elle, passe du plus grand dénuement à une vie aisée en étant sauvée par Valjean dans un premier temps, puis en épousant Marius, elle est celle qui échappe à la misère. Elle est surtout la lumière de Fantine, de Valjean et de Marius, elle est le personnage central, et pourtant un peu en creux, qui anime les autres personnages. Marius a un parcours tout aussi chaotique; issu d’une famille royaliste, il devient bonapartiste à la mort de son père, puis il rejoint ses amis étudiants sur les barricades de 1832, bien décidé à y mourir, pensant avoir perdu Cosette aux détours du roman. Mais il en sera autrement puisque Valjean l’éloignera de la barricade vaincue afin qu’il épouse sa fille. Marius est certainement le personnage le plus proche de Victor Hugo, à la fois par son aspect physique et par le revirement politique qui est le sien.

 

Les amis de Marius, les jeunes révolutionnaires du café Musain, ont à leur tête Enjolras, une figure emblématique probablement inspirée par Saint-Just; républicain, il incarne l’insoumission et à ce titre, il meurt sous les balles, l’insurrection de juin 1832 n’ayant pas réussi à renverser le régime qu’elle condamnait, la monarchie de Juillet.

 

Si Thénardier personnifie le mal quels que soient les événements, sa progéniture ne suit pas son mauvais exemple; à la différence d’Émile Zola qui articulera son œuvre autour d’une tare familiale, Hugo libère les enfants de l’atavisme, que ce soit Éponine se sacrifiant pour Marius qu’elle aime sans être aimée en retour, ou bien Gavroche, l’enfant abandonné des Thénardier, mourant pour une cause, la liberté, dont il deviendra l’emblème. Car Gavroche, c’est le gamin parisien devenu l’archétype de Paris, de ses révolutions, de ses rues pavées et de sa liberté souriante, Victor Hugo le décrivant « joyeux parce qu’il (est) libre »; avec lui, Hugo libère également le style et s’éloigne des envolées lyriques, il s’amuse avec l’argot et fait même dire à l’enfant un « kekseksa » aussi inattendu que moderne. C’est ce gamin gouailleur et frondeur, mais ô combien attachant, qui périt sur les barricades, symbole d’une jeunesse toujours debout et un jour assassinée.

 

« Paris montre toujours les dents. Quand il ne gronde pas, il rit. »

 

Est-ce grâce à tous ces personnages que Les Misérables sont passés à la postérité? Est-ce parce qu’ils racontent l’histoire des hommes, leur volonté de survie, leur désir de lumière? Est-ce parce qu’ils parlent de liberté, d’égalité, de fraternité, et ce, au-delà des clivages politiques et des frontières entre les peuples? Probablement. Car Les Misérables appartiennent à l’imaginaire collectif et chacun peut s’approprier un personnage ou une scène; certains préféreront la ferveur du roman, d’autres son élan social, d’autres encore son romantisme. Et ces multiples choix de lecture n’ont pas manqué de fleurir depuis la parution du livre, ne serait-ce qu’au cinéma; dès 1897, les frères Lumière tournaient des saynètes inspirées de l’œuvre, et environ cinquante adaptations les suivront. Quelques films sont considérés comme des classiques, d’autres ont donné lieu à des polémiques; certains apprécient Harry Baur en Valjean, d’autres Jean Gabin, Lino Ventura, Jean-Paul Belmondo, Gérard Depardieu, ou plus récemment Liam Neeson ou Hugh Jackman; Charles Vanel, Bernard Blier ou Michel Bouquet ont façonné Javert comme Bourvil et Jean Carmet ont construit leur Thénardier; mais quelle que soit l’adaptation proposée, elle associe souvent les préoccupations de son époque à celles du XIXe siècle. Tantôt réalistes, tantôt mystiques, Les Misérables se prêtent à bien des interprétations sans qu’aucune ne parvienne à illustrer complètement la complexité de ce roman-monstre ; il en est de même pour les œuvres de Marcel Proust, par ailleurs encore plus difficiles à mettre en scène que le récit cinématographique de Hugo. Car il est délicat de mettre en images la petite musique des mots de Proust et la symphonie tout aussi grandiose qu’intime des Misérables. Cependant, chaque relecture a le mérite d’exister et de donner une couleur aux mots, car elle prolonge le roman et lui offre un nouveau souffle.

