Vous avez pu lire sur ce site plusieurs articles signés Roger Cuneo.
C'est mon père.
Lorsqu'il a écrit son premier roman, aux éditions Favre, début 2009, je n'ai pas pu en parler moi-même, et j'ai demandé à Mme Poppins d'écrire une humeur dont elle a le secret sur ce livre intitulé: "Maman, je t'attendais". Il me semblait qu'elle avait le recul nécessaire pour pouvoir le faire, et je n'ai pas été déçu, comme je pouvais m'y attendre.
Ce livre racontait comment ma grand-mère avait abandonné ses enfants à Lausanne (Roger et Anne, ma tante, qui écrit sur Cuk.ch régulièrement), après la Deuxième Guerre mondiale, pour assouvir sa maladie du jeu. Une grand-mère que j'ai connue, appréciée, mais que sa maladie, même si mon papa ne l'acceptera jamais, avait quelque part transformée en monstre d'égoïsme.
Ce livre a rencontré un succès certain en Suisse romande, et il s'arrêtait au moment où Roger, 16 ans, sortait d'un pensionnat (comme disait ma grand-mère, en fait il s'agissait d'un orphelinat catholique, tenu par des soeurs la plupart du temps en dessous de tout avec les enfants dont elles avaient la charge), et était lâché dans la nature.
Beaucoup de lecteurs lui ont demandé ce qu'était devenu cet adolescent, comment il allait s'en sortir.
Le Bal de la Vie est sorti cette semaine, pour leur répondre.
J'ai un peu hésité avant de prendre la parole moi-même ici pour parler de ce livre, ce d'autant plus qu'il me concerne un tout petit peu, puisqu'il se termine sur mon arrivée dans ce monde.
Je n'aime pas trop parler de choses qui me sont chères et intimes, j'avais peur aussi que vous pensiez que j'allais faire de l'auto-promotion pour quelqu'un de ma famille.
Et puis j'ai lu ce livre.
En deux nuits.
Bien évidemment, il parle de choses qui m'intéressent, puisqu'on y voit grandir celui qui allait devenir mon papa, après qu'il a rencontré ma maman.
Mais bien au-delà de ça, il me semble que ce livre devrait être lu aux adolescents dans les écoles, adolescents que je côtoie quotidiennement, souvent tellement désabusés parce qu'ils ne trouvent pas encore de raison d'exister vraiment, parce qu'ils se cherchent, parce qu'ils sont mal dans leur peau.
Voir Roger évoluer, à 16 ans, au départ sans que personne ne s'occupe de lui, laissé seul dans la rue, sans rien avoir à manger, pourrait tourner rapidement au larmoyant, ou rappeler des histoires à la Dickens.
Alors oui, la vie entre 16 et 20 ans de mon père a été difficile, il le dit d'ailleurs, mais tout au long de ce livre, nous sommes en face d'une volonté de s'en sortir, d'un positivisme absolument remarquable.
Tout au long de ces années, Roger a rencontré des êtres exceptionnels à Lausanne.
Une soeur supérieure, qui peut-être sauve toutes les autres, un marchand de souliers, un libraire, un professeur de gymnastique, un vendeur de brocante qui se mute en professeur de guitare, un vrai ami, celui qui allait devenir mon parrain, une deuxième famille d'une générosité folle, ma maman et mes grands-parents, et une soeur de sang celle-là que Roger découvre peu à peu.
Il nous raconte également comment à cet âge, un adolescent est sur le fil du rasoir. Il aurait fallu tellement peu pour que mon père tombe dans la délinquance…
Il y a plein de passages touchants dans ce "Bal de la Vie".
Il y en a que j'aimerais que Roger vienne lire à mes élèves de 14-15 ans, en classe, qui parfois n'en ont strictement rien à faire de l'école…
En voici un par exemple, conversation entre Maurice, son seul ami alors, et Roger, à propos de l'école, justement…
Je tire ce passage du manuscrit que j'ai reçu il y a quelques mois. Peut-être que certains détails ont changé, peu importe…
J’avais un rapport privilégié avec Maurice, nous allions tous les samedis soir ensemble au cinéma. Après le film, en d’interminables discussions autour des livres qu’il m’avait prêtés ou des films vus ensemble, je l’accompagnais d’abord chez lui ; arrivé devant sa porte sans être parvenu à bout de nos arguments, il décidait de me ramener à son tour jusqu’aux pieds de chez moi et nous faisions ainsi plusieurs fois de suite le trajet aller-retour entre nos logements.
