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La Ver­mine, une fable, post­face

Cette his­toire a paru ici en 12 épi­sodes. Pour ter­mi­ner, voici en­core la post­face, qui ex­plique la dé­marche et les rai­sons de ce texte. On peut lire le roman en­tier sur Cuk où il a paru le di­manche, ou en l’ache­tant au­près de “Ber­nard Cam­piche édi­teur”www.​campiche.​ch.

Lorsque les Al­ba­nais c’était nous…

La Ver­mine est un cri de co­lère. De co­lère et de dou­leur.

Ces sen­ti­ments ont fait sur­gir de l’in­cons­cient une idée dont j’ai dé­cou­vert de­puis lors que c’était l’un des grands ar­ché­types des im­mi­grés du monde en­tier: «Ils nous mal­traitent, ils nous in­sultent, ils nous hu­mi­lient, ils pré­tendent qu’on les vole – il fau­drait qu’on parte tous; ils s’aper­ce­vraient que, sans nous, leur pays ne marche plus.»

On re­trouve ce thème du dé­part mas­sif dans la lit­té­ra­ture, le plus sou­vent orale, des im­mi­grés de tous les conti­nents. En 1964, l’écri­vain noir amé­ri­cain War­ren Mil­ler en avait fait, lui aussi, un roman. The Siege of Har­lem 1 ra­conte com­ment tous les Noirs amé­ri­cains ob­tem­pèrent au vœu ra­ciste: ils quittent les États-Unis. Tous. Après eux, le chaos.

On re­trouve fré­quem­ment ce même thème chez les hu­mo­ristes, et il fait sou­vent son ap­pa­ri­tion dans la cor­res­pon­dance des émi­grés, qu’il s’agisse de lettres pri­vées ou de cour­rier des lec­teurs.

«Il fau­drait qu’on parte tous…» – com­bien de fois n’a-t-on pas ex­primé cette idée dans les réunions des com­mu­nau­tés im­mi­grées en Suisse entre 1968 – lan­ce­ment de l’ini­tia­tive dite «Schwar­zen­bach», du nom de son au­teur, James Schwar­zen­bach – et juin 1970 – où la Suisse l’a re­fu­sée?

C’est de là qu’a surgi l’idée de La Ver­mine. De là et du sen­ti­ment d’hor­reur, d’in­jus­tice, que la si­tua­tion pro­vo­quait en moi.

Ce­pen­dant, la vé­ri­table im­pul­sion est venue d’une autre source. Au mo­ment même où nous étions ar­ro­sés de pro­pa­gande xé­no­phobe, le Dé­par­te­ment de jus­tice et po­lice a fait dis­tri­buer gra­tui­te­ment dans tous les mé­nages une pu­bli­ca­tion in­ti­tu­lée Zi­vil­ver­tei­di­gung 1 ou Dé­fense ci­vile 2, qui nous par­lait lon­gue­ment du mal venu de l’étran­ger, de la guerre psy­cho­lo­gique, et qui im­pli­quait que tous les étran­gers et tous les in­tel­lec­tuels (avec ac­cent sur les jour­na­listes) étaient des en­ne­mis po­ten­tiels de la pa­trie suisse. Comble de l’op­probre, la ver­sion fran­çaise, adap­tée par un écri­vain (par ailleurs officier su­pé­rieur de l’ar­mée suisse), Mau­rice Zer­mat­ten, ag­gra­vait en­core le rôle de traîtres de l’in­tel­li­gent­zia et des mé­dias. Le scan­dale avait été tel que cette pu­bli­ca­tion avait très vite dis­paru. Le pu­blic avait été in­vité à en dé­cou­per la cou­ver­ture et à l’en­voyer à Berne en signe de pro­tes­ta­tion. Des cen­taines de mil­liers de cou­ver­tures avaient ainsi été ar­ra­chées, et on ne saura ja­mais com­bien de ces pe­tits livres ont fini à la pou­belle ou aux vieux pa­piers.

Une des pro­tes­ta­tions parmi les plus bruyantes avait été celle des écri­vains suisses. Max Frisch, Frie­drich Dürren­matt, Ni­co­las Bou­vier, Frank Jot­te­rand, Pierre-Louis Junod, Jean-Pierre Mon­nier, Peter Bich­sel, Lud­wig Hohl, Jörg Stei­ner, Paul Nizon, etc., une tren­taine d’au­teurs connus avaient exigé la dé­mis­sion de Mau­rice Zer­mat­ten, qui pré­si­dait la So­ciété suisse des écri­vains.

Dans un pre­mier temps, Mau­rice Zer­mat­ten avait re­fusé de se dé­mettre. Pour ma­ni­fes­ter leur désap­pro­ba­tion, les pro­tes­ta­taires ont alors fait sé­ces­sion, ils ont quitté la So­ciété en bloc et ont donné nais­sance à ce qui al­lait de­ve­nir l’as­so­cia­tion dis­si­dente d’écri­vains sous le nom de Groupe d’Ol­ten.