 

« N’être pas écouté, ce n’est pas une raison pour se taire. »

 

On connaît l’enthousiasme soulevé sur les scènes internationales par la comédie musicale, adaptée du roman, d’Alain Boublil et Claude-Michel Schönberg; le succès est tel qu’un long-métrage inspiré par ce spectacle est récemment sorti sur les écrans, un film en général assez peu apprécié par la critique française, laquelle s’est probablement montrée quelque peu élitiste au moment de juger du bien-fondé d’une adaptation musicale de « son » roman. Loin de moi l’idée de commenter ici la qualité des chansons, les choix de mise en scène et l’interprétation, je voudrais seulement souligner qu’à la sortie du film, il était touchant de lire sur internet des témoignages émanant du monde entier rappelant le message des MisérablesCe n’est pas tant par patriotisme exacerbé que je trouve cela émouvant, une œuvre appartenant à l’humanité et la reflétant dans sa pluralité, quand bien même cette œuvre aurait des accents français, que par humanisme. En effet, apprendre qu’un texte défendant le droit à l’éducation, à la rédemption et cherchant la lumière née d’un rêve commun parvient encore à toucher les consciences ne saurait qu’émouvoir; et ceci d’autant plus quand on découvre que la chanson de Gavroche accompagne le désir de liberté de femmes et d’hommes brésiliens, égyptiens, chinois et de bien d’autres êtres humains. Les Misérables sont un texte universel au message universel; loin d’être des volumes poussiéreux et éventuellement démodés échoués sur nos étagères, ils ont encore le pouvoir d’éclairer les hommes de notre siècle, ces nouveaux misérables que nous sommes peut-être.

 

C’est pour cela que j’ai choisi de rédiger ce petit vagabondage autour du roman de Victor Hugo; je n’aurai pas la prétention d’avoir analysé Les Misérables en quelques lignes ou de vouloir imposer ma lecture, mais j’espère vous avoir donné le goût de ce texte et vous avoir assuré qu’une œuvre, quelle que soit sa date de parution, avait toujours quelque chose à nous offrir. Laissez-vous peut-être une nouvelle fois surprendre par Hugo et ses Misérables… Sans pour autant déclencher de « tempête(s) sous (vos) crâne(s) », je serais heureuse de connaître les souvenirs que vous avez de ce livre, que ce soit un passage appris à l’école et demeuré cher à votre cœur, ou bien un film qui vous a émus. Qui sont-ils, vos Misérables? Je crois qu’ils sont pour moi une « petite grande âme (venant) de s’envoler ».

12 commentaires
1)
Guillôme
, le 31.07.2013 à 10:09

Du grand Anne avec cette envolée sur Hugo et ses misérables! Merci de nous faire partager ton enthousiasme.

D’ailleurs, la qualité d’écriture de ton humeur m’a fait penser dans un premier temps que c’était Anne Cunéo avant que je réalise que ce n’était pas le cas!

Je me rappelle avoir lu avec plaisir à l’école L’homme qui rit (en deux volumes) alors que mes camarades souffraient à cette tâche!

Est-ce grâce à tous ces personnages que Les Misérables sont passés à la postérité ?

Pour moi, il y a aussi la plume exceptionnelle de cet auteur! Lire du Victor Hugo, c’est tout simplement lire du beau. Du texte et un enchainement de mot ciselés et travaillés comme un orfèvre. Rien que sur la forme, il y a un plaisir de lecture indéniable. Alors quand la forme et le fonds sont de haut niveau, on atteint des sommets de littérature.

Et puis, n’oublions pas Notre-Dame de Paris et le Dernier Jour d’un condamné, ce qui me fait réaliser que je n’ai pas lu Les travailleurs de la mer, Claude Gueux, Han d’Islande et Bug-Jargal! Parmi ces quatre derniers, quel est celui que tu préfères et recommande à lire?

ou bien un film qui vous a émus.