Par nos discussions, je m’apercevais de l’énormité de mes lacunes. Je ne possédais pas les clés de lecture dont disposait mon ami. Je m’attachais à la seule histoire, sans discerner dans le texte les enjeux philosophiques, politiques, sociaux, culturels, économiques.
Avant de me quitter, Maurice passait souvent chez lui pour reprendre un livre dont on avait parlé et il me conseillait de le relire au vu des arguments développés en chemin. Je m’y attelais avec intérêt et application.
Je mesurais le chemin qu’il me restait à parcourir sur la voie de la connaissance. Sans me décourager, je me mettais à l’ouvrage, utilisant souvent mon nouveau Larousse, instrument précieux grâce auquel je parvenais à rattacher des faits à leur époque, à les replacer dans leur contexte, à reconnaître les grands personnages de l’Histoire et les courants intellectuels.
J’ai ainsi découvert la signification du mot capitalisme, socialisme, libéralisme, radicalisme, fascisme et autres doctrines en « isme », dont j’ignorais jusque-là l’existence.
J’ai appris la signification de l’égalité, de la liberté, de la justice, de la fraternité, toutes notions nécessitant le combat des hommes, parfois au prix de leur vie.
J’intégrais ces éléments sans posséder le fond des connaissances me permettant de les assimiler et je retenais mal les leçons de mes apprentissages. Dès lors, je devais retourner plusieurs fois aux sources du dictionnaire pour éclaircir et intégrer des notions encore confuses dans mon esprit. Parfois je me décourageais et l’envie me prenait de tout balancer, de reprendre ma vieille réplique : « je n’en ai rien à foutre ». Maurice veillait au grain.
- Tu n’en as rien à foutre d’ignorer d’où tu viens ? Il nous suffirait de courir sur un terrain de foot pour donner un sens à notre vie ? Oui, ça demande un effort de saisir le monde, en tous les cas davantage que de savoir manier un ballon.
Dans ses leçons, il s’adressait à moi, mais il parlait tout autant pour lui-même.
- Moi je pense que moins on connaît de choses, moins on a d’envie d’en connaître d’autres et, a contrario, plus on en sait, davantage on a envie d’apprendre.
On dit qu’on ne prête qu’aux riches, mais si on n’en a rien à foutre de connaître le pourquoi et le comment de nos comportements alors on reste ignorant toute sa vie. La richesse du savoir tu peux l’obtenir, mais il faut faire l’effort de la cueillir.
Je tentais de répliquer.
- Tout ce temps que tu prends pour étudier, tu ne le passes pas à vivre.
- Tu t’entraînes bien des heures par semaine pour parvenir à manier un ballon à ta guise, pourquoi tu ne passerais pas du temps pour comprendre ta vie, celle des hommes, leur passé, leur présent, leur devenir.
- Tu aimes l’école, toi ?
- Non, je ne peux pas dire que j’aime l’école, mais je sais qu’elle est nécessaire, ne serait-ce que pour obtenir les bases du vivre ensemble. Nos arrières-grands-pères sont descendus dans la rue, se sont battus, parfois au prix de leur vie, pour permettre à leurs enfants d’y avoir droit à et à peine quelques générations plus tard il faut lutter contre les enfants pour qu’ils s’y rendent.
Ce n’était pas la première fois que Maurice me tenait des raisonnements péremptoires, mais je l’avais rarement entendu s’exprimer avec autant de fougue. J’ai répliqué.
- Et bien, moi je trouve que pour deux ou trois trucs intéressants que nous apporte l’école, on y perd beaucoup de temps pour peu de choses.
- Tu sors d’où, tu cherches quoi, tu réfléchis ? Pas loin d’ici, dans d’autres pays, la question ne se pose pas, on exploite les enfants, on les met au travail, on les utilise et pour mieux y parvenir on les enferme dans l’ignorance. Ils voudraient bien aller à l’école, apprendre, savoir lire et écrire et sortir de l’esclavage dans lequel on les maintient, mais ils n’ont pas le choix ; tu ne crois pas qu’ils préféreraient aller à l’école? Alors, arrête avec tes « je n’en ai rien à foutre », ça me fait gerber.
Je me remettais avec assiduité à mes lectures, reprenant d’abord fréquemment mon dictionnaire, puis de moins en moins souvent, tant les données utiles se mettaient en place dans mon esprit.
J’ai fait état un jour à Maurice d’une découverte.
- J’ai l’impression de trouver dans le dictionnaire les éléments recherchés comme autant de pièces d’un puzzle. Plus on les utilise, plus il devient évident de les mettre au bon endroit et plus facilement l’ensemble du dessin prend forme.
Il a ri et m’a donné une grande claque dans le dos.
