D’Or et d’ou­blis, cha­pitre 6

 

 

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Cha­pitre pré­cé­dent: Les cha­pitres pré­cé­dents d’un roman po­li­cier sont trop dif­fi­ciles à ré­su­mer. Nous y ren­voyons le lec­teur: le feuille­ton pa­raît le di­manche et peut être consulté en ligne.

 

 

 

VI

Lorsque je re­pense aux évé­ne­ments de cet au­tomne-là, j’ai l’im­pres­sion que les choses se sont suc­cédé à un rythme sou­tenu. Mais en consul­tant mes notes pour écrire ce rap­port, je constate que ma mé­moire me joue des tours. Entre le dé­part des Blu­men­stein et l’évé­ne­ment sui­vant il s’est passé près d’un mois.

 

Non que je n’aie rien fait. Entre l’Étude et mon agence, je tra­vaillais lit­té­ra­le­ment jour et nuit.

Entre autres choses, j’ai pré­paré une de­mande of­fi­cielle au nom de l’Étude: Maître Tis­sot vou­lait voir le compte ou­vert par son père à la dé­funte Banque de Cré­dit, ab­sor­bée de­puis par une plus grande banque. La po­li­tique of­fi­cielle des banques étant qu’elles n’ont plus d’ar­chives, ce genre de de­mande a peu de chances d’abou­tir. Maître Tis­sot le sa­vait, mais il te­nait à ce qu’on fasse tout de même la ten­ta­tive.

Ses rap­ports avec moi étaient dis­tants. De toute évi­dence, il ne sa­vait pas com­ment me re­par­ler de la vi­site à son père. Je n’ai pas in­sisté, je com­pre­nais son em­bar­ras.

Il n’avait pas du tout fait le lien entre le vieil Al­bert et la mort de Ber­trand Per­rier. J’ai com­pris pour­quoi le jour où Fran­çoise May m’a ap­pris entre deux portes, au ha­sard d’un ba­var­dage, que si Per­rier avait été en­gagé, c’était jus­te­ment parce qu’il avait ren­con­tré Al­bert Tis­sot au club de vol à voile, qu’il lui avait dit être à la re­cherche d’un poste de sta­giaire; le père Tis­sot – qui le voyait de­puis des an­nées au club – l’avait re­com­mandé à son fils. Pour Jean-Ber­nard Tis­sot, le rap­port s’ar­rê­tait là. Son père s’était trouvé au club le jour de l’ac­ci­dent? Si par ha­sard il l’avait ap­pris, il n’avait trouvé là rien d’ex­cep­tion­nel: le club, c’était le dada de Papa.

Cesco a fini par per­cer le se­cret du disque dur de Per­rier, mais j’ai été déçue du ré­sul­tat. Au­cune ré­vé­la­tion. Il y avait bien une liste d’ar­chives, mais tout ce qu’elle m’a ap­pris c’est que cela com­men­çait en 1934 (une boîte), qu’en 1935 il y avait trois boîtes, en 1936 trois éga­le­ment, puis que cela aug­men­tait plus ou moins vite, jus­qu’en 1959 (neuf boîtes).

En re­pen­sant à cette pé­riode, je constate que je de­vais être épui­sée par les voyages, par le double tra­vail (aucun de mes clients lau­san­nois ne s’est aperçu que je pas­sais trois jours et demi par se­maine à Ge­nève). J’au­rais dû son­ger plus tôt à des vé­ri­fi­ca­tions aux­quelles j’ai pro­cédé plus tard, et qui font gé­né­ra­le­ment par­tie de ma rou­tine. Mais Léon n’était pas là, j’at­ten­dais les ré­sul­tats dé­fi­ni­tifs de l’ex­per­tise de la lettre – bref j’avais mille rai­sons ap­pa­rentes de lais­ser cou­rir.

Je n’ai ce­pen­dant pas tort de pen­ser que les biens dis­pa­rus des Juifs et leurs comptes va­cants rem­plis­saient ma vie. Pra­ti­que­ment pas un jour ne se pas­sait sans qu’il en soit ques­tion. Les avis étaient par­ta­gés sur la ques­tion, et les dis­cus­sions d’au­tant plus vives.

Pour les uns, les banques s’étaient contre­dites, avaient été contre­dites par des faits, des do­cu­ments, des té­moi­gnages, elles re­fu­saient d’ad­mettre leurs res­pon­sa­bi­li­tés, se ca­chaient der­rière le tra­vail des com­mis­sions d’his­to­riens qui se plon­geaient dans les ar­chives. Pour les autres, tout ça ve­nait du manque de sé­rieux, de l’ar­ro­gance des Amé­ri­cains. C’était une conspi­ra­tion pour dé­truire les banques suisses au pro­fit des éta­blis­se­ments ban­caires amé­ri­cains.