Clairement, j’ai été marqué par la version de 1958

2)
Blues
, le 31.07.2013 à 13:08

Perso je lis beaucoup, mais V. Hugo je n’ai jamais croché. Par contre en film “les Misérables” reste une œuvre que j’ai toujours aimé.

Pour moi c’est celle de 1982 (à ce qu’il parait la plus fidèle) et juste après celle de 58. Pour la version misicale de 2012, j’ai arrêté la projection après 20 mn, je ne dirais pas nul, mais mis en musique c’est pas pour moi… ah oui et encore: mon personnage préféré est Gavroche !

3)
iYannick
, le 31.07.2013 à 13:25

Les Misérables, c’est juste l’œuvre qui m’a donné le goût de la lecture. Et qui a fait de Hugo mon auteur préféré.

J’ai lu les Misérables jeune, vers 12-13 ans et je les ai relu à 20 ans pour comprendre ce que je n’avais pas compris quelques années auparavant.

Quant au film, je ne sais pas trop, il faut dire que je n’aime en général pas aller voir un film dont j’ai lu le livre, de peur d’être déçu. La seule version “cinéma” que j’aie vue est le téléfilm en 4 épisodes en 2000) et j’avais bien aimé, plus la prestation que la fidélité de l’œuvre (John Malkovitch EST Javert).

Par contre la version 2012 j’ai largement évité (même si j’aime beaucoup Hugh Jackman) pour deux raisons : je suis carrément allergique aux comédie musicales et je trouve lorsque les américains reprennent en film un chef-d’œuvre français (film ou livre) ils le bousillent quatre fois sur cinq.

4)
Thierry F
, le 31.07.2013 à 19:58

Les misérables que je viens de lire récemment est un livre exceptionnel. Il annonce le roman naturaliste de Zola et en même temps c’est une formidable plongée dans le passé de la France. Les idées exprimées par Hugo sur l’emploi (la période de Montreuil sur Mer) sur la justice et le rôle de la police contre outil de contrôle social sont, je trouve, bien actuelles.

C’est une bonne idée, ce billet.

5)
TroncheDeSnake
, le 31.07.2013 à 21:34

Merci Anne pour ce billet.

Je n’ai pas lu Victor Hugo et je me sens bien misérable…

Mais te lire m’en a donné envie. Et je pense que si, comme tu le dit, nous avons tous côtoyé des Cosette, Valjean et autre Gavroche, il est peut-être intéressant de percevoir et distinguer en nous-même ces différents types de personnalités, dans des proportions variables selon les temps et les circonstances.

C’est en tout cas dans cette perspective que j’ai envie de m’offrir cette lecture.

Merci encore!

6)
Madame Poppins
, le 01.08.2013 à 01:33

Anne,

J’ai beau me creuser la cervelle, je ne trouve pas le nom Victor Hugo dans mes souvenirs de lecture, ni imposées ni choisies !

Comme TdS, vous m’avez en revanche donné envie de le lire, merci !

7)
Anne L
, le 01.08.2013 à 06:23

Merci à vous pour vos gentilles remarques ! Je profite de ce préambule pour m’excuser de n’avoir pas commenté vos articles depuis deux mois, les méandres de la vie m’ont éloignée de Cuk et j’en suis désolée ; je découvre à présent vos billets et je lis beaucoup de choses très intéressantes, un grand merci !

Guillôme, un très grand merci pour ton enthousiasme et ton commentaire ! Je suis très touchée par tes propos concernant Anne Cunéo, j’apprécie beaucoup les interventions et l’écriture d’Anne ; je lui suis même redevable d’une très paisible promenade londonienne dans Tavistock Square qui restera dans mon cœur.

L’Homme qui rit est un superbe roman, le thème de la misère y est également présent, et comme tu le soulignes, la plume de Hugo y atteint des sommets, effectivement, c’est beau. Notre-Dame de Paris est un livre peut-être plus facile d’accès que Les Misérables ou d’autres œuvres hugoliennes, mais c’est un roman profond, ne serait-ce que par le personnage complexe de Frollo et la présence vivante de la cathédrale.