- Toi, cette semaine tu as fait un grand pas dans le bon sens.
Avant ces échanges avec mon ami, pour moi il y avait des bons et des méchants, le juste et le faux, le bien et le mal, Dieu et Diable. Par mes lectures répétées et à travers les analyses de Maurice, je décelais la complexité des comportements des hommes, de leurs motivations.
Grâce à mon ami, j’ai appris à lire entre les lignes, à être critique dans mes acquisitions ; j’ai aimé lire un livre non seulement pour son contenu, mais aussi pour son écriture.
J’ai accédé sous sa conduite aussi bien aux grands romans de la littérature dite sérieuse, qu’à Tintin, Prévert, Vian, la poésie. Et, avant tout, j’ai découvert l’amitié…
Maurice a joué pour moi le rôle d’un grand frère, du confident, du protecteur, du guide, du mentor. C’est mon plus grand ami d’adolescence et il l’est resté dans l’âge adulte. Je l’intéressais probablement par mon désir d’apprendre, par mon opiniâtreté dans une discussion, par mon engagement sur un terrain de foot, mais aussi par ma naïveté, ma méconnaissance des règles du savoir-vivre. Avec à peine un an de plus que moi, il a remplacé mon père. J’avais une entière confiance en lui, en ses jugements, ses affirmations, ses directives, il avait sur moi une énorme emprise.
Je garde encore de cette époque le souvenir des nombreuses fois où nous étions ensemble tordus de rire, à l’école, chez lui ou dans la rue, pour un bon mot, une plaisanterie. Par lui j’ai récupéré le sens de l’humour égaré dans une enfance difficile, un bien précieux dont je lui rends hommage.
Mes péripéties footballistiques l’intéressaient moyennement, mais il venait parfois me voir jouer. Il se moquait gentiment de moi.
- Ne mets pas toute ton énergie à taper un ballon, tu vaux mieux que ça.
Mais il ajoutait encore.
- Remarque, j’aimerais savoir jouer comme toi.
Il comprenait que le football était un moyen de prendre confiance en moi.
Maurice représentait à mes yeux la réussite. Il était l’image à laquelle je voulais ressembler. Il m’a permis de comprendre que vivre valait mieux que prier, végéter ou croupir dans sa bêtise. Il m’a ouvert à la curiosité, à la connaissance, à l’effort intellectuel, à l’humour, à la vie, à l’amitié.
Aujourd’hui encore, je lui suis reconnaissant de son précieux apport dans ces moments délicats et décisifs de mon adolescence et je mesure combien il m’a aidé à rattraper le temps perdu dans mes années d’enfance.
Il est mort, il y a peu.
- Salut à toi et merci, l’ami.
Voilà…
Les coordonnées de ce livre:
Le bal de la vie
Éditions Favre
Pour nos amis français, ce livre peut être commandé directement aux éditions Favre.
, le 22.10.2010 à 07:34
C’est quoi, “l’auto-promotion” ? Ce que tu fais, c’est juste écrire à une personne, une seule, pour lui dire que tu l’aimes et qu’elle t’a impressionnée par son parcours : on dit rarement à son père qu’on l’aime et c’est dommage… au moins, toi, tu l’écris.
Donc, arrête de penser que les lecteurs pourraient penser que tu penses qu’ils croient et que tu devrais……
Cela ne doit pas être évident d’être l’un des personnages d’un livre mais, si comme tu le dis, le bouquin se termine par ta naissance, je me demande comment Anne vit ces pages….
Roger, je me réjouis beaucoup de lire “la suite” même si j’appréhende un peu : ce que tu as vécu et relaté dans la première partie m’avait beaucoup touchée. Je t’embrasse,
, le 22.10.2010 à 08:47
je partage votre souhait M. Cuneo. Ayant 10 ans d’expériences avec les ados de 10 à 18 ans (hors école), je suis également persuadé de la pertinence d’une intervention de ce type.
Ce passage m’a également ému, tant par le chemin parcouru vis-à-vis de la connaissance, de la soif d’apprendre, mais également de l’amitié, simple, sincère, honnête.
En lisant les humeurs de Cuk, j’ai plus souvent éclaté de rire qu’en sanglots, mais là, j’avoue que j’en ai les larmes aux yeux…
Merci
, le 22.10.2010 à 08:49
Je ne sais pas si tu te demandes ce que pense la soeur de l’auteur, ou sa fille, nous nous appelons Anne toutes les deux. Tu penses à sa fille, j’imagine.
