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Le déterminisme peut-il être hasardeux ?

Aucune superstition ne m'habite. J'ai tenté tout au long de ma vie de me déterminer "objectivement".

N'empêche que ... Je regarde que le déterminisme des événements qui ont conduit ma vie professionnelle dictés de causalité(s ?) récurrentes. 

Bon, pouce, bred and butter. Je ne suis pas non plus philosophe. On est sur Cuk et donc ...Voici l'histoire. 

Premières rencontres.

Automne 1967. J'aborde la seconde année de médecine. Étudiant, mon temps est partagé entre les matinées à l'hôpital (dans le sud de Paris) et les cours ou TD à la Fac (au quartier latin).
Au cours des stages matinaux, je rencontre un chef de clinique, Jean-François, très sympathique, qui prend énormément de temps à expliquer encore et encore.
À la fac, débutent les TD de physiologie. Il se trouve que Jean-François est chargé aussi de ces TD là.
Quelle physiologie ? La physiologie rénale, mais pas seulement. Sans vouloir ici reproduire ces données, disons que la compréhension de ces mécanismes passe par l'intégration d'un élément à la base de toute vie: la constance du milieu intérieur  décrite par Claude Bernard 
Et là, je tombe de mon siège. Un monde s'ouvre, je perçois une avancée passionnante dans le savoir d'une force que, sur l'instant, je ne sais qualifier, mais qui me dévaste littéralement: j'entre dans la compréhension universelle de la vie. 

Jean-François est un pédagogue exceptionnel, mettant incessamment en relief les relations entre les concepts. On aborde ces mécanismes d'une finesse invraisemblable que sont les phénomènes physiologiques du rein.
En quelques TD de 3 h, je lévite ...mentalement... et totalement. Aucun autre système physiologique, tout aussi objectivement intéressant, ne me passionnera autant.

Second événement:

Fin de seconde année ... je quitte cette fac parisienne pour des raisons familiales et intègre la 3 ème année à Nancy. Les cours de physiopathologie commencent. Le premier: la physiopathologie ... rénale !! Second signe du destin ? Peut-être ... mais ....

Troisième temps et pas le moindre.

L'instabilité familiale fait que je retourne à mon ancienne fac parisienne pour intégrer la 4 ème année. De ce fait ... le choix des services pour l'externat se fait en fonction de l'examen classant de fin de 3 ème année. Venant d'une "fac étrangère", je ne figure pas au classement. Je choisis en dernier. Que reste-t-il ? 3 ou 4 propositions peu alléchantes et un nouveau service qui vient d'ouvrir au sein du CHU, dont personne ne sait rien: il n'est donc pas choisi. Il s'agit d'un service de néphrologie !!! Jamais deux sans trois, dit-on.

À l'automne 1969, je rencontre celui qui devient mon maître: Le Professeur Daniel Fries.

Il faut se remettre dans le contexte de l'époque. La néphrologie, littéralement "inventée" par le Pr Jean Hamburger et son équipe à Necker, balbutie.
Hamburger invente aussi la réanimation et met au point les premières techniques contribuant à la transplantation rénale (et donc d'organes !!). Trois disciplines qui ont présidé à la construction de la médecine moderne.

La discipline est très jeune, trop jeune. Les manques sont criants: matériels, structurels, personnels.
En dehors des maladies rénales n'induisant pas (pas encore) d'insuffisance rénale, l'essentiel de notre temps est dévolu à celle ci.

Nous sommes très souvent en échec: les patients meurent faute de prise en charge appropriée parce que nous ne savons pas. Quelle que soit la pratique, nous balbutions, commettons nombre d'erreurs.

Je perçois inconsciemment, que nous sommes entrain de vivre une période d'explorations et de découvertes qui seront fondatrices. La néphrologie colle au plus près de sa propre physiologie: c'est exaltant.

Quatrième temps du déterminisme.