Le Dernier Jour d’un condamné me fait toujours frissonner, c’est un plaidoyer qui me bouleverse et annonce Claude Gueux dans lequel Hugo reprend les thèmes de la peine de mort et de l’éducation ; les deux œuvres sont belles, j’ai une petite préférence pour Le Dernier Jour parce que l’anonymat du personnage donne au plaidoyer une universalité d’une grande force. Je n’ai lu que des extraits de Han d’Islande, je ne saurais donc en parler longuement ; et je n’ai toujours pas lu Bug-Jargal, par manque de temps et je le regrette, il va me falloir rattraper cela. Les Travailleurs de la mer sont un récit tragique, je trouve que l’homme et la mer y sont magnifiquement liés, Victor Hugo ayant nourri tout au long de sa vie une relation à la fois fusionnelle et violente avec l’océan ; exilé, il était entouré d’eau, aussi a-t-il eu le temps de confronter sa pensée à l’océan, véritable élément romantique, et n’oublions pas que sa fille s’est malheureusement noyée. J’aime aussi beaucoup Quatrevingt-treize, je pense qu’il est très juste de la part de Hugo de traiter de cette année terrible et ô combien fondamentale pour comprendre la France politique depuis plus de deux siècles.

Nous parlons de ses romans, mais que dire des poèmes de Hugo ? La poésie ne devrait pas effrayer les lecteurs, il suffit de prendre un recueil, même très connu, et de le laisser s’offrir à nos yeux et à nos oreilles, car parfois, il est bon de lire un poème à voix haute pour se laisser toucher par sa musicalité. Les Contemplations sont des merveilles ; l’évocation de Léopoldine y est bouleversante, car le style par ailleurs si puissant et riche de Hugo se fait fragile quand il parle de (à) sa fille.

L’adaptation que tu aimes, celle de Jean-Paul Le Chanois, fait la part belle à ses grands acteurs, je me souviens avec émotion de la belle présence de Silvia Monfort, c’est un joli film.

Blues, merci beaucoup pour votre commentaire ! On entretient avec Hugo une relation assez immédiate, soit il nous touche, soit la vibration de ses mots ne convient pas à nos propres vibrations, j’ai souvent remarqué cela avec des collègues ou des étudiants. Et c’est vrai que pour les personnes qui ont du mal avec le style de Hugo, le cinéma est d’une grande utilité parce qu’il met en scène le souffle de l’auteur tout en enlevant quelques digressions lyriques.

La version de Robert Hossein est ma madeleine de Proust (comme Gavroche, je peux l’avouer), je l’ai regardée plusieurs fois la gorge nouée, le début entre Javert et Valjean (Bouquet est magistral et Ventura aussi touchant que minéral) et le final en miroir me bouleversent ; Louis Seigner en évêque de Digne me plaît vraiment beaucoup, quant à Jean Carmet, son Thénardier est terrible. Et que dire de la musique de Michel Magne ?

La version musicale m’a surprise, certains passages sont beaux et j’ai senti un amour sincère de l’œuvre de Hugo et de ses valeurs chez le réalisateur du film et les acteurs ; mais il est vrai que la suite ininterrompue de chansons peut lasser, d’autant plus qu’elles sont relativement inégales.

iYannick, merci beaucoup pour votre témoignage ! C’est vraiment beau que Victor Hugo ait enthousiasmé le jeune lecteur que vous étiez ! Le téléfilm de Josée Dayan est très bien, je l’ai revu récemment ; John Malkovich (qui, pour moi, est un grand Valmont) est bien dans son rôle, c’est très juste de le souligner, Gérard Depardieu est bien également, toutefois, je trouve son Valjean un peu trop proche de son Monte-Cristo, mais c’est un point de vue personnel.

Hugh Jackman dans la version de 2012 m’a étonnée ; à vrai dire, je connaissais peu cet acteur, mais son investissement dans le message du film et son affection pour le texte m’ont touchée. Il compose un Valjean très humain.

