Intro
J’ai eu l’occasion de l’exprimer à l’occasion de cet article, je ne suis pas fan d’art contemporain. Pourtant j’habite dans LE quartier genevois des galeries contemporaines, le Quartier des Bains. Et même si j’ai très souvent une grande difficulté à ressentir une émotion artistique lorsque je passe devant ces vitrines, je souhaite garder l’esprit ouvert. Dans un souci de cohérence avec ce que j’ai eu l’occasion, Toikimeli, de te partager ici à propos de ma vision du beau, de l’objectif, je m’efforce de ne pas condamner, de ne pas juger. Mais bon. Des fois, j’en pense pas moins!
Passage, repassage et dépassement (de préjugés)
C’était un jour comme les autres, je me rendais au travail. Comme il était tôt le matin, les vitrines illuminées attiraient mon regard, et celles des galeries plus particulièrement. Mais ce regard était volontiers critique, genre “non mais c’est quoi ces machins j’ai beau avoir l’esprit ouvert là ça passe pas et j’aime mieux pas connaître le prix ça me foutra des boutons”. Tu vois? Ah toi aussi? C’est bien la preuve, non?
Passant devant une de ces galeries, j’ai aperçu une grande toile carrée, sur le mur perpendiculaire au trottoir, toile d’une seule couleur, sauf une bande de quelques centimètres tout autour, comme un cadre, mais peinte sur la toile. Je me dis, en substance et en (très) résumé: “Ah là là, mon dieu, mais non, dans quel monde…”, tout ça. Comme je continuais à marcher, mon regard restait comme scotché par ce… machin, et tout à coup mon œil a été attiré par la pièce qui faisait face à cette toile. C’était presque la même, avec les mêmes deux couleurs, mais comme froissée, chiffonnée. Et bizarrement, le rapport entre ces deux pièces m’a stoppé net. Peu importe ce que j’ai ressenti, peu importe le caractère émotionnel, artistique, ou au contraire intellectuel, conceptuel, de ce ressenti. Je ne m’en souviens pas. Ce dont je me souviens, c’est que brusquement, le rapport qu’il y avait entre ces deux pièces m’a interpellé, quelque part, au niveau de tu sais quoi. Ç’a été le début d’une réflexion qui vient de connaître un rebondissement.
Et la question fut
Il y a peu de temps, une nouvelle galerie s’est ouverte en bas de chez moi. C’est en fait la deuxième arcade de la Gallerie Xippas qui occupe déjà une arcade dans une rue voisine. Ce nouvel espace, au bas de mon immeuble, est très haut de plafond, avec des vitrines énormes. Ils ont monté des murs dans les vitrines, qui laissent juste entrevoir les pièces exposées. Ben oui… Une galerie, ça a besoin de murs et la pièce principale se trouve dans l’angle de l’immeuble, donc deux de ses quatre murs sont des vitrines.
Et en passant devant cette galerie, qui annonçait un accrochage en cours, j’ai entrevu ça:
J’ai glissé un œil curieux et ai constaté que, apparemment, toutes les toiles, des énormes triangles, reposaient sur le même principe. Je me suis dit que l’artiste avait trouvé un truc et qu’il le déclinait, l’exploitait, le “rentabilisait”. Et puis, j’ai vu, dans la pièce voisine, d’autres toiles sur le même principe, mais de tailles et de formes différentes.
Repassant devant cette galerie tous les jours, je ne pouvais m’empêcher, à chaque fois de jeter un œil, parfois distrait, mais toujours intrigué. Intrigué non par les toiles elles-mêmes, mais par cette confuse fascination qu’elles exerçaient sur mon regard, avec des résonnances intérieures inattendues et contrastées (de: “J’vais quand même pas aimer ce genre de truc!” à: “purée, c’est étonnant, quand même, cet effet!”).
Je me suis alors souvenu de ces deux grandes toiles carrées vues quelque temps auparavant et de l’effet bizarre que leur face à face avait eu sur moi.