Jean Louis, que j'ai rencontré au cours des gardes à l'hôpital, me contacte et me propose de venir le seconder: il ouvre un service d'hémodialyse en banlieue Ouest de Paris et il dirige aussi l'unité de traitement de l'insuffisance rénale d'un hôpital public proche.
Je suis inscrit en spécialité de néphrologie; 2 années passent. J'alterne l'hôpital et la clinique.
Un an d'interruption pour bêtises militaires.
En Mai 75, Jean Louis me téléphone et me fait le cadeau d'une carrière: un service d'hémodialyse va s'ouvrir en banlieue Ouest de Paris. Quand je reprends enfin "la vraie vie", l'unité d'hémodialyse de l'hôpital que nous surveillions est devenue une service de néphrologie et à la clinique, je prends la tête de l'unité que j'ai dirigée 38 ans, tout en continuant à suivre les cours et rencontres formatrices dans le temple: Necker. J'y cotoie et rencontre, de près tout le gratin de la discipline de cette période.

Cinquièmement.

Mai 1976: dans quelques jours, je dois passer l'examen terminal du cursus qui me donnera le titre de néphrologue: examen, redoutable et redouté - très peu sont reçus après 2 épreuves écrites de 4 heures chacune très difficile, et un oral avec 3 patrons.

La veille, je tombe sur une publication qui fait état d'une compréhension totalement revue du métabolisme du sodium par le rein. Je la lis avec attention.

Le sujet de physiologie de l'examen est: métabolisme rénal du sodium et ses conséquences.
Quant à la question de pathologie ... c'est ma thèse !!
Quelques semaines après, l'oral. Un des 3 patrons du jury est ... mon patron !!

Je vous ai rapporté ce qu'est aujourd'hui la prise en charge de l'insuffisance rénale 
Les éléments d'approche de la transplantation ont été abordés ici

J'ai maintenant quitté ce monde qui m'a envoûté; j'ai vu l'ascension pas après pas de cette discipline balbutiante. Chaque pas était une conquête: des signes positifs, voire de reconnaissance.

Né, il y a 45 ans le traitement de l'insuffisance rénale reste la seule discipline, à ce jour, à pouvoir maintenir durablement en vie ceux qui étaient condamnés en raison de la défaillance d'un organe majeur, et ça, j'en suis fier et fier d'y avoir participé. 

Au vu de ce que je viens de rapporter, pouvait-il en être autrement ?

 

P.S. Il y a quelques jours, j'ai assisté au collège de France au colloque dédié à Claude Bernard. J'ai en particuier, suivi avec émotion l'intervention de Pierre Corvol sans qui la compréhension universelle de l'hypertension artérielle aurait été brouillée. Quel bonheur d'avoir pu bavarder avec lui après si longtemps... et d'avoir été son étudiant passionné.

17 commentaires
1)
ToTheEnd
, le 31.05.2013 à 01:22

Je vais me faire huer mais comme les commentaires sont calmes car il fait gris et que c’est par conséquent la crise, j’aimerais proposer un lien que j’ai envoyé à tous les médecins que j’ai croisé ces derniers mois.

Malgré un début super chiant, Brian Goldman a donné un témoignage poignant sur son métier et en particulier, les erreurs de diagnostique gravent qui peuvent amener des médecins à commettre l’irréparable. Bref, je recommande la vision/écoute de cette petite affaire:

Doctors make mistakes… can we talk about that?

2)
dpesch
, le 31.05.2013 à 01:23

Cher Ysengrain,

Ce que je vais écrire est très banal, mais quelle vie magnifique tu as eue. Y a-t-il une discipline plus gratifiante que la médecine ? Quel bonheur d’avoir passé son existence à sauver celle des autres et à chercher tous les moyens pour y arriver. Tu dis que ce monde t’as envoûté, comme je le comprends.

Je te prie de croire en toute mon admiration pour cet extraordinaire destin qui a été le tien.

Et merci, 1000 fois merci à toi et à tous tes collègues qui ont œuvré et vont œuvrer pour continuer le combat de la médecine moderne.

3)
ysengrain
, le 31.05.2013 à 09:57

@TTE: tu mets la barre très haut. Argumenter les orateurs de TED …. bon courage. Tout ce qui y est publié est de contenu ébouriffant de qualité et de très très haut niveau.

Oui, nous nous trompons, oui je me suis trompé, oui j’ai commis des erreurs, parfois irréparables. Quelle activité humaine n’en est pas pourvue ? Le problème de l’exercice médical réside dans la prise en charge de la vie humaine.