Il est vrai que les réalisateurs américains donnent parfois une vision plus héroïque et moins contrastée de la littérature que d’autres cinéastes. Néanmoins, le style enlevé de cette version ne trahit pas à mon sens l’esprit de Hugo ; c’est plus la comédie musicale initiale qui devrait être observée dans ce film, afin d’analyser en quoi elle est fidèle, ou non, aux thèmes de l’œuvre.

Thierry F, merci beaucoup pour votre commentaire qui souligne combien Les Misérables sont difficiles à classer : romantiques, réalistes, épiques, poétiques, et comme vous le dites, également annonciateurs du naturalisme. Et vous avez bien raison de noter que les remarques de Hugo sur l’appareil judiciaire n’ont pas pris une ride ; les pensées de Valjean envers sa condamnation sont d’une force et d’une justesse évidentes.

TroncheDeSnake, un grand merci ! Ne te sens pas misérable de ne pas avoir lu Hugo, ce n’est pas grave ; mais je suis ravie de t’avoir donné envie de le découvrir, c’est un beau cadeau que tu me fais, merci ! Ce que tu dis est fort juste, nous avons tous en nous chaque personnage des Misérables, c’est certain, car nous ne sommes pas tous les jours héroïques comme Valjean. Bonne lecture !

Madame Poppins, un grand merci pour ce gentil petit mot ! Je suis heureuse de vous avoir donné l’envie de lire Hugo, ça me touche beaucoup, merci ! Il est possible de ne pas lire les romans de Hugo en classe, comme vous, ça m’est arrivé ; parfois, les professeurs hésitent à le faire étudier, et pourtant, je sais d’expérience que Victor Hugo plaît beaucoup aux élèves, Notre-Dame de Paris remportant souvent un vif succès, les poésies également. Bonne lecture à vous !

Encore un grand merci à tous !

8)
iYannick
, le 01.08.2013 à 12:43

Pour Gérard Depardieu, acteur français que j’adore, je dois dire que sa prestation dans les Misérables 2000 est assez un générique de ce qu’il fait lorsqu’il est dirigé par Josée Dayan, si elle lui donne des rôles qui lui vont bien, elle n’a pas assez exploité son côté caméléon qui fait qu’il peux tout jouer. À mon sens, le Valjean, le Balzac, le Dantès sont trop proches. Mais cela n’enlève rien à la qualité de sa prestation.

Quant aux réalisateurs américains, je pense qu’ils sont trop manichéens, soit noirs soit blancs, dans les Misérables, les personnages et l’histoire elle-même sont faits de nuances de gris, aucun n’est vraiment tout blanc ou tout noir, (à part Thénardier qui reste une pourriture du début à la fin), même Javert, le flic incorruptible…

Et malheureusement, trop souvent les américains n’arrivent pas à saisir cette complexité et simpifient trop les choses. Dans les réalisateurs contemporains, à part Chrispoher Nolan par exemple, aucun n’arrivent à faire en sorte de briser les extrêmes pour mieux comprendre, voir The Prestige (justement avec Jackman) et Insomnia de Nolan.

9)
Anne L
, le 03.08.2013 à 07:12

Je suis d’accord avec vous, Josée Dayan n’a peut-être pas su ou pu amener Gérard Depardieu vers une interprétation encore plus personnelle de Jean Valjean que celle qu’il donnait déjà, fort bonne au demeurant.

Ce que vous relevez sur le manichéisme est très intéressant, car c’est là un terme fréquemment associé à Victor Hugo, il est le metteur en scène des contrastes ; toutefois, Les Misérables sont fins et subtils, et les personnages ne sont pas d’un bloc, loin de là, comme vous le soulignez.