J’avais de­mandé à me joindre à eux et parlé de mon pro­jet. Plu­sieurs d’entre eux ont pro­mis de m’ai­der et leur avis m’a en effet été pré­cieux.

Le temps pres­sait. Je me suis lan­cée.

Dans La Ver­mine, l’in­ven­tion tient une place li­mi­tée. Ce petit roman est le fruit d’un tra­vail col­lec­tif de do­cu­men­ta­tion qui m’a per­mis de l’écrire en quelques se­maines. Fa­mille, amis et connais­sances, écri­vains, im­mi­grés de di­verses na­tio­na­li­tés, ont éplu­ché pour moi la presse suisse, les cour­riers des lec­teurs, et la plu­part des pen­sées de Jacques Bo­lo­met ont été re­cueillies dans ce qu’ils ont ra­mené. Quant aux dis­cours officiels, je les ai pris dans Dé­fense ci­vile, de même que l’in­trigue et que pas mal de si­tua­tions. Avec un coup de pouce final (et dé­ci­sif) de Kafka, La Ver­mine est née.

La si­tua­tion au prin­temps 1970

Pour com­prendre l’in­di­gna­tion, le plus sou­vent muette, mais non moins pro­fonde, de la com­mu­nauté im­mi­grée et d’une large par­tie de l’opi­nion suisse, il me pa­raît né­ces­saire de rap­pe­ler la si­tua­tion.

Nous étions fin 1969, début 1970, et la cam­pagne pour la vo­ta­tion sur l’Ini­tia­tive sur la sur­po­pu­la­tion étran­gère bat­tait son plein. Cette «sur­po­pu­la­tion», due à la haute conjonc­ture qui fai­sait que la Suisse avait connu une pros­pé­rité qui com­men­çait tout juste à fléchir, mais qui créait la pos­si­bi­lité du chô­mage, était consti­tuée de tra­vailleurs prin­ci­pa­le­ment ita­liens dont un grand nombre étaient sai­son­niers 1. L’ini­tia­tive au­rait eu pour consé­quence de trans­for­mer un grand nombre de per­mis illi­mi­tés en per­mis sai­son­niers, et quelques voix ex­trêmes ré­cla­maient même que tous les tra­vailleurs étran­gers fussent sai­son­niers.

Dans cette am­biance ten­due, un drame est en­core venu jeter de l’huile sur le feu.

L’an­née pré­cé­dente, à Sankt-Mo­ritz, trois Suisses avaient as­sas­siné At­ti­lio To­nola, un ou­vrier ita­lien, pour la seule rai­son qu’il était ita­lien, et qu’«ils n’ai­maient pas les Ita­liens». Cela avait eu des échos jus­qu’à Rome, à la Chambre des dé­pu­tés, et dans les pro­cès-ver­baux nous li­sons:

Les in­ter­pel­lants de­mandent au mi­nistre des Af­faires étran­gères et au mi­nistre du Tra­vail:

  1. s’ils ont l’in­ten­tion d’in­ter­ve­nir au­près du gou­ver­ne­ment suisse à la suite de l’ignoble as­sas­si­nat de l’ou­vrier ita­lien At­ti­lio To­nola, agressé par trois ci­toyens suisses alé­ma­niques, ad­venu en no­vembre 1968;
  2. s’il n’y au­rait pas lieu d’or­ga­ni­ser une en­quête ap­pro­fon­die sur la réa­lité in­quié­tante que vivent les tra­vailleurs émi­grés ita­liens en Suisse. L’as­sas­si­nat de Sankt-Mo­ritz consti­tue un rap­pel sé­rieux de cette réa­lité trouble du monde hel­vé­tique ca­rac­té­ri­sée par le mé­pris et par l’hos­ti­lité d’une par­tie de la po­pu­la­tion, le plus sou­vent alé­ma­nique, en­vers les tra­vailleurs étran­gers. Mé­pris et hos­ti­lité se trans­forment sou­vent en haine dé­cla­rée. Les in­ter­pel­lants ai­me­raient que les mi­nistres com­pé­tents leur fassent sa­voir si l’agres­sion et l’as­sas­si­nat [d’At­ti­lio To­nola] sont pro­vo­qués par la fu­reur xé­no­phobe aveugle, au­tre­ment dit s’il s’agit uni­que­ment d’une consé­quence ex­trême de la peur de la sur­po­pu­la­tion étran­gère à la suite de la cam­pagne contre les étran­gers, ou si d’autres mo­tifs entrent en compte 1.