Des films do­cu­men­taires, des livres venus des ho­ri­zons les plus di­vers dé­mon­traient pièces à l’ap­pui que les banques suisses avaient abrité – et pas tou­jours rendu – «l’ar­gent du crime» (Tom Bower), qu’elles avaient été «les ban­quiers d’Hit­ler» (Adam LeBor). Et puis il y avait le rap­port Ei­zens­tat (du nom du sous-se­cré­taire au com­merce des États-Unis qui en avait as­sumé la res­pon­sa­bi­lité), éta­bli par une com­mis­sion d’his­to­riens char­gée par le gou­ver­ne­ment amé­ri­cain de faire toute la lu­mière. Et en Suisse même his­to­riens, so­cio­logues, par­laient du «Bon­heur d’être Suisse sous Hit­ler» (Jean-Bap­tiste Mau­roux), de «La Suisse, l’or et les morts» (Jean Zie­gler), et ainsi de suite.

Les au­teurs suisses étaient ba­layés d’un re­vers de la main: des gens en quête de pu­bli­cité. Les do­cu­men­taires suisses ont été dé­cré­tés uni­la­té­raux. Les films et livres étran­gers ont été taxés de dif­fa­ma­toires et igno­rés par­tout où cela était pos­sible.

Quant au rap­port Ei­zens­tat, le chef d’une ca­la­mi­teuse «Task Force» hel­vé­tique cen­sée ri­po­li­ner «notre» bonne ré­pu­ta­tion s’était per­mis de dire, har­di­ment: «Le rap­port … [dit Ei­zens­tat] ne pro­cède pas tou­jours à la cri­tique des sources qu’on est en droit d’at­tendre. En effet, il ne suf­fit pas de ré­su­mer les do­cu­ments et d’en in­di­quer les ré­fé­rences. Au moins pour cer­taines ques­tions contro­ver­sées ou dé­li­cates, il faut les confron­ter à d’autres do­cu­ments et les ac­com­pa­gner d’un com­men­taire». Soyez plus sé­rieux, Mes­sieurs! Nous les Suisses on va vous ap­prendre com­ment on tra­vaille.

On était dans un dia­logue (as­sour­dis­sant) de sourds.

«Ba­layez donc de­vant votre porte, qu’avez-vous fait, vous autres, pen­dant la guerre?» vo­ci­fé­raient les Suisses.

«Ce que nous pour­rions avoir fait ne change rien à ce que vous avez fait, vous les Suisses», ré­pon­dait-on de­puis l’Amé­rique, la Suède, l’Es­pagne ou le Por­tu­gal.

Et on re­par­tait comme en qua­rante, si j’ose dire.

Le soir, après avoir fait mon tra­vail d’agent d’af­faires, je des­cen­dais sou­vent à l’étage en des­sous, dans le bu­reau de Rico.

C’est lui qui me te­nait au cou­rant, qui me don­nait des do­cu­ments à lire. Il avait fait l’ob­jet de pres­sions de Berne (il n’avait pas voulu spé­ci­fier da­van­tage) à cause d’un ar­ticle qu’il avait écrit à pro­pos du jour­nal bâ­lois «Die Na­tion», qui pen­dant la guerre avait – déjà – dé­noncé la com­pro­mis­sion trop grande avec Hit­ler. Le ré­dac­teur en chef, Peter Sur­ava, avait payé son franc-par­ler d’une car­rière bri­sée. Dès 1945, il avait fait l’ob­jet d’une vé­ri­table per­sé­cu­tion de la part du Conseil fé­dé­ral de l’époque. Il avait conti­nué à écrire jus­qu’à la fin de sa vie, mais pas des livres po­li­tiques, et sous un nom d’em­prunt. Cela ne fai­sait que quatre ou cinq ans qu’il avait pu­blié ses Mé­moires sous son vrai nom.

«Si ça conti­nue, mes ar­ticles fi­ni­ront par me coû­ter cher, à moi aussi. Il faut que je pèse mes mots», sou­pi­rait Rico.

Pour l’ins­tant, il tra­vaillait plus dur que ja­mais.

Dans le train, une conver­sa­tion sur deux rou­lait sur les fonds juifs.

On ri­ca­nait de ce que le sé­na­teur ré­pu­bli­cain de New York Al D’Amato fai­sait sa cam­pagne élec­to­rale «sur le dos» des sur­vi­vants de l’Ho­lo­causte.

«C’est peut-être vrai», m’a dit un jour­na­liste de té­lé­vi­sion en face de qui je fai­sais assez sou­vent les tra­jets entre Lau­sanne et Ge­nève. «Mais les faits qu’il a ren­dus pu­blics sont exacts. Il a à son ser­vice une équipe de cher­cheurs tout à fait re­mar­quable. Quels que soient ses mo­tifs, cela ne change pas les faits.»

«Mais cela change quelque chose à la no­blesse de sa cause.»

«Com­bien d’an­nées, de dé­cen­nies même, les sur­vi­vants de l’Ho­lo­causte ont-ils pas­sées à ré­cla­mer leur dû sans que per­sonne ne les écoute? On ne peut pas les blâ­mer d’avoir pro­fité de l’oc­ca­sion. D’Amato fait peut-être ça pour conqué­rir des voix juives à New York, mais le fait est qu’à New York il y a beau­coup de Juifs, et que plus d’un at­tend qu’on lui rende jus­tice. Ils se rendent mu­tuel­le­ment ser­vice.»