Il est vrai que l’on pense parfois que les réalisateurs américains simplifient les histoires, et de fait, certains films, la plupart du temps des superproductions, ont une trame assez linéaire. Cependant, un thriller psychologique, une épopée ou un drame ne peuvent pas avoir la même approche scénaristique, une épopée demandant une plus grande caractérisation des personnages (qui sont souvent allégoriques, même s’ils sont fins) et un drame un peu plus de nuances. On ne peut pas par exemple juger du manichéisme de la mise en scène et du scénario de la même façon dans Seven, Willow ou Sur la route de Madison, ou encore dans un film de Coppola, de Scorsese, de Spielberg ou de Tarantino ; je pense que la plupart des films ne sont pas nuancés de la même manière, leur subtilité pouvant se trouver dans le regard du réalisateur, dans son style ou dans le scénario, et à ce titre, Christopher Nolan que vous évoquez propose de bien belles choses, vous avez raison.

Dans le cas des Misérables sortis cette année, la simplification de l’histoire vient de la comédie musicale, car le film la suit à la lettre et n’est pas directement adapté du roman. J’ai lu plusieurs interviews dans lesquelles le réalisateur et les acteurs expliquent qu’ils se sont d’abord enthousiasmés pour le film parce qu’ils connaissaient la comédie musicale, et qu’ensuite, pour être plus fins dans leur travail, ils se sont appuyés sur le roman ; on devine alors que les chansons ont un peu limité leurs mouvements.

Christopher Nolan est un très bon réalisateur et vous me donnez vraiment envie de le connaître davantage, je vous remercie sincèrement pour vos remarques qui m’intéressent grandement.

10)
zit
, le 19.08.2013 à 09:26

Je lis énormément, et il est très rare que je me souvienne de quoi que ce soit une fois le bouquin refermé, parfois, j’ai oublié le titre et le nom de l’auteur dès le lendemain…

Mais pour les Misérables, que j’ai lu au lycée, il y a une trentaine d’années, je me souviens d’une phrase magnifique :

Il ne faut pas que trop de stupeur accueille ce calembour tombé du ciel. Tout ce qui tombe de la sorte n’est pas nécessairement digne d’enthousiasme et de respect. Le calembour est la fiente de l’esprit qui vole. Le lazzi tombe n’importe où ; et l’esprit, après la ponte d’une bêtise, s’enfonce dans l’azur. Une tache blanchâtre qui s’aplatit sur le rocher n’empêche pas le condor de planer.

(bon, je m’en souvenais plus simplement que ça… merci internet)

Facétieux, le père Hugo, puisque :

« Il sortit de la vie / Comme un vieillard en sort. » Attribué à Victor Hugo qui, selon Onésime Reclus, était le premier à rire de cette plaisanterie et ne manquait pas de riposter : « Tout en faisant des vers comme un vieillard en f’rait. » Ce calembour involontaire provient d’un drame d’Adolphe Dumas où l’on trouve ces deux vers qui firent tomber la pièce : « Je sortirai du camp, mais quel que soit mon sort / J’aurai montré, du moins, comme un vieillard en sort. »

http://fr.wikipedia.org/wiki/Récréations_littéraires, où l’on est quand même en droit de se demander jusqu’à quel point le kakemphaton est involontaire…

z (qui a toujours aimé les jeux de mots, je répêêêêêêêêêête : même les jeux de mots laids ;o)

11)
Anne L
, le 19.09.2013 à 01:48

zit, je découvre ce jour votre commentaire et il m’amuse beaucoup, je vous remercie.

Je suis comme vous, je me demande jusqu’à quel point les kakemphatons ne sont pas voulus par leurs auteurs, en particulier celui-ci : « Vous me connaissez mal : la même ardeur me brûle, et le désir s’accroît quand l’effet se recule » ; Corneille était-il à ce point distrait en écrivant ? :-)

12)
pierrot44
, le 07.07.2015 à 19:06

Un tout grand bravo pour l’interprétation de cette oeuvre magistrale de Victor Hugo. Les Misérables: Une époque révolue… Mais qu’avons nous fait de mieux depuis ? Notre planète n’a jamais aussi été maltraitée qu’actuellement. Les guerres avaient une finalité: Il y avait un gagnant et un perdant. Maintenant, un fou peut se faire exploser n’importe où et n’importe quand pour faire un maximum de dégat… Sans avertir, par traîtrise… C’est pire qu’avant… Avec mes meilleures salutations