J’ai toujours tenté, de ne pas prendre de décisions lourdes sans demander avis de mon entourage: j’ai mis en oeuvre tous les moyens disponibles etr raisonnables. Quelques fois, ça n’a pas été suffisant … pour une auto absolution en cas d’échec.

Quel bonheur d’avoir passé son existence à sauver celle des autres

Oui, ma vie professionnelle a été superbe dans la satisfaction apportée. Mais je n’ai pas été dans la position de dévouement. J’ai perçu une profonde satisfaction à mettre au service des soins apportées le savoir de l’association – compréhension physio-ptahologique/ outils à ma disposition. Le savoir et la compréhension ont tellement progressé (en particulier grâce à des gens de la trempe de Pierre Corvol que je cite en fin de billet) que les techniques ont été à la fois améliorées et adaptées. J’ai tenté de rester puissant médicalement parlant, tout en sachant qu’en matière médicale, on n’a jamais le pouvoir.

4)
guru
, le 31.05.2013 à 11:22

Quel plaisir d’avoir le sentiment d’avoir participé activement à la marche en avant d’un progrès. Tu es en période de nostalgie… Je connais ça aussi. “Ma” télévision tourne sans moi, “mon” cinéma aussi, l’Ecole ou j’ai travaillé pendant 41 ans évolue et je n’y participe plus…

Heureusement, il y a Mme Guru et les voyages, les enfants, les petits enfants, la photo. Bref la roue tourne et il reste la satisfaction d’avoir posé une des pierres de l’édifice…

Longue deuxième vie à toi, ami!

5)
ysengrain
, le 31.05.2013 à 12:36

Tu es en période de nostalgie…

et ben non !! Je regarde derrière moi, heureux du déroulement (même si …), heureux d’avoir laissé un service digne de ce nom, heureux d’avoir pu contribuer. Le seul regret … ne plus fréquenter les membres superbes de cette équipe magnifique. Ma famille, quoi !

6)
Migui
, le 31.05.2013 à 12:57

Un médecin fidèle au serment d’Hippocrate prêté à l’issue de son parcours scolaire. Bravo!

@TTE Je ne vais certainement pas te huer. Gentiment essayer de te faire comprendre la réalité. Ysengrain est (ou fut) dans la médecine, moi, c’est dans le médicament.

Fondamentalement, on soulage ou on guérit des millions de patients tous les ans. Mais notre science n’est pas une science exacte et tout le monde peut faire des erreurs, même les médecins (et même moi, qui ne suis pas médecin!). Un médicament qui guérit 999.999 patients peut occasionner une crise cardiaque inopinée chez le millionième. Faut-il pour autant jeter le bébé avec l’eau du bain? Non.

7)
Madame Poppins
, le 31.05.2013 à 13:07

J’aime toujours lire des tranches de vie, surtout quand elles ont pour origine un coup de foudre, une passion ! Merci d’avoir ouvert ton album de souvenirs et partagé un bout de ton parcours avec nous !

8)
Guillôme
, le 31.05.2013 à 14:17

Merci pour cette humeur.

Le savoir et la compréhension ont tellement progressé que les techniques ont été à la fois améliorées et adaptées.

Désolé ysengrain de dériver du sujet avec mon commentaire et n’y voit aucune critique à ton encontre, au contraire, je profite du fait que tu sois de la partie pour avoir ton avis.

Mais l’humain dans tout ça? N’y-a-t-il pas inconsciemment une hiérarchie en faveur de la guérison, de la technologie employée ou du succès médical versus le bien être du patient?

A titre anecdotique, je me rappelle il y a 25 ans des dentistes qui traitaient caries et autres soins beaucoup plus douloureux sans anesthésiant. Cela faisait un mal de chien et on était une chochotte si l’on se plaignait. En parler, alors que c’était du bon sens de ne pas vouloir avoir mal, c’était se faire rabrouer comme un mal propre contre celui qui sait, qui soigne et où un peu de douleur est un prix bien moindre à payer, hors de question que le patient remette en question cette décision du corps médical de faire souffrir.