Évi­dem­ment, si je re­pen­sais aux Blu­men­stein, je n’avais pas grand-chose à ré­pondre. Et il me pa­rais­sait que si cer­tains des avo­cats des lésés avan­çaient des pré­ten­tions ab­surdes, c’était que la peur de de­voir ou­vrir leurs coffres a poussé les banques à se dé­fendre au-delà du rai­son­nable.

Par­fois, j’avais l’im­pres­sion, lors­qu’on noir­cis­sait la ré­pu­ta­tion de «la Suisse», d’être prise en otage: on par­lait vrai­ment de nous comme si nous étions tous cou­pables. Et, une fois de plus, je re­pen­sais à ce qu’avait dit Ju­dith Blu­men­stein.

Pour cou­ron­ner le tout et ac­croître cette im­pres­sion de conti­nuité en dépit du fait que je ne me suis guère oc­cu­pée des Blu­men­stein pen­dant plu­sieurs se­maines, la ré­dac­tion d’un des heb­do­ma­daires pour les­quels il tra­vaillait a donné pour consigne à Rico: «Trouve d’autres Meili, des gens que le grand pu­blic ne connaît pas.»

Au fil des se­maines, il les trou­vait, et lorsque nous nous voyions (re­la­ti­ve­ment sou­vent, il fai­sait ses re­cherches sans quit­ter la Suisse, presque sans quit­ter Lau­sanne), il n’était le plus sou­vent ques­tion que d’eux.

J’ai ainsi ap­pris, avec quelques se­maines d’avance sur les lec­teurs de l’heb­do­ma­daire, l’his­toire de Carl Lutz. Ce dandy bâ­lois était homme d’af­faires, et pen­dant la guerre il était Consul de Suisse à Bu­da­pest – en prin­cipe ça au­rait dû être à peine plus qu’un poste ho­no­raire. Mais après l’oc­cu­pa­tion al­le­mande de la Hon­grie, Carl Lutz et sa femme s’étaient rendu compte qu’ils avaient en main un moyen ef­fi­cace de sau­ver des Juifs: leur don­ner un visa pour la Suisse, ce qui les met­tait sous pro­tec­tion consu­laire. Ils avaient ainsi, de leur propre ini­tia­tive, dis­tri­bué des mil­liers de visas, et des dé­cen­nies plus tard Ma­dame Lutz se sou­ve­nait en­core de leur tour­ment parce que des mil­liers, ce n’était pas suf­fi­sant, les Juifs conti­nuaient à être ex­pé­diés dans les camps de la mort par trains en­tiers.

«Carl Lutz a sa rue en Hon­grie, en Israël. En Suisse, après la guerre, il a reçu un blâme pour avoir dis­tri­bué des visas sans res­pec­ter la pro­cé­dure éta­blie, et il a été privé de sa qua­lité de consul», a conclu Rico.

La pre­mière fois où l’on a parlé po­si­ti­ve­ment de Carl Lutz en pu­blic, c’était à l’oc­ca­sion du cen­tième an­ni­ver­saire de sa nais­sance, en 1995. Il était mort de­puis long­temps.

Rico m’a éga­le­ment ra­conté l’ex­tra­or­di­naire his­toire, ou­bliée en Suisse, d’un autre Meili, Louis Hae­fli­ger. Un petit homme à l’al­lure in­si­gni­fiante, j’ai vu sa photo.

Il avait vingt-quatre ans et il était em­ployé de banque lors­qu’en avril 1945 il s’était porté vo­lon­taire pour une mis­sion de la Croix-Rouge: il avait été en­voyé en Au­triche (qui fai­sait par­tie du Reich al­le­mand pour quelques jours en­core), pour ap­por­ter des vivres à Mau­thau­sen. Il était ar­rivé à des­ti­na­tion le 28 avril et avait vai­ne­ment tenté de dis­tri­buer sa mar­chan­dise aux pri­son­niers, les SS l’en avaient em­pê­ché. Il avait fait in­ter­ve­nir la Croix-Rouge al­le­mande, s’était en­têté, et fi­na­le­ment, parce qu’il re­fu­sait à la fois de par­tir et de lâ­cher ses ca­mions de vivres, on l’avait casé au mess des of­fi­ciers en at­ten­dant de ré­gler son cas. On lui avait même donné un lit: il par­ta­geait sa chambre avec un of­fi­cier nommé Rie­mer (em­ployé de banque au civil, lui aussi). Et c’est Rie­mer qui lui avait ap­pris – de col­lègue à col­lègue – les ordres d’Himm­ler: faire sau­ter l’usine Mes­ser­sch­mitt qui se trou­vait sous le camp, non sans y avoir par­qué d’abord tous les pri­son­niers et tout le vil­lage avoi­si­nant pour qu’il ne reste pas de té­moins.