Et je me suis également souvenu de ce que j’avais écrit ici:
“J’habite à la rue des Bains. C’est LE quartier de l’art contemporain à Genève et je passe quotidiennement devant des vitrines de galeries. Or, si je n’éprouve aucune difficulté à ressentir le caractère contemporain de ce que j’y vois, il m’est par contre souvent malaisé d’en percevoir la dimension artistique dans toute sa profondeur. Les seules vibrations que provoquent en moi grand nombre de ces «œuvres» sont de l’ordre du grattage de cuir chevelu ou du haussement d’épaules.”
La question soulevée si subtilement (!) était: qu'est-ce qui fait que quelque chose est de l’art ou non? Autrement posé: Qu’est-ce que l’art? Et là, j’imagine déjà que tu vas me ouikipédier, m’encyclopedia-universaliser, et tu auras sans doute raison. C’est un bon moyen d’aborder une question. Quant à moi, je me limite - dans un premier temps du moins - à m’interroger de manière plus personnelle, plus expérientielle:
- Qu’est-ce qui fait que, lorsque je regarde quelque chose, j’ai l’impression, la sensation qu’il s’agit d’art?
- Qu’est-ce qui, dans mon système de valeur, me permet de distinguer ce qui est artistique de ce qui ne l’est pas?
- Existe-t-il un critère, ou un ensemble de critères que je puisse utiliser systématiquement pour décider si c’est de l’art ou du cochon? (oui, je sais… mais comme ça c’est fait et on est tranquille. En tout cas moi.)
Le premier élément de réponse est balayé au moment même ou il survient: la beauté. Ce n’est pas parce que c’est beau que c’est de l’art. Ou plutôt: ça n’est pas parce que je trouve ça beau que je peux le qualifier d’artistique. Il y a des toiles, des sculptures, des œuvres musicales, que je ne trouve pas belles, qui ne me touchent pas. Il ne me viendrait toutefois pas à l’idée de leur refuser le statut d’œuvres d’art.
Un autre élément de réponse pourrait venir d’une remarque du genre: “Mouais… moi aussi je peux tirer quelques lignes, poser quelques couleurs, ou aligner des notes et des bruits…” Cela reviendrait à dire que si c’est - ou cela semble - facile, ça n’est pas de l’art. Là non plus, ça ne tient pas. La simplicité apparente de certaines œuvres est le fruit d’une longue maturation.
Bon.
En fait, je crois que je n’ai définitivement pas de réponse à cette question. Et peut-être que la qualification d’artistique est moins à rechercher dans l’œuvre elle-même que dans la rencontre entre l’œuvre et le spectateur, en l’occurrence moi.
Rencontre
Une histoire me revient. Un cousin et ami d’enfance, professeur d’art visuel dans l’enseignement primaire, faisait de la formation continue auprès de ses collègues “généralistes”; ceux-ci étaient facilement fermés à un certain art contemporain. Il emmenait lesdits collègues au Centre d’Art Contemporain et leur disait en substance: “Je ne vous demande pas de chercher à comprendre ni à aimer quoi que ce soit, je vous demande de chercher à faire une belle rencontre. Même si vous ne voyez pas toutes les œuvres, soyez ouverts à ce qui se passe en vous et donnez-vous la chance de faire une belle rencontre avec une des pièces exposées; prenez le temps de résonner avec cette pièce. Ensuite, nous partagerons ces rencontres”.
C’est ce terme de rencontre que j’ai retenu. Et peut-être que ce mot a quelque chose à faire avec mon questionnement. Ainsi, lorsque j’ai aperçu ces toiles dans cette galerie, il y a eu une sorte de rencontre entre elles et… quelque chose en moi. Je n’ai pas été saisi par leur beauté, je n’ai pas été impressionné par une virtuosité technique, je n’ai pas regretté de ne pas avoir la place ni les moyens d’en installer une chez moi, non. Mais il y a eu comme une vibration intérieure. Un peu comme lorsque je tousse à côté de ma guitare et que les cordes résonnent. Ma toux et le son de la guitare ne sont pas de même nature, mais il y a une fréquence commune qui fait que les cordes, si elles n’en sont pas empêchées, se mettent à vibrer sur cette fréquence et ses harmoniques.