Aujourd’hui, le confort du patient, le traitement de la douleur sont beaucoup plus pris en considération par le corps médical (pas assez mais ça progresse) à tel point que les dentistes anesthésie quasiment pour tout et n’importe quoi ^^

Néanmoins, sur un sujet beaucoup plus grave et tabou, la fin de vie, on a systématiquement un acharnement thérapeutique où la personne est réduite à souffrir, si ce n’est pas physiquement (merci la morphine) au moins psychologiquement. Et si le patient est un légume, c’est limite si le docteur ne s’en réjouit pas (plus de souffrance ni physique ni psychologique). Aux lecteurs, allez visiter une maison de retraite médicalisée (ou lieu de fin de vie) et vous comprendrez…

Bref, ysengrain, pourquoi tant d’aveuglement du corps médical sur le bon sens commun qui est de lutter contre la douleur?

Pourquoi tant de dizaines d’années avant qu’enfin la gestion de la douleur soit prise en compte dans le traitement du patient?

Pourquoi tant de mépris de la profession vis à vis de ses patients si jamais ils osent exprimer leur façon de voir leur maladie, le traitement à y apporter ou la méthode qu’il préfèrerait qu’on leur applique même si cela est moins “efficace” ou “performant” que la méthode que veut employer le médecin?

Merci d’avance ysengrain si tu as des réflexions à apporter sur ce sujet :)

9)
Philob
, le 31.05.2013 à 16:20

C’est chouette que tu nous fasses partager ces moments importants de ta vie. Je suis touché par cette confiance ou/et cette proximité.

C’est exactement ce que j’aime sur Cuk, c’est un lieu de partage, un lieu d’humanité, un lieu où aucun sujet n’est tabou et où tout le monde respecte l’autre (j’ai enlevé les 2 % qui n’entrent pas dans cette définition, comme dans chaque statistique).

J’aime venir flâner ici, car, souvent, on fait de Belles rencontres.

Merci

10)
ToTheEnd
, le 31.05.2013 à 16:23

@TTE: tu mets la barre très haut. Argumenter les orateurs de TED …. bon courage. Tout ce qui y est publié est de contenu ébouriffant de qualité et de très très haut niveau.

N’exagérons rien… il y a des trucs excellents, passionnants et extraordinaires mais c’est comme tout, on ne peut pas proposer 100% de bonnes choses.

@TTE Je ne vais certainement pas te huer. Gentiment essayer de te faire comprendre la réalité. Ysengrain est (ou fut) dans la médecine, moi, c’est dans le médicament.

Ayant aussi bossé dans la pharma, y a rien à me faire comprendre et je partage ton avis… mais vu que les médias n’arrivent pas à vivre avec 0.01% d’erreur, beaucoup de labos refusent de prendre des risques et par conséquent, certains médicaments sont stoppés dans leur développement prometteurs. La conséquence directe de ce revirement c’est que certains labos ont sciemment décider de développer des produits 100% pour des pathologies spécifiques alors que ça pourrait aussi fonctionner pour d’autres pathologies “voisines”…

11)
Madame Poppins
, le 31.05.2013 à 17:22

Guillôme, justement, les EMS, j’y suis, peut-être pas toutes les semaines mais une semaine sur deux et je t’assure, ce n’est pas l’acharnement qui prévaut.

D’ailleurs, pour qui a un avis clair sur la question, il est possible, en droit suisse, de rédiger des directives anticipées (art. 360ss CC), qui indiquent (et s’imposent) au corps médical quels traitements on accepte, lesquels on refuse en cas d’incapacité de discernement; par ce biais-là, on peut notamment prendre des décisions anticipées en matière de réanimation, d’intubation, d’alimentation artificielle etc…

En outre, quand je vois le temps consacré aux soins palliatifs, dans de nombreux établissements, où la gestion de la douleur est une question centrale, y compris en pédiatre, je me dis que bien du chemin a été fait depuis l’époque où on considérait le nouveau-né comme un tube digestif, incapable de ressentir quoi que ce soit et parfois “opéré” sans la moindre anesthésie !

Mais bien entendu, je ne suis pas une spécialiste de ces questions, je ne peux que faire part de ce que j’observe dans le cadre de mon activité professionnelle.