La veille du jour où le plan de­vait être mis à exé­cu­tion, Hae­fli­ger a réussi à per­sua­der Rie­mer que c’était de la folie, et avec la voi­ture de l’of­fi­cier al­le­mand sur la­quelle ils avaient peint une croix rouge sur fond blanc, avec son mou­choir en guise de dra­peau blanc, et Rie­mer pour chauf­feur, Hae­fli­ger s’est mis à battre la cam­pagne à la re­cherche des Al­liés. Un acte d’un cou­rage inouï: la zone grouillait de mi­li­taires des deux camps. Avant de par­tir, Hae­fli­ger a même trouvé le moyen de contac­ter le co­mité de pri­son­niers de Mau­thau­sen et de don­ner des consignes: lors­qu’ils ver­raient les Al­liés poindre à l’ho­ri­zon, il fal­lait que les pri­son­niers se ruent sur les gardes et les désarment par sur­prise, pour les em­pê­cher de tirer.

Hae­fli­ger n’a ren­con­tré que deux chars amé­ri­cains, com­man­dés par un ser­gent d’ori­gine po­lo­naise, par­tis en éclai­reurs pour vé­ri­fier l’état des routes. Le reste de la di­vi­sion était assez loin en ar­rière.

À eux deux, Hae­fli­ger et le ser­gent – il s’ap­pe­lait Al Ko­siek – ont réussi à bluf­fer les SS, à li­bé­rer le camp avec l’aide des pri­son­niers. Qua­rante ans après, Louis Hae­fli­ger di­sait en­core, avec fierté: «Ce dont je m’en­or­gueillis, c’est que le camp a pu être li­béré sans qu’un seul coup de feu soit tiré.»

Rico m’a ra­conté tout cela un soir à table. Dans un grand geste, il s’est es­suyé la mous­tache.

«Et que crois-tu qu’il soit ar­rivé à Hae­fli­ger lors­qu’il est re­venu à Ge­nève?»

«Une ré­cep­tion de héros?»

«Tu n’y es pas, ma pauvre vieille! Il a été radié de la Croix-Rouge pour faute pro­fes­sion­nelle.»

«Quelle faute pro­fes­sion­nelle?»

«Un dé­lé­gué de la Croix-Rouge n’a pas le droit de faire appel à un des bel­li­gé­rants.»

«Mais enfin, les cir­cons­tances…»

«Le rè­gle­ment c’est le rè­gle­ment. Il a em­pê­ché la mort de trente mille, de cin­quante mille, de cent mille per­sonnes, peut-être. Mais que veux-tu, c’était contre le rè­gle­ment.»

«Et en­suite?»

«Oh, entre-temps il est mort. Il a sa rue en Israël, lui aussi, et en Au­triche. On lui a at­tri­bué toutes sortes d’hon­neurs, l’Au­triche l’a pro­posé deux fois pour le Prix Nobel de la paix.»

Rico a levé son verre.

«À Hae­fli­ger!»

J’ai levé le mien vers le ciel:

«Santé, Louis. Et com­ment se fait-il qu’en Suisse on ne parle pas de lui?»

«On lui a consa­cré un do­cu­men­taire dans les an­nées quatre-vingt. Mais après la guerre il s’est re­trouvé sur une liste noire, il n’ar­ri­vait pas à ob­te­nir un job, il a dû émi­grer, il est de­venu ci­toyen au­tri­chien, et il a fini sa vie à Vienne. “ Nous l’avons ou­blié.»

Plus d’une fois, Rico avait réussi à me faire pleu­rer: lors­qu’il m’avait ra­conté que Ma­dame Lutz – morte ré­cem­ment – fai­sait en­core des cau­che­mars cin­quante ans après, parce qu’elle pen­sait non pas aux Juifs que son mari et elle avaient sau­vés, mais à ceux qu’ils n’avaient pas réussi à pro­té­ger. Ou lors­qu’il m’avait lu un do­cu­ment qui re­la­tait com­ment les pri­son­niers de Mau­thau­sen, des sque­lettes am­bu­lants, avaient joué l’hymne na­tio­nal amé­ri­cain avant même d’avoir été nour­ris et soi­gnés, pour re­mer­cier leurs li­bé­ra­teurs.

Bref, avec tout ça, sub­jec­ti­ve­ment je n’ai pas eu la sen­sa­tion que mon tra­vail pour les Blu­men­stein s’était in­ter­rompu.

Je conti­nuais à pré­pa­rer les dos­siers pour Maître Tis­sot, j’al­lais au tri­bu­nal avec lui. Et c’est un soir où il fal­lait à tout prix que je ter­mine un do­cu­ment dont nous avions be­soin pour l’au­dience du len­de­main matin que Ber­trand Per­rier, fa­ti­gué sans doute de me voir tour­ner en rond, m’a fait un signe de­puis l’au-delà.

