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Petit traité de vé­lo­so­phie, par Di­dier Tron­chet

 

Je de­vais au­jour­d'hui mettre en ligne une nou­velle mise à jour de l'In­tro­duc­tion à LaTeX sous Mac OS X, ini­tia­le­ment concoc­tée par Fa­bien Conus en 2004 et une pre­mière fois ac­tua­li­sée par moi-même en 2009. Seule­ment voilà, j'ai ap­pris la se­maine der­nière que Mac­TeX, la dis­tri­bu­tion LaTeX la plus uti­li­sée sur Mac, al­lait sor­tir une nou­velle mou­ture in­ces­sam­ment, ce qui va en­traî­ner des mo­di­fi­ca­tions sup­plé­men­taires. Alors j'ai dé­cidé d'at­tendre la sor­tie de cette ver­sion. Entre-temps, j'au­rai fait l'up­grade de mon sys­tème vers Lion (hé oui, je suis tou­jours sur Snow Leo­pard), et Moun­tain Lion sera sorti…

Donc, je change de sujet. Et puisque c'est dans l'air du temps (cf. l'ar­ticle de Fa­bien — tou­jours lui ! — la se­maine der­nière), je vais abor­der à nou­veau un autre de mes thèmes fa­vo­ris : le vélo !

Et plus pré­ci­sé­ment pour vous pré­sen­ter un petit bijou sur le sujet, écrit par Di­dier Tron­chet en 2000 : « Petit traité de vé­lo­so­phie — Le monde vu de ma selle », aux édi­tions Plon, col­lec­tion La Grande Ourse.

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Un mot sur l'au­teur : Di­dier Tron­chet, de son vrai nom Di­dier Vas­seur, né en 58, ori­gi­naire d'Ar­tois et ré­si­dant à Paris (du moins au mo­ment de la pa­ru­tion du livre), a bien des cordes à son arc mais est sur­tout connu comme des­si­na­teur et/ou scé­na­riste de BD, entre autres les sé­ries « Ray­mond Cal­buth », « Jean-Claude Ter­gal » et « Vio­line ». Et c'est aussi un fervent de la pe­tite reine, au sujet de la­quelle il a pu­blié une chro­nique dans Li­bé­ra­tion pen­dant toute une pé­riode. Ce sont ces chro­niques qui ont donné lieu au livre en ques­tion !

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J'ai donc acheté ce livre à sa sor­tie et suis tombé im­mé­dia­te­ment sous le charme, y trou­vant une concep­tion du deux-roues sans mo­teur proche de la mienne, sans être exac­te­ment la même tou­te­fois. Tron­chet y ex­prime, sans plan di­rec­teur par­ti­cu­lier, ce qu'il ap­pelle sa « vé­lo­so­phie », sa phi­lo­so­phie du vélo, es­sen­tiel­le­ment le vélo ur­bain. C'est éga­le­ment un plai­doyer pour la prise du pou­voir du vélo sur les villes et l'évic­tion des voi­tures de celles-ci au­tant que pos­sible. Mais c'est aussi un re­cueil de pen­sées et d'anec­dotes, sou­vent crous­tillantes et sa­vou­reuses. Ci-des­sous quelques ex­traits épars pour vous mettre l'eau à la bouche :

En voi­ture, tout le monde sait quelle est la place du mort. Mais qui pour­rait dire quelle est la place du vi­vant ?

(…)

En voi­ture, quand j'oc­cupe le siège du conduc­teur (eh oui, j'ai mon per­mis !), je réa­lise à quel point je peux me lais­ser en­fer­mer dans des cris­pa­tions ir­ra­tion­nelles, des conflits lar­vés avec la femme qui oc­cupe le siège du pas­sa­ger. (…)
Alors que, pé­da­lant aux côtés de la même femme, la cer­ti­tude me vient, lu­mi­neuse : je l'aime !

