Vous pensiez peut-être que je vous avais laissé tomber, mais il n'en était rien. J'ai même envie de vous faire partager ce que je vis depuis plusieurs mois, et qui absorbe tout mon temps libre. J'ai écrit sur commande une pièce pour une troupe de la Vallée de Joux, le Clédar (un clédar, c'est une barrière à claire-voie, comme on en emploie pour fermer les pâturages). Pour nos amis d'outre-frontière, la Vallée de Joux se trouve dans le canton de Vaud, dans la chaîne de montagne du Jura, à un jet de pierre de la frontière française. L'hospitalité des habitants de la Vallée de Joux, les Combiers (de combe, ou vallée), est aussi proverbiale que la beauté de cette vallée, et en Suisse elle est connue car ils sont nombreux à y être venus en vacances. Pour ceux qui ont passé chez François Cuneo, ce n'est pas très loin de Bofflens (moins d'une demi-heure de train pour arriver au col qui y amène, et quelques minutes en voiture). Il y aurait beaucoup de choses à dire de la Vallée de Joux, de ses horlogers aux noms illustres (Audemars, Piguet, LeCoultre, Jaeger, Meylan et j'en passe), de ses lacs et de ses pistes de ski de fond, mais pour aujourd'hui je m'en tiendrai à mon propos, qui est de vous parler de la compagnie du Clédar.
Le Théâtre d'Été
Je l'ai dit plus haut, le Clédar m'a demandé d'écrire pour lui une pièce inédite sur un thème qu'il avait choisi: Shakespeare. Si c'est moi qu'on avait sollicitée, c'est parce que j'avais fait des recherches approfondies sur l'époque élisabéthaine pour écrire deux livres, et que cela se savait (forcément, les livres ayant paru). Mais le Clédar n'en est pas resté là. Il n'y a pas de théâtre à la Vallée de Joux, mais cela fait 20 ans que la troupe monte des spectacles d'été, et cela ne l'a jamais découragée - elle a toujours créé elle-même ses lieux théâtraux. Cette année, elle a fait particulièrement fort: elle a créé et construit elle-même un théâtre d'inspiration élisabéthaine. La scène et l'acoustique sont celles du Globe de Shakespeare, tel qu'il a été reconstruit à Londres.
Tout a commencé ici, au Globe de Londres
Vu le climat, plus inclément dans le Jura qu'aux bords de la Tamise, le théâtre élisabéthain de la Vallée de Joux est couvert. Il est entièrement en bois, et le bois vient des forêts environnantes. Il a été abattu en automne, a séché pendant l'hiver et la construction a commencé au printemps.
Le bois qui a servi à faire le théâtre provient d'arbres de la région,
abattus tout exprès en tenant compte de la lune. Les forêts du Risou
sont célèbres: on se sert de leurs arbres aussi pour faire des violons.
Il a été créé par un ingénieur et un maître charpentier, et construit avec l'aide des comédiens et de beaucoup de bénévoles. L'aventure de cette construction est racontée sur le site de la troupe: www.cledar.ch Tout le monde travaille frénétiquement depuis plus d'un an, et le spectacle est sur le point de commencer. Je ne vais pas vous en parler, parce que je suis juge et partie, je vais laisser ça, éventuellement, à un des spectateurs-contributeurs de Cuk.ch. Je vous dirai simplement que l'histoire que le Clédar a voulue est une fantaisie dans laquelle on expose une hypothèse sur la manière dont Shakespeare pourrait avoir écrit Hamlet, la pièce la plus jouée au monde, dont c'est, entre l'année dernière et cette année, le 400e anniversaire. Je termine cette humeur par quelques photos pour vous donner une idée de l'avancement des travaux. Cela a commencé par des répétitions comme ça.
Michel Toman, l'un des deux metteurs en scène
Sophie Gardaz et Michel Toman, metteurs en scène
Photo Photo © Yvain Genevay parue dans le Matin
Michel Toman, un des deux metteurs en scène, le deuxième étant Sophie Gardaz, donne des indications: cela se passait dans une salle polyvalente. Cette salle s'est vite transformée en ruche.
Répétitions, costumes, maquillage. Toutes les heures libres de tout le monde ont été occupées par la préparation du spectacle. Et puis, un beau jour, on a pu sortir de la salle polyvalente pour une première répétition dans le théâtre, encore en pleine construction. Comme c'étaient en bonne partie les mêmes qui construisaient et qui répétaient, le théâtre a été la deuxième ruche où l'on travaillait.
Le théâtre est à moitié fini, mais on y répète déjà
Le spectacle
Aujourd'hui, le théâtre est terminé, les costumes sont portés, les maquillages sont déterminés, la musique est prête à être jouée. Alors pour ceux d'entre vous qui passent pas loin, du 17 août au 10 septembre, vous pouvez aller voir le travail étonnant d'une bande de fous de théâtre qui s'appellent Clédar - ils vous ouvrent tout grand leur barrière à claire-voie.
Les premières photos su spectacle ( filage, la première ayant eu lieu hier soir), c'est ici!
, le 18.08.2005 à 00:24
Franchement, chapeau ! Je suis étudiante en littérature médiévale anglaise, et je dois dire que je trouve très impressionant tout ce travail de recherches / création. En plus, je ne connaissais de vous que ce qu’on m’avait forcé à lire au collège, et ce n’est jamais une bonne méthode pour que j’aie envie de lire ! Vos articles sur cuk m’ont… réconciliée avec vos textes.
, le 18.08.2005 à 07:35
Merci pour ce compte-rendu Anne !
Le monde est petit ! (bon, c’est vrai aussi que je n’habite pas si loin de « La Vallée », dans nos contrées, les nouvelles vont très vite :-) ; je savais donc depuis un bon moment que tu étais « l’instigatrice » du texte de La naissance d’Hamlet, une fantaisie, et du projet qui en découlait…
Je suis donc (de loin) ton-votre projet par personnes interposées: un des concepteurs du théâtre, Marc Jeannet… (qui m’a aidé à faire ma maison, il y a 15 ans) et Jean-Marc Cloux sont des amis… Je suis aussi un « admirateur » du Clédar (j’ai vu presque tous leurs spectacles).
J’ai justement reçu hier le dépliant-brochure A4 ventant le spectacle… Alors à bientôt !
, le 18.08.2005 à 13:15
Les sapins du Risou, on s’en sert aussi pour faire des bateaux, des boîtes à fromage et des … cercueils !
Impressionnantes, les images du théâtre. Si le reste est à l’avenant,
ce sera un beau spectacle !