Je ne suis pas mys­tique pour deux sous, mais j’avoue que, lorsque je pense à ce mo­ment-là, je ne peux m’em­pê­cher de me dire qu’il m’a mis une main sur la nuque et dit, dans le lan­gage spé­cial des gens qui ne sont plus des nôtres: «Re­garde, ma vieille, et vois.»

Le matin même, la grande banque qui avait ab­sorbé la Banque de Cré­dit avait ré­pondu à Maître Tis­sot qu’elle re­gret­tait, et cætera. Avec copie à Al­bert Tis­sot, qui avait après tout été ti­tu­laire du compte. Et c’est à cela que je pen­sais lorsque je me suis mise en quête d’une agrafe – aussi bête que ça. Il n’y en avait plus dans mon ti­roir. Il de­vait être sept heures, il n’y avait plus per­sonne dans la mai­son, sinon la femme de mé­nage dont j’en­ten­dais l’as­pi­ra­teur.

Je pour­rais sans doute en ré­cu­pé­rer une dans mes dos­siers. J’ai ou­vert le ti­roir du bas, j’ai feuilleté les dos­siers sus­pen­dus, trouvé ce que je cher­chais, j’ai en­levé le trom­bone de la main gauche, et au mo­ment de re­fer­mer le ti­roir, il m’est tombé des doigts et a glissé sous les dos­siers sus­pen­dus. J’ai passé la main sur le fond du ti­roir, à l’aveugle. Rien. Je suis allée un peu plus loin vers l’ar­rière, et mon doigt a ren­con­tré quelque chose. J’ai tiré.

C’était un ca­le­pin ob­long de cuir brun, un agenda. J’ai conti­nué à cher­cher au fond du ti­roir, et j’ai ré­cu­péré mon agrafe.

J’ai re­fermé, j’ai ou­vert le ca­le­pin. Sur la page de garde il y avait le nom, à l’encre verte: «Ber­trand Per­rier.»

Ça m’a fait un coup. Com­ment avais-je pu man­quer ce car­net le pre­mier jour? Il était assez plat, et de la même cou­leur que le ti­roir, c’était sans doute pour ça.

C’était un agenda de l’an­née en cours, avec des ren­dez-vous jus­qu’au jour même où Per­rier avait été tué. Plu­sieurs fois, il avait écrit la lettre S en­tou­rée d’un cercle. Sur le jour où il était mort, il avait noté: «Pla­neur, 2 heures.»

«Pauvre vieux, va. Et pauvre Sté­pha­nie.»

J’al­lais fer­mer l’agenda, le ran­ger dans le ti­roir, j’étais cre­vée, je m’en oc­cu­pe­rai de­main, lorsque j’ai re­mar­qué une feuille coin­cée der­rière le petit ca­hier des adresses sé­paré de l’agenda pro­pre­ment dit. Je l’ai sor­tie, l’ai dé­pliée.

Il m’a fallu un ins­tant pour com­prendre.

C’était, im­pri­mée sur pa­pier, la liste des ar­chives que j’avais trou­vée dans l’or­di­na­teur. Mais elle était dif­fé­rente de l’ori­gi­nal élec­tro­nique. Elle avait été com­plé­tée à la main. Elle était re­cou­verte d’une écri­ture ser­rée. En haut, il avait écrit «Squat», à mi-feuille sous un grand trait noir, à par­tir de 1948, «Ver­soix».

À côté de chaque année, il y avait des noms. De 1936 à 1940, il y avait, entre autres, celui des Blu­men­stein. Cohen re­ve­nait éga­le­ment plu­sieurs fois. Qu’est-ce que…

J’ai re­pris l’agenda, je l’ai lu page par page. Rien qui m’illu­mine. À la page de garde, sous le nom de Ber­trand, il y avait son adresse: 24, bou­le­vard des Phi­lo­sophes. Et juste des­sous, comme dans beau­coup d’agen­das, la ru­brique «Per­sonne à pré­ve­nir en cas d’ac­ci­dent». Cette per­sonne, c’était Ma­de­leine Fab­bri, Ver­soix (mère). Il y avait un nu­méro de té­lé­phone. Pa­thé­tique. De­main, je m’oc­cu­pe­rais…

C’est venu comme un coup de mas­sue: ces idées dont on ne sait pas d’où elles sortent. J’avais lu le nom de Blu­men­stein. Tracé des mois avant qu’ils ne se ma­ni­festent. Per­rier avait fouillé, lu les ar­chives – il n’au­rait pas pu connaître ces noms sans cela.

Il a fallu en­core cinq mi­nutes pour que la ques­tion sur­gisse enfin: étais-je sûre qu’il les avait dé­truites?

Je n’ai pas dormi de la nuit. Il fal­lait que je me dé­bar­rasse de mon pen­sum au tri­bu­nal, Maître Tis­sot comp­tait sur moi, je n’avais même pas le temps d’ap­pe­ler So­phie avant d’al­ler au Pa­lais de Jus­tice, où je de­vais être à huit heures, j’ai dû prendre le train à l’aube, on n’ar­rive pas en re­tard au tri­bu­nal.