12)
Anne Cuneo
, le 31.05.2013 à 18:09

Néanmoins, sur un sujet beaucoup plus grave et tabou, la fin de vie, on a systématiquement un acharnement thérapeutique où la personne est réduite à souffrir, si ce n’est pas physiquement (merci la morphine) au moins psychologiquement. Et si le patient est un légume, c’est limite si le docteur ne s’en réjouit pas (plus de souffrance ni physique ni psychologique). Aux lecteurs, allez visiter une maison de retraite médicalisée (ou lieu de fin de vie) et vous comprendrez…

D’une part, j’abonde dans le sens de Mme Poppins, et d’autre part, je voudrais te conseiller la lecture du dernier Monde diplomatique (sorti hier) dont une bonne partie est consacrée à la vie après 60 ans, il contredit mieux que je ne le ferais certaines de tes assertions un peu à l’emporte-pièce (pardon de le dire ainsi).

13)
Anne Cuneo
, le 31.05.2013 à 18:13

Ceci dit, en parlant de la fin de vie, on dévie du sujet, qui est le déterminisme initial.

A ce propos, je pourrais dresser une liste (dans un autre domaine, bien sûr) tout aussi frappante, le surréalisme appelle cela «les hasards objectifs». Je crois que nous voyons, que nous suivons, que nous profitons parce que nous étions prédisposés, cela semble tomber du ciel, en quelque sorte, mais en fait nous avons profité de ces déterminismes parce que nous portions en nous la graine, et qu’un coup d’arrosoir suffisait.

14)
ysengrain
, le 31.05.2013 à 18:58

J’avais commencé à rédiger une réponse à Guillôme et puis une urgence…

Guillome, un type d’attitude quel qu’il soit, quel que soit le domaine, ne peut pas résumer l’exercice d’une profession. Il y a chez les médecins des cons à l’image d’autres professions. Que certains se conduisent de manière insupportable est éminemment regrettable pour ne pas dire plus: J’ai le souvenir d’un patron de chirurgie, immonde, disant à une femme de ménage d’usine de charcuterie ayant des difficultés à se mouvoir: “Madame, quand vous prenez l’avion pour aller aux Baléares, marchez dans l’avion, Madame, marchez dans l’avion”. Nous étions en 1970, elle était femme de ménage

– La douleur et sans oublier son corollaire, la souffrance. Au fur et à mesure que la connaissance progressait, j’ai essayé de privilégier d’aller au devant de la souffrance. J’étais un des plus gros prescripteurs d’antalgiques et ça m’a été “reproché”, mais j’ai tenu bon.

J’ai aussi toujours tenté en parlant avec les patients de “déminer”. On ne cotoie pas quelqu’un 3 fois par semaine pendant des années sans tisser un lien plus ou moins fort.

La technique est un moyen d’aide au même titre qu’un rateau dans un jardin … Encore une fois, il ne faut pas perdre de vue l’objet principal de l’activité: le patient. La technique, n’est qu’un jouet.

– la fin de vie Encore une fois, un ou des exemples négatifs ne sont pas le reflet d’une attitude générale. En France, la loi autorise l’abstention thérapeutique raisonnable s’il n’y a plus rien à faire. Mais, il faut adapter la loi aux circonstances. L’attitude ne peut être univoque: il est évident que la bagarre sera plus ample si le patient a 20 ans que sil en a 90.

Pourquoi tant de mépris de la profession vis à vis de ses patients si jamais ils osent exprimer leur façon de voir leur maladie, le traitement à y apporter ou la méthode qu’il préfèrerait qu’on leur applique même si cela est moins “efficace” ou “performant” que la méthode que veut employer le médecin?

Je te laisse ton mépris qui est ta façon de voir ce sujet. Déjà que quand on est médecin ou membre d’une équipe médicale, il est difficile d’avoir une vision claire de l’ensemble de la situation quand bien même on “possède” le savoir et les techniques qui vont avec, mais si je suis malade , il ne viendra pas à l’idée de discuter les propositions (car nous ne sommes que des faiseurs de propositions raisonnables) médicales. La décision médicale est, autant que faire se peut, prise en dehors de toute subjectivité. Je ne crois pas que le patient ou sa famille puissent en dire autant.

Je crois que Madame Poppins t’a assez bien répondu.

J’aime toujours lire des tranches de vie, surtout quand elles ont pour origine un coup de foudre, une passion !

Pas tout à fait. Dans la passion , il y a une notion de déraison. En aucune circonstance, mon …. “adhésion” (?) à la néphrologie a été déraisonnable. Elle a été fondée sur des acquis médico-scientifiques, dont les chefs de files (Hamburger et son équipe, mon patron) étaient des êtres remarquables, non seulement d’immenses médecins, mais aussi des êtres humains considérables. je ne crois pas avoir penché affectivement vees la néphrologie autrement que par la satisfaction de l’acquisition du savoir.