Le pro­cès s’est dé­roulé les 1er et 2 mars 1969, et a été suivi avec at­ten­tion par l’alors très nom­breuse com­mu­nauté ita­lienne. Deux cir­cons­tances ont par­ti­cu­liè­re­ment frappé les es­prits (le mien com­pris): le fait que l’agres­sion se fût dé­rou­lée aux cris de «chaibe Chink» (in­tra­dui­sible sinon, ap­proxi­ma­ti­ve­ment, par «Magut de merde»), et le fait que, après l’avoir frappé puis bourré de coups de pied alors qu’il était déjà au sol, les trois hommes aient caché To­nola dans un coin; l’ont-ils cru déjà mort? Quoi qu’il en soit, il n’a pas tardé à rendre l’âme, étouffé par son propre sang. «Ils l’ont laissé cre­ver comme un chien», di­sait-on dans la com­mu­nauté ita­lienne. La presse suisse a fait peu de cas de ce qui n’était pour elle qu’un fait di­vers. Mais, chez les im­mi­grés, l’in­di­gna­tion s’est trans­for­mée en fu­reur à l’énoncé du ju­ge­ment. L’as­sas­si­nat a été re­qualifié en rixe (les Ita­liens sont ba­gar­reurs, c’est connu, iro­ni­sait-on avec amer­tume dans les mi­lieux de l’émi­gra­tion): le plus actif des as­sas­sins, Erich Ber­nard­sgrut­ter, élec­tri­cien de son mé­tier, était condamné à deux ans de pri­son; quant aux frères Jo­seph et Armin Schmid, l’un (Jo­seph) était condamné à quinze mois de pri­son, et l’autre (Armin) était car­ré­ment ac­quitté. Les trois hommes avaient des an­té­cé­dents ju­di­ciaires et Armin avait déjà fait de la pri­son. On ap­pre­nait dans le même temps que Mme To­nola et ses quatre en­fants ne re­ce­vraient pas un sou des as­su­rances, puis­qu’il s’agis­sait d’une simple ba­garre qui avait mal tourné.

«À la Bourse de Zu­rich, To­nola vaut deux cygnes et seize merles», écri­vait un cor­res­pon­dant en met­tant en pa­ral­lèle la condam­na­tion des trois agres­seurs et celle, ad­ve­nue au même mo­ment, d’un bra­con­nier.

Ce ver­dict al­lait pro­vo­quer une nou­velle in­ter­pel­la­tion à la Chambre ita­lienne des dé­pu­tés:

À la suite de la scan­da­leuse et in­quié­tante nou­velle de la faible condam­na­tion des ci­toyens suisses Ber­nard­sgrut­ter et Jo­seph Schmid et de l’ac­quit­te­ment d’Ar­min Schmid pour crime de lé­sions graves avec pos­si­bi­lité d’is­sue fa­tale et non-se­cours à per­sonne en dan­ger qui ont pro­vo­qué la mort du ci­toyen ita­lien At­ti­lio To­nola, les sous­si­gnés dé­si­rent sa­voir si le mi­nistre des Af­faires étran­gères, et celui du Tra­vail et de la Pré­voyance so­ciale, ont l’in­ten­tion d’in­ter­pel­ler le gou­ver­ne­ment hel­vé­tique pour qu’il pro­tège avec vi­gueur les émi­grés ita­liens en Suisse. Le gou­ver­ne­ment de­vrait cher­cher à ob­te­nir des modifica­tions aux conven­tions ac­tuelles, et en pro­po­ser de nou­velles, ainsi que des ac­cords pré­voyant l’affirma­tion des droits dé­mo­cra­tiques des tra­vailleurs ita­liens, l’adop­tion de me­sures et d’in­ter­ven­tions di­rectes pour fa­vo­ri­ser le re­grou­pe­ment fa­mi­lial des tra­vailleurs émi­grés avec leurs fa­milles, ainsi que la pro­tec­tion de la per­son­na­lité et de l’in­té­grité phy­sique des tra­vailleurs ita­liens, su­jets à une constante et odieuse dis­cri­mi­na­tion so­ciale de na­ture clai­re­ment ra­ciste, et dont la gra­vité a même été évo­quée ré­cem­ment par le Conseil fé­dé­ral suisse 1.

J’étais, moi, à l’abri: j’avais épousé un ar­chi­tecte suisse et avais ainsi ob­tenu la na­tio­na­lité hel­vé­tique. J’avais même réussi, à la force du poi­gnet, à réa­li­ser mon rêve d’en­fant et à faire des études de lettres. J’étais pro­fes­seur dans l’en­sei­gne­ment se­con­daire et n’évo­quais que pru­dem­ment mon pays d’ori­gine. C’est que les an­nées d’en­fance vé­cues dans une zone grise, sur une série de men­songes et de ca­chot­te­ries, étaient en­core très pré­sentes à mon es­prit. Ma mère était sai­son­nière et n’au­rait pas eu le droit de me faire venir en Suisse, où j’étais tout de même semi-clan­des­tine. J’étais à la merci du moindre faux pas et, sans vou­loir en­trer ici dans les dé­tails, di­sons que j’avais failli plu­sieurs fois me faire ex­pul­ser. Le ma­riage m’avait «sau­vée», à la der­nière mi­nute. Pen­dant ces an­nées d’en­fance et d’ado­les­cence, j’avais tout en­tendu: dans la cour des écoles que j’avais fré­quen­tées on m’a as­suré que les «ma­guts» étaient tous cras­seux, tous vo­leurs, tous prêts à as­sas­si­ner père et mère… J’en passe. Nous étions en­core trai­tés, à l’orée des an­nées 1970, comme le sont au­jour­d’hui les im­mi­grés et les sans-pa­piers, qui viennent dé­sor­mais du monde en­tier.