Qu’on ne me de­mande pas ce qui s’est passé ce ma­tin-là. Mon corps, mes ré­flexes y étaient. Ma tête était ailleurs. Heu­reu­se­ment c’était jeudi, à midi j’avais fini ma se­maine.

Avant de quit­ter l’étude, j’ai pho­to­co­pié l’agenda page par page, à tout ha­sard.

À une heure, de­puis une ca­bine, j’ap­pe­lais Ma­dame Fab­bri, la mère de Per­rier.

«Allô? Ma­dame Fab­bri? Ma­dame Fab­bri, je suis dé­so­lée de vous dé­ran­ger. Je suis Marie Mar­tin, c’est moi qui ai rem­placé votre re­gretté fils…»

«Je n’ai pas…»

La voix était sèche. Je ne vou­lais pas qu’elle m’en­voie paître. Il fal­lait que je la voie.

«Je suis dé­so­lée, mais c’est que par ha­sard, j’ai re­trouvé son agenda, il s’était glissé der­rière les dos­siers sus­pen­dus. J’ai pensé que vous ai­me­riez le ré­cu­pé­rer.»

Elle s’est adou­cie d’un rien.

«Vous me l’en­voyez?»

«Si vous per­met­tez, je vous l’ap­porte.»

«Mais ça vous fait perdre du temps.»

«Pas du tout, cela me fe­rait plai­sir. Je pour­rais venir dans une heure, je passe par Ver­soix.»

C’était façon de par­ler, les trains que je prends ha­bi­tuel­le­ment ne s’ar­rêtent pas à Ver­soix.

Elle a ac­cepté.

Ma­de­leine Fab­bri était une femme en­core jeune, belle, soi­gnée. Ma­riée avec un ar­chi­tecte, Paolo Fab­bri, ai-je constaté sur la boîte aux lettres. Elle m’a reçue dans un ap­par­te­ment meu­blé avec goût, simple et ma­gni­fique.

Elle m’a fait as­seoir, m’a of­fert à boire.

Une fois les pré­li­mi­naires ache­vés, j’ai ou­vert mon sac.

«Voilà l’agenda, Ma­dame, je me suis dit…»

Ma­de­leine Fab­bri l’a pris comme on prend une fleur que l’on craint d’abî­mer, l’a feuilleté, s’est ar­rê­tée comme moi au jour où Ber­trand est mort.

Et d’une voix trem­blante, elle a mur­muré, pour elle-même:

«Je n’ai ja­mais cru à un ac­ci­dent, moi.»

Elle s’est mordu les lèvres, comme si elle en avait trop dit. J’étais à court de mots, et pen­dant un temps qui m’a paru très long, nous nous sommes re­gar­dées.

Il fal­lait que j’en aie le cœur net. Je me suis lan­cée.

«Qu’est-ce qu’il a caché chez vous, Ma­dame Fab­bri?»

Elle n’a pas bron­ché.

«Qu’est-ce qui vous fait dire qu’il au­rait caché quelque chose chez moi?»

«Vous soup­çon­nez qu’on ait pro­vo­qué l’ac­ci­dent de votre fils, il faut bien qu’il y ait une rai­son. Et puis il y a ça.»

J’ai sorti la pho­to­co­pie de la liste. Ma­de­leine Fab­bri l’a prise, l’a par­cou­rue. Je me suis dit qu’elle al­lait pleu­rer.

«Il a écrit “ Ver­soix ”», ai-je re­mar­qué d’une voix in­cer­taine.

«Je ne vois pas». Son ton était neutre.

«Ma­dame Fab­bri, si vous soup­çon­nez qu’on a fait du mal à votre fils, vous n’al­lez pas res­ter là, les mains croi­sées, à ne rien faire. Vous êtes la se­conde per­sonne qui me parle d’ac­ci­dent pro­vo­qué. Il faut bien qu’il y ait quelque chose. Je com­prends bien que vous n’avez au­cune rai­son de me faire confiance…»

«En effet. Vous pour­riez être n’im­porte qui. La maî­tresse de Maître Jean-Ber­nard Tis­sot, par exemple.»

Je n’ai pas re­levé. Elle avait toutes les rai­sons de se mé­fier.

«Votre fils ha­bi­tait chez vous, lorsque…»

«Il a quitté la mai­son très jeune, pour aller à un en­droit ap­pelé Rhino, ne me de­man­dez pas où c’est, je n’y ai ja­mais mis les pieds, en ce temps-là nous étions en froid. Il n’ac­cep­tait pas que je me sois re­ma­riée après la mort de son père. C’est seule­ment de­puis peu que…»

Sa voix s’est cas­sée.

«Je suis dé­so­lée, Ma­dame. Je ne vou­lais pas… Vou­lez-vous me per­mettre de vous in­vi­ter à dîner? Vous êtes seule ici…»

Elle a lon­gue­ment fait non de la tête, puis elle a ré­cu­péré sa voix.