Mais je vais tout de même dire que je suis impressionnée par le courage qu’a eu Roger d’écrire à la première personne. Pour ma part lorsque je me suis attaquée au problème d’être la fille d’une malade du jeu, il a fallu que j’écrive un roman (Station Victoria), où certes le rapport entre fille et mère est basé sur la réalité, mais le masque de la fiction a tout de même été nécessaire.
Dans tous les textes autobiographiques que j’avais écrits auparavant, je n’avais jamais osé affronter le problème.
Je pense avec François que c’est une lecture salutaire pour les adolescents. Mais peut-être les deux livres seraient une lecture utile pour comprendre ce que signifie pour l’entourage que la maladie du jeu. Ce n’est au fond pas très différent des drogues dures.
, le 22.10.2010 à 09:29
Tiens, maladie? monstre d’égoïsme? A une chose près je suis en train de vivre pareil, avec le même ressenti!
Ce livre me parle, merci pour l’article!
, le 22.10.2010 à 09:47
C’est la saga de toute une famille qui, par le biais de ce site, vit un peu virtuellement avec nous tous. Une famille dont on ne devinait pas les vicissitudes que la dépendance au jeu allait créer. Vicissitudes inhérentes à bien d’ascendances et qui, en fin de compte, en fait la richesse. J’adore cette merveilleuse sincérité, cette simplicité de bon alois, grâce auxquelles nous entrons discrètement dans l’intimité de toute une dynastie. Par avance excusez-moi si ce dernier vocable à quelques couleurs hollywoodiennes, je manque ici de vocabulaire pour vous exprimer toute ma sympathie. Ce site, où l’éclectisme nous fait passer de l’ordinateur à la philosophie par de multiples étapes, n’est d’autre que le fruit de l’inventivité active de toute une famille. Merci à tous.
, le 22.10.2010 à 09:51
Concernant la maladie du jeu et les casinos en suisse, quelle est et quelle était la réglementation en Suisse?
En France, actuellement, c’est très réglementé avec protection des comportements addictifs et possibilité d’interdiction de jeu des personnes par inscription volontaire ou non sur des listes noires. Est-ce le cas en Suisse?
Désolé de dévier un peu du sujet (mais n’ayant pas lu les livres…)
, le 22.10.2010 à 10:41
Le billet m’a donné envie de commander le livre.
A noter qu’il y a une erreur sur le lien des éditions Favre, mais on retrouve facilement la bonne page.
, le 22.10.2010 à 10:53
Pas un seul banquier, pas un seul gestionnaire de fortune ! Et pourtant, nous sommes en Suisse. Est-ce bien raisonnable ?
Plus sérieusement, j’aime beaucoup la découverte des livres et de la culture avec l’aide de Maurice. Lorsque Maurice déclare : « _Toi, cette semaine tu as fait un grand pas dans le bon sens_ », cela rejoint la définition qu’en donnait Édouard Herriot : « _La culture, c’est ce qui reste quand on a tout oublié_ ». Bref, la culture, c’est lorsqu’on est capable d’utiliser de manière personnelle ce qu’on a appris, ce qui la différencie profondément de la simple érudition, qui tourne facilement à la cuistrerie.
C’est bien d’avoir un papa comme ça…
, le 22.10.2010 à 10:57
Tiens, ça ne veut pas italiquer, ni à la main, ni en automatique. Les dieux de l’informatique sont à nouveau contre moi !
, le 22.10.2010 à 11:29
Tres emouvant… Merci Francois et Roger pour ce poignant temoignage. Il me rappelle les discussions d’avec mon pere. Merci, Arnaud
, le 22.10.2010 à 13:20
Je ne peux pas te répondre sur les réglémentations. Mais je peux te dire une chose: lorsqu’un accro des jeux de hasard veut jouer, il trouve toujours… Je ne vais pas détailler comment notre mère s’est arrangée pour continuer à jouer alors qu’elle était bannie de tous les casinos autour de Lausanne (les casinos français sont à quelques jets de pierre). Mais je peux t’assurer qu’elle a trouvé moyen, et que si elle n’est pas morte devant une table de jeu, c’est un pur hasard. 48 heures avant de mourir (à 82 ans) elle jouait encore…
, le 22.10.2010 à 15:09
Monsieur Cuneo est devenu ce qu’il est, par la résilience, chère à Cyrulnik, et la mère supérieure a été un «tuteur de résilience»
Simplement indispensable. Pas un jour de ma vie ne passe sans que je dise à mon père que je l’aime. Il est pourtant mort depuis 26 ans.