En fait, ce qui se ma­ni­fes­tait alors, ce n’était pas plus qu’au­jour­d’hui une hos­ti­lité spécifique en­vers les Ita­liens: c’était cette culture du bouc émis­saire qui crée «l’autre», afin d’avoir quel­qu’un à rendre res­pon­sable de ses insuffisances et de ses pro­blèmes.

Dans son essai, L’Orda, re­ve­nant sur une époque dé­sor­mais ob­so­lète, puisque l’Ita­lie est de­ve­nue elle-même pays d’ac­cueil, l’écri­vain ita­lien Gian An­to­nio Stella l’ex­prime très bien:

«Lorsque les “ Al­ba­nais ” c’était nous», écrit-il, «nous émi­grions illé­ga­le­ment par cen­taines de mil­liers, on nous lyn­chait en nous ac­cu­sant d’être des vo­leurs de tra­vail, nous étions tous mafieux et cri­mi­nels. Lorsque les “ Al­ba­nais ” c’était nous, nous ven­dions nos en­fants aux ogres am­bu­lants, nous or­ga­ni­sions la traite des Blanches, nous se­mions ter­reur et anar­chie en as­sas­si­nant chefs d’État et pauvres pas­sants, et nous étions si sales qu’on nous in­ter­di­sait même la salle d’at­tente de troi­sième classe. Lorsque les “ Al­ba­nais ” c’était nous, nous por­tions sur le dos le poids de siècles de fa­mine, d’igno­rance et de sté­réo­types in­fa­mants… Nous étions les Al­ba­nais des autres, hier en­core – parce que nous étions dif­fé­rents. 1»

Beau­coup d’ex-im­mi­grés consi­dèrent que ces pro­pos pour­raient tout aussi bien conve­nir aux Suisses; au­raient-ils ou­blié, re­marque-t-on sur un ton acerbe, que les Suisses aussi ont dû, pen­dant des siècles, quit­ter leurs val­lées arides et par­tir au loin en quête de pain? Eux aussi, ajoute-t-on, ont été un jour les Ita­liens ou les Al­ba­nais des autres.

Après cette es­quisse de la si­tua­tion, j’en re­viens à ma co­lère du Nou­vel-An 1970. La radio, les jour­naux, les tracts qu’on nous don­nait dans la rue, ceux qu’on nous en­voyait par la poste, mar­te­laient le mes­sage de James Schwar­zen­bach et de son Ac­tion na­tio­nale. Cha­cun de nous, Suisses et non-Suisses, connais­sait quel­qu’un qui au­rait dû quit­ter le pays si l’ini­tia­tive avait été ac­cep­tée, et à ce mo­ment-là il n’était pas du tout évident qu’elle ne pas­se­rait pas. Certes (voir An­nexes), elle a été re­je­tée, mais 46 % des vo­tants, avec une par­ti­ci­pa­tion de plus de 70 % des élec­teurs (les femmes n’avaient pas en­core le droit de vote), l’ont ac­cep­tée. À lire le ma­té­riel de pro­pa­gande de l’Ac­tion na­tio­nale (qui al­lait chan­ger son nom quelques an­nées plus tard en Dé­mo­crates suisses), on est frappé par les res­sem­blances avec ce que disent ou écrivent au­jour­d’hui cer­tains membres de l’UDC. Ce sont eux qui ont ra­mené le sou­ve­nir de la co­lère de l’époque.

La ré­édi­tion

De­puis quelque temps, les lec­teurs les plus di­vers me de­mandent ce qu’est de­ve­nue La Ver­mine.