«Ne vous en faites pas. Mon mari rentre tout à l’heure.»

Un si­lence.

«C’est à cause de lui que je me suis brouillée avec Ber­trand, après la mort de mon pre­mier mari», a-t-elle fini par dire comme si elle me fai­sait une conces­sion. «Il était ja­loux… Ber­trand n’ai­mait pas Paolo Fab­bri parce que per­sonne n’ar­ri­ve­rait ja­mais à la che­ville de son père. Je dé­ro­geais, selon lui.»

«Que fai­sait votre pre­mier mari?»

«Il était com­mis­saire de po­lice. Un re­dres­seur de torts. Ber­trand te­nait de lui.»

C’était peut-être une ex­pli­ca­tion de sa té­mé­rité.

«Je suis vrai­ment dé­so­lée…»

J’avais conscience de me ré­pé­ter, mais de­vant cette émo­tion vio­lente et com­plè­te­ment re­te­nue, je ne sa­vais plus que dire d’autre.

Elle s’est levée, le vi­sage fermé, la voix dure.

«Il vaut mieux que vous par­tiez. Pour vous. Pour moi. Pour tout le monde.»

Elle ne me met­tait pas phy­si­que­ment à la porte, mais c’était tout comme.

Je suis allée à la gare de Ver­soix at­tendre l’om­ni­bus qui m’a ame­née à Nyon, où j’ai pris un train un peu plus ra­pide.

Je me suis re­trou­vée face à So­phie vers quatre heures de l’après-midi. Je lui ai tout ra­conté.

«In­croyable», a-t-elle dit plu­sieurs fois, les yeux fixés sur la liste d’ar­chives (de celle-là, j’avais gardé l’ori­gi­nal).

J’étais fu­rieuse de me sen­tir aussi im­puis­sante.

«Il faut ab­so­lu­ment ob­te­nir une liste des comptes ou­verts par Al­bert Tis­sot», ai-je re­mar­qué.

À Lau­sanne, j’au­rais su à quelles portes frap­per. Mais à Ge­nève?

J’ai ap­pelé Pierre-Fran­çois pour le mettre au cou­rant et lui de­man­der conseil. Sa se­cré­taire m’a ap­pris qu’il était déjà parti – eu­phé­misme, on se de­man­dait par­fois quand Pierre-Fran­çois était à son étude. Il de­vait pour­tant y pas­ser un cer­tain nombre d’heures, l’ef­fi­ca­cité de ses in­ter­ven­tions en té­moi­gnait.

«Il m’a dit qu’il al­lait voir Mon­sieur Girot à Vevey.»

Ah, ah! Il était chez les fo­rains. Je me suis pré­ci­pi­tée à Vevey. Une fois qu’on sait dans quelle lo­ca­lité ils sont, on trouve les fo­rains sans pro­blème, ils prennent de la place. Ils étaient tout juste en­core là. Ils dé­mon­taient. Nous étions en no­vembre, c’était le mo­ment de leur pause avant les grands bas­tringues de fin d’an­née.

Je les ai trou­vés dans la rou­lotte de l’oncle Girot. Au­tre­fois Jacky Girot avait exé­cuté un nu­méro sen­sa­tion­nel: le mur de la mort, à moto sur une paroi ver­ti­cale, un truc à vous faire fré­mir avec vol­tiges, équi­libre assis sur le gui­don, de­bout sur la selle. On l’ap­pe­lait l’homme aux qua­torze prouesses.

«Je ne sais pas qui a in­venté ça, ça ve­nait d’Al­le­magne», ai­mait-il à ra­con­ter. «Il faut une concen­tra­tion ter­rible. On part sur le mur à trente-cinq ou qua­rante ki­lo­mètres à l’heure. Au bout de trois mètres, tu es déjà sur la paroi. Et une fois que tu y es, il n’y a pas quelque chose de plus ou moins dif­fi­cile, ou tu sais le faire à cent pour cent, ou tu ne sais pas. J’ai fini par ar­rê­ter au bout de dix ans, parce que c’est un risque ter­rible, ça t’abîme la santé.»

Il avait eu plu­sieurs ac­ci­dents. Un jour il avait eu la sen­sa­tion qu’au pro­chain il se tue­rait. Il avait changé d’oc­cu­pa­tion. Main­te­nant il de­vait avoir près de soixante-dix ans, mais il avait gardé ses al­lures de boxeur fu­nam­bule. Il était at­ta­blé avec sa femme Lucie, leur fils Da­niel, qui est un de mes bons amis, et leur neveu, Pierre-Fran­çois Clair, qui est – on l’aura com­pris – mon avo­cat pré­féré. Ils si­ro­taient une bou­teille de blanc.

Ils m’ont fait une place à la table.

«Que nous vaut l’hon­neur…?»

«J’avais be­soin de voir Pierre-Fran­çois.»

«Une af­faire? Tu veux qu’on sorte?»