J’ai la conviction intimement profonde qu’un des grands problèmes de notre «civilisation» réside dans la non-expression institutionnalisée des sentiments. On m’objectera que dans les relations usuelles, des actes expriment implicitement l’amour. Peut-être, mais c’est tellement mieux en le disant.
Au fait, Papa, je t’aime !!
, le 22.10.2010 à 16:19
…
Ouaouw…
, le 22.10.2010 à 17:39
Je suis parti ce matin à 7 heures de chez moi et j’ai joué trois fois le spectacle Prévert pour les élèves de Genève âgés de 8 à 12 ans. Comme à l’habitude j’ai ressenti une immense joie et une grande émotion à voir ce visages d’enfants rêver avec moi autour des poèmes. Ie me place à leur même niveau, je les mets en demi-rond autour de moi à tout au plus un mètre pour les premiers et je ne prends q’un maximum de 50 élèves à la fois, si bien que leur proximité me permet de suivre le ressenti de leurs émotions sur leur visage, dans leurs yeux, sur leurs lèvres. Je ressorts de ces journées fatigué physiquement, mais moralement au mieux de ma forme. À chaque fois, à voir comme il peuvent “boire” à la poésie, j’ai l’impression d’être utile, fontaine de rêves, et ça me fait un plaisir extrême.
Je vous dis ça, un peu comme-ça, comme pour m’excuser de n’avoir pas pu prendre le clavier pour participer aux réactions quant à l’humeur de François concernant mon dernier livre. Tout d’abord je l’aurais tout de suite remercié d’en parler et, pour répondre à quelques remarques des commentaires, pour lui dire que je n’ai non seulement jamais douté de son amour, mais que je l’ai toujours ressenti comme “naturel”, parce que simple au quotidien, malgré les aléas de la vie qui nous ont parfois séparés physiquement, jamais dans la certitude d’un amour partagé.
Pour parler du livre, je l’ai écrit tout d’abord pour répondre aux sollicitations de bons nombre de lecteurs qui se sentaient frustrés du premier qui se terminait à l’âge de mes 16 ans, à la sortie de mon orphelinat. J’ai pris la plume et… miracle petit à petit c’est pour moi qu’elle glissait sur la page. Les souvenirs remontaient de loin (à plus de cinquante ans), mais ils étaient présents en moi et bien vivants. C’est vrai que chacun de nous a une vie qui passe par les hauts et les bas, que parfois étant au bas on oublie de remonter et on sombre dans le “néant” : délinquance, drogue, désespoir, ou pire encore. Moi, dans ce livre, je n’ai pas voulu être un exemple, je raconte simplement, mais ça peut devenir exemplaire, que quand on est au plus bas il faut savoir regarder, écouter; il y a toujours une main secourable, une voix extérieure ou intérieure qui vous appelle à reprendre courage. Mon livre raconte combien pour moi ces regards, ces voix ont été essentiels, mais je crois, et ça je le dis à la relecture de mon texte, parce que ce n’était pas un but que je m’étais assigné quand je me suis mis au récit, que cette voix, ce regard, sont à la portée de nous tous, vous et moi et qu’il suffit de les voir, les entendre. Ma chance a été tout simplement de savoir voir ces proches prêts à m’aider et d’avoir accepté leur aide, non pas comme une charité, mais comme une échange.
Si je pouvais dire quelque chose à des adolescents c’est que la chance ne vient pas de l’extérieur, elle est potentiellement en nous tous, pour autant qu’on vive les oreilles et les yeux ouverts : la vie ne demande qu’à nous sourire, mais il faut encore savoir la regarder .
, le 22.10.2010 à 17:42
En réalité, non, je pensais à toi : un livre se termine par la naissance de François mais toi, tu es “en plein dedans”….
Quoi qu’il en soit, je suis très sensible à ta démarche de conjuguer fiction et réalité, c’est cette alchimie, je crois, qui donne autant de profondeur à tes personnages, qui sont toujours, je trouve, incroyablement attachants.
Bonne soirée à toutes et tous,
, le 23.10.2010 à 08:20
Je ne lis jamais autre chose que des romans, des nouvelles ou du théâtre, des « récits imaginaires » quoi, mais là, je crois que je vais faire une exception.
Rien que l’extrait et le commentaire de Roger me paraissent sonner tellement juste.
z (j’ai un papa très joueur… je répêêêêêêêêêête : mais je l’aime beaucoup aussi ;o)
, le 23.10.2010 à 09:08
J’aimerai commencer par lire le premier ouvrage, mais je ne l’ai pas trouver dans ma librairie, ni sur internet. François pourrais-tu me le prêter si tu l’as à la maison? ;-)
, le 23.10.2010 à 15:28
Bien sûr!