«Ce se­rait peut-être un livre pour la si­tua­tion pré­sente», m’a-t-on dit de plus en plus sou­vent. J’ai fini par fouiller dans mes ar­chives, par re­trou­ver un exem­plaire de l’édi­tion ori­gi­nale. Je l’ai relu. J’ai été éton­née de consta­ter à quel point cette fable était ac­tuelle. Il suffirait de chan­ger quelques ex­pres­sions au­jour­d’hui de­ve­nues moins com­pré­hen­sibles. De nos jours, les «Al­ba­nais», les Arabes, les Chi­nois, les In­diens, etc., etc., ce ne sont plus les Ita­liens, qui ne consti­tuent dé­sor­mais qu’une forte mi­no­rité, lar­ge­ment ac­cep­tée, et dont les deuxième et troi­sième gé­né­ra­tions connaissent en­core tout juste leurs ori­gines. Mais ce qui est dit de «l’autre» par les te­nants d’une cer­taine men­ta­lité po­li­tique n’a pas changé. L’Union dé­mo­cra­tique du centre (UDC) n’exis­tait pas en­core en 1970, elle n’est née que quelques an­nées plus tard, mais il est pra­ti­que­ment cer­tain qu’elle a re­cruté dans les rangs des 46 % de Suisses qui avaient ac­cepté l’Ini­tia­tive sur la sur­po­pu­la­tion étran­gère. Les idées n’ont pas changé – seule la cible est dif­fé­rente.

Le dis­cours po­li­tique ac­tuel et ses aléas mettent en évi­dence que, presque deux gé­né­ra­tions plus tard, nous dis­tin­guons en­core parmi nous des «mou­tons noirs» que nous ren­dons res­pon­sables de tous les maux, et qu’une po­li­tique po­pu­liste uti­lise pour faire peur et pour pou­voir dire: votez pour «nous»; nous vous pro­té­ge­rons contre «eux». Le dis­cours même que te­nait, il y a plus de trente-cinq ans, «Jacques Bo­lo­met».

***

La Ver­mine a été écrite en quelques se­maines. L’idée a surgi vers fin 1969, le livre étant en vente en avril 1970. Il s’agis­sait en effet de le dis­tri­buer lar­ge­ment avant la vo­ta­tion, pour qu’il soit utile.

Nous étions tous trop oc­cu­pés pour figno­ler le texte: il n’y a donc eu aucun lec­to­rat, ni pour le style, ni même, si j’en juge par l’état du texte que j’ai ré­cu­péré, pour?l’or­tho­graphe. Il a sans doute été relu après la com­po­si­tion, mais à la va-vite.

Pour cette ré­édi­tion, j’ai donc fait le tra­vail de lec­to­rat qui a man­qué la fois pré­cé­dente: j’ai sup­primé les mal­adresses, les ita­lia­nismes (en­core très nom­breux chez moi à l’époque), les ré­pé­ti­tions, j’ai changé quelques termes afin de les rendre clairs pour ceux qui les avaient ou­bliés ou ja­mais connus plu­tôt que de mettre des notes en bas de page (ir­ri­tantes dans un roman). Mais je n’ai pas tou­ché à l’his­toire, qui reste telle qu’elle était à l’ori­gine.

La dif­fé­rence la plus no­table entre 1970 et au­jour?d’hui, c’est sans doute qu’il se­rait pour ainsi dire im­pos­sible à Jacques Bo­lo­met, à notre époque de com­mu­ni­ca­tion uni­ver­selle ins­tan­ta­née, d’igno­rer des évé­ne­ments qui se­couent toute l’Eu­rope, même en étant au fin fond de la Si­bé­rie.

***

Le deuxième rabat de cou­ver­ture de l’ori­gi­nal an­nonce la cou­leur:

«La Ver­mine ne veut pas être un “ acte lit­té­raire ”. Certes, le récit em­prunte à la lit­té­ra­ture sa forme ro­ma­nesque. {…} Ce­pen­dant, il s’agit ici avant tout d’une contri­bu­tion – d’écri­vain certes – à la lutte an­tixé­no­phobe qu’une par­tie de l’opi­nion suisse mène ac­tuel­le­ment.»

Le livre a été vendu à la fois dans les li­brai­ries et au coin des rues, de façon mi­li­tante. Je ne me sou­viens plus exac­te­ment du ti­rage: plu­sieurs mil­liers d’exem­plaires, en tout cas, qui ont été ra­pi­de­ment épui­sés. Il a paru en feuille­ton dans le pé­rio­dique Emi­gra­zione ita­liana. Deux ci­néastes (Pierre Ni­cole et Willi Her­mann) ont tenté d’en faire un film, mais n’ont pas réussi à finan­cer leur en­tre­prise. J’avais fait la connais­sance de Max Frisch lors de la fronde des écri­vains et j’avais sol­li­cité son au­to­ri­sa­tion de citer un pas­sage de Mon­sieur Bon­homme et les in­cen­diaires. Avant de me la don­ner, il avait voulu lire le ma­nus­crit, qui lui avait plu: il avait dé­crété qu’il au­rait fallu en faire un texte dra­ma­tique, au­quel il al­lait «réfléchir». On en a pas mal dis­cuté par la suite, mais cela non plus, ne s’est pas fait.

Pen­dant toutes ces an­nées, il s’est ré­gu­liè­re­ment trouvé des lec­teurs pour me par­ler de La Ver­mine, et ce sont ces lec­teurs qui m’ont en­cou­ra­gée à ré­édi­ter ce petit roman.