J’ai eu un ins­tant d’hé­si­ta­tion. Mais après tout je n’avais pas de client à pro­pre­ment par­ler, et puis les Girot – Da­niel en par­ti­cu­lier – m’avaient sou­vent aidée. Ils fai­saient pour ainsi dire par­tie de mon agence.

Je leur ai ra­conté la mort de Per­rier, mes soup­çons, l’his­toire de l’agenda. J’at­ten­dais un conseil de Pierre-Fran­çois. L’aide est venue d’une source in­at­ten­due.

«La mère Per­rier m’a dit: “Il est allé ha­bi­ter un en­droit ap­pelé Rhino.” Je vou­lais aller voir, mais je ne trouve ça sur au­cune carte, il va fal­loir que je la rap­pelle pour lui poser la ques­tion.»

«Où est-ce que tu vis, Marie?» s’est es­claf­fée Lucie, «bien sûr que tu ne le trouves sur au­cune carte. C’est le nom d’un des squats de Ge­nève. Il est cé­lèbre.»

«Un squat! Tu es sûre?»

«Oui, je suis sûre. Nous, on passe l’hi­ver à Ver­soix, on lit donc les jour­naux de Ge­nève. C’est un squat dont on parle, je te dis, parce qu’ils y ont fait des trucs sen­sa­tion­nels: ils ont une cave à mu­sique, un bis­trot, au fil des ans ils ont pro­duit des peintres, des écri­vains, des ci­néastes, des pho­to­graphes, des mu­si­ciens, et je ne sais quoi en­core. Bref, je suis sûre.»

Elle a re­pris son souffle, et Da­niel a com­plété.

«Et puis on sait tout ça parce qu’il y a un de nos ma­la­bars oc­ca­sion­nels, qui ha­bite à Rhino. J’y suis même déjà allé. Ri­chard Maret, tu vois? L'in­tel­lec­tuel, tu te le rap­pelles?»

«Oui, oui…»

Les ma­la­bars, dans le vo­ca­bu­laire des Girot, ce sont les cos­tauds qui font les gros tra­vaux, mon­tage et dé­mon­tage des mé­tiers, en­tre­tien, sur­veillance. Cer­tains d’entre eux sont en­ga­gés à l’an­née, d’autres de façon in­ter­mit­tente. Je me sou­ve­nais de Ri­chard parce qu’il avait des al­lures de lut­teur de foire, des mains en bat­toir, un ta­touage sur les bis­co­tos, bref tout de la gouape, et qu’un jour où je me trou­vais là pen­dant que les fo­rains s’ins­tal­laient à Ouchy, il m’avait dit, comme ça en pas­sant:

«Je viens de réus­sir mon bac.»

«Bravo! Et qu’est-ce que vous allez en faire?»

«Hautes études éco­no­miques et in­for­ma­tique. Je me suis ins­crit à Ge­nève.»

Il s’était éloi­gné d’un pas non­cha­lant, por­tant sur l’épaule, comme si c’était un oreiller de plumes, une barre de métal qui de­vait peser cin­quante kilos.

«Et il se­rait où à Ge­nève, ce Rhino?» me suis-je en­quise au­près des Girot.

Da­niel a feuilleté un épais ca­hier plein d’adresses.

«Voilà. Ri­chard Maret. 24, bou­le­vard des Phi­lo­sophes.»

«Quoi?» J’ai eu un geste de sur­prise si violent que j’ai ren­versé mon verre de blanc. D’ins­tinct, je me suis levée.

«Mais qu’est-ce qu’il te prend, Marie? Calme-toi. As­sieds-toi. Qu’est-ce qu’il y a?»

«Il y a que 24, bou­le­vard des Phi­lo­sophes, c’était l’adresse de Ber­trand Per­rier au mo­ment où il est mort. Sa mère a vrai­ment dû dé­tes­ter ce squat. C’est en­core là qu’il ha­bi­tait, mais elle ne me l’a pas dit.»

À leur tour d’être sur­pris. Nous nous sommes re­gar­dés, avons échangé des sou­rires en­ten­dus. Il n’y avait plus qu’à y aller. C’était l’évi­dence même.

 

 

 

 

                                      (à suivre)

 

© Ber­nard Cam­piche édi­teur, CH 1350 Orbe (Suisse)

«D’Or et d’Ou­blis» a été réa­lisé par Ber­nard Cam­piche, avec la col­la­bo­ra­tion de René Be­la­kovsky, Mary-Claude Gar­nier, Marie Musy, Ma­rie-Claude Schoen­dorff et Da­niela Spring. Photo de cou­ver­ture: Laurent Co­chet


Un com­men­taire
1)
zit
, le 21.12.2008 à 09:17

Ah, les pe­tites his­toires de la “grande his­toire”…

C’est re­dou­table.

z (le matin, au ré­veil, heu­reu­se­ment que mon na­tu­rel op­ti­miste va plu­tôt re­te­nir le cou­rage des in­di­vi­dus, je ré­pêêêêêêêête : sinon, c’est à se taper la tête contre les murs…)