Enfant, je dévorais les histoires de superhéros. Strange, Spécial Strange, Spidey, Nova : autant de revues publiées alors par les éditions Lug et qui ont largement contribué à forger mon imaginaire. J’adorais également Tintin ou Astérix, mais les superhéros apportaient une dimension feuilletonnante et proposaient un univers partagé où L’Araignée pouvait croiser les X-Men ou bien Iron-Man, tout ça me ravissait.
Parmi ces personnages, les X-Men ont toujours eu une place particulière pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il en existait deux versions qui étaient publiées simultanément, les anciens X-Men dans Spidey étaient des rééditions et présentaient des héros débutants. Les nouveaux X-Men paraissaient dans Spécial Strange et étaient déjà des adultes bien plus sûrs d’eux et dont les histoires allaient prendre une ampleur qui obsèderait littéralement mon enfance, mon adolescence et reste aujourd’hui encore dans mon panthéon personnel.
Mais au fait, qui sont donc ces X-Men ? Dans l’univers Marvel, on distingue trois types de héros : les héros sans pouvoirs, ceux dont les pouvoirs sont acquis et ceux dont les pouvoirs sont innés et apparaissent à l’adolescence. Les X-men sont de cette dernière catégorie qu’on appelle les mutants. Ils se retrouvent dans l’école du professeur Xavier, où ils apprennent à maîtriser leurs capacités, protégés d’un monde qui les craint.
Nous allons nous intéresser aujourd’hui aux nouveaux X-Men, écrits par Chris Claremont et dessinés par John Byrne, lui-même assisté de Terry Austin à l’encrage. Nous sommes aux environ du Spécial Strange 17... La vie des personnages a déjà connu des soubresauts importants, notamment lorsque Jean Grey, membre fondateur de l’équipe, a hérité de pouvoirs cosmiques et est devenu Phénix, un des personnages les plus puissants de l’univers. Au moment où je prends en route les aventures des personnages, ceux-ci ont été enlevés et sont devenus des bêtes de cirque. Un ancien membre de l’équipe les retrouve et c’est l’occasion pour moi de faire la connaissance de ces nouveaux X-Men dont je ne connais que les plus anciens qui restent : Cyclope et Jean Grey, sa petite amie si puissante. Et là, c’est un feu d’artifice, un homme qui se transforme en acier, une femme qui commande à l’orage, un diable bleu et un personnage enchaîné qui répond au nom de Serval. Toute cette troupe va se libérer (évidemment) pour tomber régulièrement de Charybde en Scylla.
L’équipe va se retrouver séparer et pendant que Cyclope et le gros de la troupe se retrouve chez des dinosaures. Les 2 autres X-Men les croyant morts, ils vont tenter de réapprendre à vivre. Il faudra un certain temps pour que tout le monde se retrouve et pendant ce temps, Jean se retrouvera peu à peu sous la coupe d’un maître de l’illusion qui la manipule pour la transformer en Reine Noire du club des damnés.
Les X-Men triompheront pour constater que Jean est corrompue par son pouvoir et devient le Phénix noir, entité folle qui part dans l’espace et détruit volontairement un soleil, provoquant la mort des planètes satellites avec leurs populations.
Bien sûr, les X-Men ramèneront Jean à la raison, mais juste au moment où tout ce petit monde est enlevé par des extra-terrestres qui veulent condamner le Phénix à mort. Pour leur amie, les héros acceptent un duel contre une autre équipe de héros. Et là débute Spécial Strange 33... Mon monde ne serait plus jamais le même après ça. Du haut de mes 9 ans, j’en eus tout de suite la certitude.
Depuis Spider-Man et les 4 fantastiques, les comics Marvel ont toujours eu une tendance au soap opéra et à la surdramatisation des enjeux. Tout ceci peut paraître péjoratif, pourtant, jamais des personnages de papiers ne m’avaient paru si humains, chaque personnage (et ils sont nombreux) avait une profondeur qui magnifiait leur héroïsme : chacun mesurait ce qu’il avait à perdre et choisissait tout de même le sacrifice. L’héroïsme quoi !
Dans ce fameux épisode, chaque personnage mettait en balance son amitié pour Phénix, la nécessité ou non d’un procès, la question de la peine de mort et le fait que leur équipière avait tué des millions de gens.
Enfin le duel commença sur la lune. Duel assez largement perdu jusqu’au réveil de Phénix. Et là... L’impensable ! Se rendant compte que son pouvoir la corrompt petit à petit, Jean explique à Cyclope qu’elle doit mourir et choisit de se suicider. J’avais 9 ans, j’en ai 42 aujourd’hui et j’en frissonne encore (l’hypothèse que je sois resté un grand enfant est exclue bien sûr :-)
Chris Claremont, le scénariste, restera 17 ans sur le titre et réussira à maintenir un niveau de qualité globale constant, ponctuant son passage d’autres moments mémorables. La notoriété des X-Men lui doit tout. Quant à John Byrne, il signera de son côté plusieurs bandes importantes des comics grand public (notamment les 4 fantastiques ou bien encore Superman pour la concurrence).
Après le départ de Claremont en 1991, les X-Men vivront encore des aventures, dont certaines assez plaisantes, mais ils auront perdu leur voix, une humanité et une cohérence après laquelle tout le monde court depuis. Les intrigues tourneront plus autour de quelques personnages, laissant aux autres un rôle de figurants. Chez Claremont, tout le monde vivait. Le scénariste a tenté plusieurs retours, mais la greffe chez les lecteurs n’a plus repris... Ce que je regrette personnellement.