Ce n’est pas avec plai­sir que je l’ai remis en forme, plus de trente-cinq ans après sa pre­mière pa­ru­tion. J’au­rais pré­féré que l’état du monde le rende in­utile, et même qu’il per­mette qu’on l’ou­blie 1.

An­nexes

Ini­tia­tive po­pu­laire fé­dé­rale «contre l’em­prise étran­gère»

La Consti­tu­tion de la Confé­dé­ra­tion du 29 mai 1874 est com­plé­tée comme il suit:

Ar­ticle 69 qua­ter

I

  • La Confé­dé­ra­tion prend des me­sures contre l’em­prise dé­mo­gra­phique ou éco­no­mique étran­gère en Suisse.
  • Le Conseil fé­dé­ral veille à ce que dans chaque can­ton, Ge­nève ex­cepté, le nombre des étran­gers ne soit pas su­pé­rieur à 10 pour cent des ci­toyens suisses dé­nom­brés lors du der­nier re­cen­se­ment. Pour le can­ton de Ge­nève, la pro­por­tion ad­mise est de 25 pour cent.
  • Dans le compte des étran­gers, selon le pré­sent ar­ticle, lettre b, ne sont pas pris en consi­dé­ra­tion et tou­chés par les me­sures contre la sur­po­pu­la­tion: les sai­son­niers (qui ne de­meurent pas plus de 9 mois par an en Suisse, et y viennent sans fa­mille), les fron­ta­liers, les étu­diants de degré uni­ver­si­taire, les tou­ristes, les fonc­tion­naires d’or­ga­ni­sa­tions in­ter­na­tio­nales, les membres des dé­lé­ga­tions di­plo­ma­tiques et consu­laires, les hommes de sciences et les ar­tistes ayant des qualifica­tions par­ti­cu­lières, les re­trai­tés, les ma­lades et per­sonnes en conva­les­cence ou en trai­te­ment, le per­son­nel d’hô­pi­tal, le per­son­nel d’or­ga­ni­sa­tions de cha­rité ou ec­clé­sias­tiques in­ter­na­tio­nales.
  • Le Conseil fé­dé­ral veille à ce qu’au­cun ci­toyen suisse ne soit congé­dié en rai­son des me­sures de res­tric­tion ou de ra­tio­na­li­sa­tion, aussi long­temps que des étran­gers, de la même ca­té­go­rie pro­fes­sion­nelle, tra­vaillent dans la même ex­ploi­ta­tion.
  • Le Conseil fé­dé­ral ne peut uti­li­ser la na­tu­ra­li­sa­tion comme me­sure de lutte contre la sur­po­pu­la­tion étran­gère qu’en dé­ci­dant que les en­fants de pa­rents étran­gers sont ci­toyens suisses dès leur nais­sance, quand leur mère est d’ori­gine suisse, et les pa­rents do­mi­ci­liés en Suisse au mo­ment de la nais­sance (cf. art. 44, 3e al.).

II

  • L’ar­ticle 69 qua­ter entre en vi­gueur im­mé­dia­te­ment après son ac­cep­ta­tion par le peuple et les can­tons, et l’ar­rêté de va­li­da­tion de l’As­sem­blée fé­dé­rale.
  • Pour les me­sures pré­vues au chiffre I, b, la ré­duc­tion doit être réa­li­sée dans le délai de 4 ans dès l’ar­rêté de va­li­da­tion de l’As­sem­blée fé­dé­rale.

© Ber­nard Cam­piche édi­teur, CH 1350 Orbe (Suisse) «La Ver­mine», édi­tion revue et cor­ri­gée par l’au­teur, a été réa­lisé par Ber­nard Cam­piche avec la col­la­bo­ra­tion de Ma­rie-Claude Schoen­dorff, Da­niela Spring et Julie Weid­mann. Pho­to­gra­phie de cou­ver­ture: Ma­rie-France Zur­lin­den.

12 com­men­taires
1)
Oka­zou
, le 10.08.2008 à 06:33

Merci pour ce roman fiè­re­ment po­li­tique et pour sa post­face qui nous éclaire sur le rejet de l’autre en Suisse alé­ma­nique, en continu, des an­nées 70 (com­ment la Suisse a-t-elle vécu les évé­ne­ments de 1968 et in­té­gré ses va­leurs ?) à nos jours avec la fu­neste UDC.

Ces 46 % de Suisses si exem­plaires (et leurs re­je­tons de l’UDC), si fiers de se pen­ser tels qu’ils se rêvent : polis, propres, re­li­gieux, neutres, fiables, mo­destes, ponc­tuels, éco­nomes, tra­vailleurs, hon­nêtes, et qui ne sont, de fait , bien loin de leur dé­lire d’auto-re­pré­sen­ta­tion, que des bar­bares ac­cou­trés d’un ver­nis de ci­vi­lité, ces gens per­sua­dés de re­pré­sen­ter le nec plus ultra de la so­ciété des hommes n’ont pour­tant pas même at­teint le degré de ci­vi­li­sa­tion des pre­mières peu­plades pri­mi­tives qui, elles, ont ap­pris bien vite qu’ac­cueillir l’autre est une rai­son, une force et une di­gnité. Sans quoi nous ne se­rions tout sim­ple­ment pas là.