Anne, merci de tes mots, j’aurais aimé pouvoir le dire de cette manière.

Enfin, je souhaite terminer cette réponse en indiquant qu’en aucune manière j’ai voulu raconter ma vie. A l’heure où inévitablement, je regarde un peu derrière moi et que l’heure du bilan s’approche, j’ai été assez étonné de constater la survenue peu hasardeuse des événements qui ont fait que j’embrasse cette spécialité.

Merci de vos réactions à tous.

15)
Madame Poppins
, le 31.05.2013 à 19:46

ysengrain,

Je pense qu’il en va à l’égard des médecins comme des avocats : les gens voudraient, parce qu’ils sont les témoins ou les acteurs d’un événement très important (une opération, une fin de vie ou un procès pénal lourd de conséquences) qu’ils soient “parfaits”, meilleurs mais oui, il y a des cons parmi les médecins comme il y a des cons parmi les avocats, les fleuristes, les opticiens, les menuisiers… sauf que lorsque la coiffeuse est une conne, ça prête souvent moins à conséquence qu’un prof qui est un âne, voire pire.

Finalement, tu as raison, le terme “passion” n’était pas adéquat : un intérêt profond, une conviction auraient été plus corrects, désolée !

16)
ThierryS
, le 31.05.2013 à 20:30

Bonsoir

En général, je n’aime pas intervenir dans ce type de discussion car elles sont souvent exacerbées par des expériences personnelles qui sont généralement douloureuses et biaisent le dialogue

Néanmoins, je ne peux pas manquer de réponse à Guillome car je pense qu’il y a la une méconnaissance du sujet et comme nous sommes sur cuk, je sais que le dialogue est courtois.

Travaillant dans un centre anti cancéreux, la mort est donc un rendez vous quotidien pour mon équipe. Sans vouloir rentrer dans les détails, n’importe quel médecin te dira qu’il peux faire face (ou qu’il a fait face) à des cas clinques totalement identiques dans l’état actuel de nos connaissance et que la mise en route d’une thérapie identique sera un succès dans un cas et un échec dans l’autre. La science médicale, n’est en aucun cas et ceci dans tous les domaines une science exacte et je suis certains que Ysengrain sera d’accord avec moi Dans cet exemple, que faire?, mettre nos deux cas dans un service palliatif afin de finir dans les meilleurs conditions possibles ? Est ce vraiment la vocation de la médecine de ne pas tout tenter ? En ce qui me concerne, l’acharnement thérapeutique n’est qu’une notion qui est perçue à l’extérieur du milieu médicale et qui n’a aucune valeur dans celui-ci. D’autre part, il ne faut pas oublier que l’équipe médicale, prend généralement en compte le choix du patient et je peux te dire qu’un grand nombre d’entre eux sont des battants jusqu’au boutiste prêts à essayer tout ce qui pourrait améliorer leur état. Quand ma plus proche collaboratrice à développé un cancer du sein invasif à 40 ans et s’est retrouvé de l’autre coté du bureau, elle ne s’est posé la question de savoir si un traitement de choc devait lui être administré.

A Ysengrain

En aucun cas, je ne croit au determinisme. Je pense que consciemment ou inconsciemment, nous créons autour de nous un environnement, situationnel qui contient un grand nombre d’opportunité qui en fonction des choix de nous ferons vont contribuer à notre évolution. Si je regarde derrière moi, je vois comme une toile d’araignée composé de multiple connections créer par l’ensemble de mes décisions. Ce qui me marque ce sont ce que j’appel les point de non retour, ces croisements ou un choix apparemment insignifiant conduit à une irréversible cascade d’évènements ayant une profonde conséquence

Consciemment ou inconsciemment, nous avons quand même une influence sur notre destin, en tout cas, je veux continuer à y croire.

Bonne fin de soirée

17)
ysengrain
, le 31.05.2013 à 20:38

@ ThierryS nous sommes tout à fait d’accord.. Je suis plus hésitant quant au déterminisme ( et pas convaincu non plus d’ailleurs)