Ces épisodes, notamment le Spécial Strange 33, sont une sorte d’îlot vers lequel le reviens régulièrement me ressourcer... Mes enfants me prennent pour un fou, mais tant pis, j’assume...
, le 03.10.2016 à 09:13
Oula! Le bond en enfance! D’une année plus jeune, j’ai découvert les x-men à peu près juste après l’épisode du suicide de Jean. Mes compagnons ont été Kitty, Colossus, Serval, Diablo, Tornade et Malicia!!!
Les X-men m’ont fait comprendre les thèmes de la difference, du racisme, et également de la complexité humaine. Les différences de vues entre Charles Xavier et Magneto sont une telle parabole des différentes manières de défendre une même posture de départ: l’acceptation des mutants. Les deux prenant des options radicalement différentes, dues à leurs parcours: l’un souhaite une société tolérante ou tout le monde pourrait vivre ensemble malgré les différences, et l’autre veut asseoir une suprematie…
Vers 20 ans, j’ai revendu toute ma collection de magazines pour faire de la place dans la bibliothèque… je le regrette aujourd’hui, tant j’aimerai parfois replonger dedans, surtout que la mode des films nous fait replonger dedans avec nostalgie.
D’ailleurs, que penses-tu des films?
Pour ma part, je trouve que les acteurs sont plutôt bien choisis jusqu’à maintenant et que les typologies sont globalement bien respectés malgré le nombre de raccourcis et de libertés pris avec les comics.
, le 03.10.2016 à 12:43
Les films sont des adaptations assez fines, si on excepte le traitement qu’on a infligé à Cyclope… L’évolution de Magneto a été une des grandes réussites de la BD, j’y reviendrai sans doute.
, le 03.10.2016 à 13:44
Merci pour cette évocation qui parle également à l’enfant que j’étais et que je suis toujours…
Si les personnages et les histoires étaient effectivement d’une grande richesse, j’ai toujours pour ma part été complètement perdu par la multiplicité des publications.
Entre Strange, Nova, Spidey et j’en passe, il était difficile pour un enfant des années 80 de s’y retrouver. On ne savait pas trop où était la cohérence. On pouvait avoir l’impression de voir un personnage mourir dans Nova, et puis réapparaitre dans Strange, c’était un peu le bazar, surtout quand, comme moi, on achetait ces magazines de manière irrégulière.
Mais en dehors de ça c’était un univers passionnant. Je remonte régulièrement dans le grenier de mes parents pour tourner les pages écornées de mes vieux Strange.
, le 03.10.2016 à 14:10
Parfois difficile de suivre toutes les évolutions ou refontes. Arstechnica a fait un rappel de ceci pour l’univers DC (Superman et autres)
, le 03.10.2016 à 16:39
iVince, c’est vrai, j’ai passé mon enfance à reconstituer les histoires, j’avais plein de trous et souvent je lisais la fin et seulement des années après le début.
, le 03.10.2016 à 16:40
Merci Jaxom, voilà un lien bien intéressant !
, le 03.10.2016 à 16:48
Merci pour cette piqure de rappel
Il est intéressant de voir l’évolution de ce genre de bandes dessinées. Très décriées pendant des années et considérées comme une lecture pour ado attardé, cela a pris quelques lettres de noblesse au cours des dernières années
Pour ceux que cela intéresse, ARTE (oui oui ARTE la chaine dite culturelle) avait fait une très bonne émission sur ce thème et d’ailleurs la VOD (et le CD) est disponible (non je ne touche rien)
D’autre part, il faut voir le culte fait à Stan Lee (créateur de spider man entre autres) en ce moment. Il n’y a pas un film traitant de Marvel sans qu’il ne soit la quelques secondes en special guest et son personnage est devenu emblématique dans tous les jeux Lego basés sur Marvel.
Néamoins, comme l’a soulignée ivince, le foisonnement des journaux, des mondes parallèles rendait souvent le fils des aventures très difficile à suivre.
C’est vrai que les films ont, légèrement, simplifié cela mais quand même, un bon Black et Mortimer (ancienne génération) avec Olrik avait quand même ma préférence et rien ne vaudra un bon Franquin mais cela n’est pas la même école.
, le 03.10.2016 à 18:31
C’est bizarre.
Je n’ai jamais croché à cette littérature des superhéros.
Et pourtant j’adore la BD.
Mais je me rends compte que je n’ai jamais croché aux films non plus…
Je dois être trop terre à terre…
, le 04.10.2016 à 11:05
Moi j’ai été et suis encore fan de super-héro Marvel zé autres, j’étais acro à diverses BD (mais moins à cheval sur le détails que toi), de plus dans mon enfance je suivais à la TV tout ce qui était possible dans le genre super-héros (comme les feuilletons de Batman / dans les 60’s).
Aujourd’hui, j’ai liquidé les BD et n’en ai plus acheté depuis bien longtemps … Par contre en mode films je suis encore fan de tous les X-MEN, mais beaucoup moins des autres (Captain America, Thor, etc…) à part une mention spéciale pour les 2 premiers Spiderman (très réussis à mon gout)
, le 10.10.2016 à 09:54
Merci pour cette plongée 30 ans en arrière.
J’ai pour ma part conservé ma collection que j’ai donnée à mon dernier de 17 ans.
Il adore et surtout se rend compte combien il y avait, tant dans les graphismes que dans les textes, une réalité et une humanité que les BD d’aujourd’hui ignorent.
Il est vrai aussi malgré un suivi attentif de toutes les sorties de ces BD à l’époque que j’ai eu du mal tant pour l’univers DC que Marvel à suivre les mondes parallèles et autres cross-over (Superman dans le monde de Kamandi…).
Super ton article !
Merci encore