On voit que le pro­gramme de l’UDC est cou­sin du sarko-le­pè­nisme am­biant chez nous, quand il ne le dé­passe pas sur sa droite, ce qui est un comble.

En effet, au­jour­d’hui même, et jus­qu’à 2011, la plate-forme élec­to­rale de l’UDC af­fiche ses ob­jec­tifs : L’UDC « de­mande le ren­for­ce­ment de la libre ex­pres­sion des opi­nions par la sup­pres­sion de la norme pé­nale contre le ra­cisme ainsi que la dis­so­lu­tion de la Com­mis­sion fé­dé­rale contre le ra­cisme. » Comme si le ra­cisme, ce crime contre l’hu­ma­nité (le pire puisque le refus de l’autre c’est le refus de l’homme, le refus de soi), pou­vait consti­tuer une opi­nion.

Bras­sens chan­tait « ces im­bé­ciles qui sont nés quelque part » et qui ne se rendent pas compte que la qua­lité dont ils se targuent d’être, en l’oc­cu­rence nés-na­tifs de Suisse, n’est en rien leur mé­rite et qu’être né ailleurs n’est en rien une tare. Ça leur échappe, à ces fruits blets du ha­sard qu’on ap­pelle des na­tio­na­listes, que quand on a la chance de venir au jour dans un pays pourvu de tout, un de ces rares pays de la pla­nète où le nou­veau-né est presque as­suré d’un ave­nir sou­riant, on doit faire son mo­deste. C’est de la po­li­tesse, de l’élé­gance, c’est rendre jus­tice et ser­vice au monde que de tendre la main à son pro­chain quand il est dans la dif­fi­culté. Une fierté mal pla­cée, illé­gi­time, abu­sive, ha­bite le na­tio­na­liste qui a chassé tout sen­ti­ment d’hu­mi­lité de ses propres va­leurs. Le na­tio­na­liste est ainsi fait qu’il prend ses tares pour des va­leurs.

Merci donc, Anne, d’être en­core et tou­jours sur la brèche. Tu n’es pas seule. Nous ne sommes pas seuls.

2)
LC475
, le 10.08.2008 à 09:37

Merci pour ces ex­pli­ca­tions ainsi que ces rap­pels his­to­riques qui res­tent mal­heu­reu­se­ment d’ac­tua­lité.

PS : N’y au­rait-il pas des “1” in­trus qui se se­raient glis­sés dans le texte ?

3)
Gr@g
, le 10.08.2008 à 10:02

merci pour cette post­face, qui me per­met de réa­li­ser ce qu’était une par­tie de la réa­lité so­ciale de ces an­nées (que du coup, je vais moins idéa­li­ser)…

4)
Anne Cuneo
, le 10.08.2008 à 10:41

Les 1 et les 2 mal­en­con­treux se ré­fèrent à des notes dont je n’avais pas re­mar­qué qu’elles n’avaient pas passé dans la mise en page. Ce sont les ré­fé­rences des ci­ta­tions, pas très im­por­tantes au fond, c’était plus par souci d’exac­ti­tude qu’autre chose.

5)
Anne Cuneo
, le 10.08.2008 à 10:46

Chers amis,

Je vous in­forme que: a) Fran­çois étant d’ac­cord, b) Ber­nard Cam­piche (mon édi­teur) étant d’ac­cord c) le son­dage ayant in­di­qué que 86 % des per­sonnes qui ont ré­pondu sont fa­vo­rable à l’idée du feuille­ton do­mi­ni­cal, ledit feuille­ton conti­nue.

Il n’y aura rien di­manche pro­chain.

Mais dès le di­manche sui­vant, je met­trai en ligne la pre­mière aven­ture de mon en­quê­teuse Marie Ma­chia­velli, Ame de Bronze. Le livre étant consti­tué de 14 ou 15 cha­pitres de lon­gueur égale, vous aurez droit à un cha­pitre par di­manche.

Et si au bout de quelques cha­pitres cer­tains d’entre vous sou­haitent une lec­ture pa­pier, je rap­pelle que tous ces livres existent, et qu’on peut les ache­ter di­rec­te­ment par in­ter­net chez Ber­nard Cam­piche ou, du moins en Suisse, dans les li­brai­ries.

Merci de votre en­thou­siasme – et à bien­tôt pour de nou­velles aven­tures.

6)
Fran­çois Cuneo
, le 10.08.2008 à 11:09

Bon, ben selon, j’es­père que je serai prêt avec le pre­mier cha­pitre dans deux se­maines hein…:-)

C’est une très bonne idée, le cha­pitre par di­manche.