(…)

Au­cune pe­tite peine ne ré­siste à un bon coup de pé­dale. Tris­tesse, coup de blues… En­four­chons le vélo. De toute ur­gence. Et dès les pre­miers tours de pé­da­lier, cette im­pres­sion, phy­sique, qu'un voile se dé­chire.

(…)

Ju­chons-nous main­te­nant sur la selle de vélo, pour la même tra­ver­sée de Paris. C'est un autre film. Outre la taille de l'écran (qui n'a plus de bords !), la qua­lité de la copie (celle de l'auto a par­fois le flou de la buée), le long mé­trage a tout à coup un tempo bien à lui. Le mon­tage est plus fluide, en même temps suf­fi­sam­ment el­lip­tique pour pré­ser­ver le mys­tère. Le tra­vel­ling sur deux-roues nous offre une image fu­gi­tive mais pas vo­la­tile, sug­ges­tive sans être ap­puyée. Quelque part entre le clip épi­lep­tique au­to­mo­bile et le plan-sé­quence pé­père, un poil so­po­ri­fique, du pié­ton.

Tron­chet a son opi­nion bien à lui sur cer­tains types de bi­cy­clettes :

Et le vélo d'ap­par­te­ment ? Peut-on en at­tendre les mêmes ef­fets bé­né­fiques ? Le vélo d'ap­par­te­ment est aussi ex­ci­tant qu'un che­val mort, les quatre pattes cou­pées. Si cette car­casse de bi­cy­clette fer­rée au sol avait des yeux, ce se­rait ceux d'un aigle dé­plumé dans un zoo de pro­vince. Pra­ti­quer le vélo d'ap­par­te­ment, c'est faire du surf dans un ja­cuzzi.

(…)

Que pen­ser du VTT ? J'avoue mon em­bar­ras. In­dis­cu­ta­ble­ment, c'est un vé­hi­cule classé dans la ca­té­go­rie « bi­cy­clette ». Il n'em­pêche, quand j'en vois un, avec son de­sign tape-à-l'œil et ses gros pneus agres­sifs, je ne peux pas m'em­pê­cher de pen­ser qu'un vélo a dû cou­cher avec une mo­by­lette. Même s'il tient plus de son père.

Tiens, je me de­mande ce que Tron­chet pense du vélo élec­trique. Ça me pa­raît à moi jus­te­ment le croi­se­ment ac­com­pli du vélo et de la mo­by­lette… :-b

Par ailleurs, Tron­chet n'a pas que des ex­pé­riences po­si­tives sur le vélo à ra­con­ter, no­tam­ment quand il s'agit d'une ex­pé­di­tion cy­cliste (avec re­morque !) avec un ami vers la Nor­man­die à par­tir du Pas-de-Ca­lais. Au mo­ment d'ar­ri­ver en Nor­man­die, les com­pères dé­cident d'uti­li­ser à la place de l'iti­né­raire prévu un iti­né­raire bis sym­bo­lisé en jaune et vert sur la carte Mi­che­lin, signe de haut in­té­rêt tou­ris­tique :

Ce fut un enfer. Chaque por­tion de route co­lo­rée de jaune-vert était en fait une as­cen­sion dan­tesque vers de hauts pla­teaux an­dins, que nous gra­vis­sions de­bout un pied sur une pé­dale en es­pé­rant qu'elle veuille en­core re­des­cendre, puis sur l'autre avec le même sou­hait, pas tou­jours exaucé. (…)
Pro­gres­si­ve­ment nous sen­tions, à la dé­cli­vité nais­sante du sol, que l'iti­né­raire al­lait re­prendre un coup de jaune-vert, mais dans l'autre sens. En mau­dis­sant M. Mi­che­lin et ses hé­ri­tiers, nous nous en­gouf­frions, ou plus exac­te­ment nous étions hap­pés par des gouffres tout juste bi­tu­mi­nés, les pha­langes blan­chies par la cris­pa­tion sur les mains, avec cette crainte, tou­jours jus­ti­fiée, qu'à cette des­cente suc­cé­de­rait une mon­tée du même pour­cen­tage.