Merci à Ber­nard d’ac­cep­ter.

7)
fx­prod
, le 10.08.2008 à 11:11

Mais dès le di­manche sui­vant, je met­trai en ligne la pre­mière aven­ture de mon en­quê­teuse Marie Ma­chia­velli, Ame de Bronze. Le livre étant consti­tué de 14 ou 15 cha­pitres de lon­gueur égale, vous aurez droit à un cha­pitre par di­manche.

Voilà une idée qu’elle est bonne, Merci Anne de nous faire par­ta­ger un peu de ton uni­vers.

8)
LC475
, le 10.08.2008 à 11:17

Bonnne nou­velle ;)

9)
zit
, le 10.08.2008 à 11:54

Super !

Merci Anne, Fran­çois et Ber­nard, vi­ve­ment di­manche dans deux se­maines…

Je sens que ça va me don­ner envie de pas­ser com­mande chez un li­braire, ça…

Sinon, on sent bien le “coup de pouce” de Kafka, quand ça de­vient bi­zarre…

z (en­core merci cuk, et vive la lec­ture, je ré­pêêêêêêête : en ce mo­ment, je me dé­tends avec Terry Prat­chett, MDR ;o)

10)
mff
, le 10.08.2008 à 16:23

Belle idée Chouette, Chouette, Chouette, Chouette, Chouette, Chouette, Chouette, Chouette,

Merci :)

11)
Sa­luki
, le 10.08.2008 à 17:55

Voilà une idée qu’elle est bonne !

Peut-être bien que Marie Ma­chia­velli roule en Alfa ;°)

Merci 1001 fois Anne de cette conti­bu­tion à rendre l’at­tente des d!manches fé­brile. Per­sonne ne pourra plus chan­ter la chan­son/goua­lante de Ju­liette Gréco

12)
Emi­lou
, le 11.08.2008 à 10:01

La Suisse Alé­ma­nique n’a pas, hélas, le mo­no­pole de ce ra­cisme larvé à l’en­contre des émi­grants ita­liens. J’ai connu dans ma jeu­nesse en Bel­gique ce mé­pris cho­quant qu’avait le « bon « belge en­vers les mi­neurs ita­liens qui soit dit en pas­sant ve­naient faire le tra­vail, à la de­mande de notre gou­ver­ne­ment, que bon nombre de tra­vailleurs in­di­gènes ju­geaient trop dan­ge­reux. Nous n’avons pas connu de mort d’homme, mais la dé­marche était la même. Le vo­cable « ma­ca­roni » qui pour­rait pa­raître main­te­nant ano­din ne fai­sait que tra­duire les peurs, peut être, mais sur­tout le dé­dain, l’ar­ro­gance aussi de cer­tains « pe­tits » belges. Je me sou­viens de ces ba­ra­que­ments in­dignes da­tant de la guerre 40-45 (quar­tier du pope di­sait-on à l’époque) où l’on en­tas­sait les mi­neurs ita­liens, je me sou­viens de l’in­di­gna­tion de mes pa­rents en­vers le trai­te­ment inique in­fligé à cette main d’œuvre qui par­ti­ci­pait ac­ti­ve­ment à l’es­sor de la Wal­lo­nie. La culture ita­lienne était pour­tant proche de la nôtre, la plus proche qui soit, comme cha­cun le sait ! Le re­make ac­tuel à l’en­contre de l’arabe pour­rait s’ex­pli­quer par la crainte d’une culture si dif­fé­rente de la nôtre qui pour­rait la sup­plan­ter. L’ex­pé­rience de l’émi­gra­tion ita­lienne prouve le contraire. La peur de l’étran­ger ne fait aucun tris ! Dieu merci le temps a aplani cer­tains à priori , l’émi­gré ita­lien a conquis ses lettres de no­blesse en Bel­gique, des Adamo, Claude Bar­zotti, Fré­dé­rique Fran­çois, des mi­nistres même d’ori­gine ita­lienne font par­tie du pa­tri­moine belge. Al­lons tout n’est pas perdu, mais pour­quoi faut-il tant d’an­nées pour que les in­tel­li­gences se ré­veillent afin de se dé­bar­ras­ser de cette dé­viance de l’es­prit qu’est le ra­cisme. Il fau­dra at­tendre que des noms de chan­teurs soient de conso­nances arabes pour que mon pays se gué­risse de ses nou­velles in­quié­tudes Des hommes po­li­tiques por­tant des noms arabes fleu­rissent chez nous, c’est déjà bon signe. Foin d’op­ti­misme béat, la xé­no­pho­bie a en­core de beaux jours de­vant elle, à croire qu’elle fait par­tie in­té­grante de l’âme hu­maine, mais si, n’ayons pas peur des mots, elle en fait bien par­tie….je me de­mande même si cer­tain y échappe.