Enfin, vous l'avez com­pris, un régal de lec­ture, à dé­gus­ter sans mo­dé­ra­tion !

10 com­men­taires
1)
Fran­çois Cuneo
, le 26.06.2012 à 08:10

Très jo­lies ci­ta­tions en effet!

Merci.

Cela dit, pas sûr que lorsque je pé­dale (enfin, j’ima­gine la chose hein, c’est pas en vrai, moi qui étais cy­cliste à l’ar­mée, je dé­teste le vélo), j’aie des élans amou­reux vers la femme qui est avec moi. Je souffre tel­le­ment en mon­tée que je hais tout le monde sur le coup.

2)
Lé­ma­nic
, le 26.06.2012 à 09:10

Merci pour ces ci­ta­tions, je vais aller tan­ner mon li­braire pour trou­ver ce joli bou­quin.

@ Fran­çois en plus du mac, de la po­li­tique lo­cale, cy­cliste à l’ar­mée, nous avons donc pas mal de points com­muns… Quelle com­pa­gnie, quels cours ? On va de­voir se croi­ser un de ces jours…

3)
zit
, le 26.06.2012 à 10:20

Ah, bin je re­com­mande aussi la lec­ture de ce ma­gni­fique ou­vrage qui avait été conseillé en com­men­taire d’un non moins ma­gni­fique ar­ticle :

Ar­ticle: Chouette, il pleut!

Au sujet du vélo sous la pluie, un ex­trait du “petit traité de vé­lo­so­phie”, par Di­dier Tron­chet, éd. Plon, col­lec­tion La Grande Ourse :“Consi­dé­rons la pluie. Un fond cultu­rel com­mun nous l’a fait en­vi­sa­ger comme une ca­la­mité (n’est-ce pas une des sept plaies d’Egypte ?). Contre cette nui­sance, l’in­dus­trie au­to­mo­bile a per­fec­tionné tout un ar­se­nal, de l’es­suie-glace à trois vi­tesses au pneu ra­dial. L’in­dus­trie cy­cliste, elle, en est en­core au bon vieux garde-boue (qui ne garde pas de la boue) et à l’im­per­méable (pas tou­jours). On ne lutte pas à armes égales.”“Mais jus­te­ment, le cy­cliste ne lutte pas tout court. Qui n’a ja­mais ex­pé­ri­menté ce mo­ment de bas­cu­le­ment où, tout re­cro­que­villé sur son gui­don, fouetté par les trombes d’eau, on lâche tout à coup l’idée que la pluie est notre en­ne­mie, on s’ouvre à elle, on ac­cepte son ruis­sel­le­ment sur le vi­sage comme un ca­deau du ciel, et l’on se met à rou­ler dans les flaques en riant, ache­vant de dé­trem­per le reste de sous-vê­te­ments secs, mais heu­reux tout sou­dain de faire corps avec la tour­mente, d’en être, et donc de ne plus en souf­frir, parce que dans l’ac­cep­ta­tion de son uni­vers li­quide, mé­lange de ciel et de terre, on y a dé­cou­vert une ma­nière in­édite d’évo­luer, telle une si­rène à l’en­vers ?”“Et puis n’ou­blions pas le plai­sir im­mé­mo­rial du cho­co­lat chaud en ren­trant, et des chaus­settes qui fument sur le dos­sier de la chaise, tan­dis que la pluie conti­nue de co­gner au car­reau, comme une amie qui s’éloigne.”

Je l’avais illico com­mandé et dé­voré, bien du plai­sir en pers­pec­tive, et oui, chers uti­li­sa­teurs de vé­hi­cules à trac­tion mé­ca­nique, le vélo, ça rend heu­reux !

z (le seul vrai grave pro­blème, à bi­cy­clette, c’est l’im­pos­si­bi­lité de lire en rou­lant, je ré­pêêêêêêêêêêêête : mais vive le vélo quand même !)

PS : pour ma part, ce que je dé­teste, c’est des­cendre (à cause des éven­tuels autres vé­hi­cules ve­nant dans l’autre sens), alors que grim­per, même si j’en chie, j’adore ça !

4)
In­connu
, le 26.06.2012 à 10:48

Fran­çois : un cy­cliste alarmé en vaut deux.

5)
Franck Pas­tor
, le 26.06.2012 à 10:58

Merci pour les ré­ac­tions ! :-)

S : pour ma part, ce que je dé­teste, c’est des­cendre (à cause des éven­tuels autres vé­hi­cules ve­nant dans l’autre sens), alors que grim­per, même si j’en chie, j’adore ça !

Moi j’aime les deux ! En mon­tée j’es­saie d’en ch.. le moins pos­sible avec ma po­li­tique des bra­quets in­fi­ni­té­si­maux, et en des­cente j’aime bien faire de la vi­tesse (pas trop et seule­ment quand c’est pos­sible !) et à en­tendre les roues sif­fler sur la route.

À vrai dire mon en­nemi cy­cliste in­time c’est le vent, ce monstre sour­nois et in­vi­sible at­ta­ché à la perte des ga­ba­rits fi­li­formes comme le mien. Et en Bel­gique il est par­tout, que ce soit dans les Pol­ders de la côte ou dans les Ar­dennes !

6)
Sa­luki
, le 26.06.2012 à 11:33

mon en­nemi cy­cliste in­time c’est le vent, ce monstre sour­nois et in­vi­sible

Oui, mais pour Georges Bras­sens et quelques autres, il peut bien faire les choses ;°))

7)
jrd
, le 26.06.2012 à 16:32

J’ai quelques di­zaines de mil­liers de km sous mes boyaux et pneus, mais je ne connais­sait pas : je vais pas­ser com­mande. Pour d’autres deux roues (oh hor­reur à mo­teur …) je re­com­mande le “traité de zen et de l’en­tre­tien des mo­to­cy­clettes” de Pir­sig qui existe en tra­duc­tion fran­çaise en “poche”

8)
zit
, le 26.06.2012 à 16:47

J’avoue qu’une des­cente bien large et pas trop raide, sans risque de se prendre un 38 tonnes en pleine face dans un vi­rage, j’adore, mais du 12 % et plus, bien étroite, en épingles à che­veux, avec gra­vier et chaus­sée hu­mide, après quelques ki­lo­mètres de­bout sur les freins, rien que d’y pen­ser, j’ai le dos en com­pote.

Pour ce qui est du vent, tant qu’il n’est pas en ra­fales vio­lentes de tra­vers, je me suis fait une rai­son, en fait, dans le dos, c’est quand même assez fa­bu­leux, on se sent un sur­homme ;o), et de face, s’il est ré­gu­lier, bin c’est comme une côte à plat, on change de bra­quet et ça roule.

J’avoue que j’ado­re­rais es­sayer tes micro–dé­ve­lop­pe­ments de folie sur un bon mur, ça doit être ri­golo !

z (qui ai­me­rais aussi de plus en plus es­sayer le vélo cou­ché, je ré­pêêêêêêêêêêêête : en plus y z’ont sou­vent des bra­quets à la Pas­tor)

9)
Jean Claude
, le 27.06.2012 à 14:11

En com­plé­ment sur le vélo, Julos Beau­carne :

Le vélo vo­lant

En par­ti­cu­lier deux titres : Vélo vo­lant et “La ré­vo­lu­tion pas­sera par le vélo”

10)
mff
, le 27.06.2012 à 22:35

Zit: le vélo, ça rend heu­reux !

Oui le vélo, ça rend heu­reux !

Amis­tad de . . . .

Oh oh je vais aller cher­cher le livre, Merci :)