Si elles n’en sont pas empêchées. C’est ça. Lorsque je passe devant une œuvre, si je la préjuge, si je la classe d’emblée, si je cherche à la faire entrer dans mes catégories préfabriquées (beau, laid, artistique…), j’empêche la surprise, la vibration, la résonance possible. La proposition de l’artiste a besoin de mon consentement (éclairé ou non), de mon ouverture, de ma curiosité, de ma disponibilité à l’inconnu, de ma capacité à me laisser interpeller par une expression qui m’est, à priori, étrangère, ou du moins peu familière.
Une rencontre.
C’est cela.
Je suis donc entré dans la galerie, en adulte consentant et curieux.
Un peu gêné tout d’abord, parce que je n’entre jamais dans les galeries et que j’ignore comment il convient de s’y comporter. J’imagine qu’il y a des codes, des choses qui se font et se disent et d’autres non, des manières d’être, tout ça… Alors je suis tout de suite entré dans le concret et j’ai abordé la galeriste (c’est comme ça qu’on dit?) pour lui parler d’une idée que j’avais: celle de raconter mes interrogations à travers un billet sur un site qu’il est vachement bien, et d’ailleurs, Madame puisque vous avez un Mac vous devriez le connaître, ce site, parce qu’au départ c’était pour ça, mais maintenant on y parle de tout, et même à l’occasion d’art contemporain, c’est dire.
Et j’ai tout à coup réalisé que j’étais en train de lui demander la permission de parler de leur expo (!), ce qui a eu l’air de la surprendre et je le comprends. Je pense que ma démarche résultait du fait que j’avais l’impression non de vouloir écrire un article sur l’expo, d’un point de vue de “critique d’art” (que je ne suis pas); mon projet était plutôt de parler de mon expérience de l’art contemporain en me servant de photos des œuvres exposées. Elle m’a dit que bien sûr, je pouvais écrire ce que je voulais, et que si je voulais elle pouvait me transmettre quelques photos en haute définition. J’ai dit d’accord. Mais je n'ai malheureusement pas pu les recevoir à temps, ayant fait mon choix dimanche et la galerie étant fermée le lundi. J'ai donc récupéré des images sur le site de la galerie:
© Annik Wetter
© Annik Wetter
© Annik Wetter
En regardant ces photos, je crois comprendre une des raisons qui m’ont accroché dans cette expo. J’aime le silence. Et là, il me semble qu’il y en a plein. En me tenant dans ce grand espace tout blanc habité par ces pointes de couleurs, dans ce vaste cube peuplé de triangles, il y a comme un repos bienfaisant qui m’envahit, comme une paix, un silence, et les tableaux sont comme une fenêtre sur moi-même, si je veux. En ce sens, ça n’est pas un repos de tout repos, pas une planque. C’est comme un silence interrogatif.
De plus, je n’ai pu m’empêcher de voir une pointe d’humour dans le fait que l’artiste s’est même “permis”, comme on peut le voir sur les photos ci-dessus, d’utiliser un élément constitutif, porteur même, de la galerie, à savoir la colonne centrale, pour y proposer un entrebâillement coloré sur le même mode que ses toiles, notamment celles qui se trouvent dans le showroom voisin, qui n’est pas partie intégrante de l’expo, mais qui est là pour montrer que l’artiste sait aussi faire des rectangles. (Je plaisante, bien sûr. Le dossier de presse m’a permis d’apprécier la variété de ses langages!)
© Annik Wetter
Conclusion
Ben non, justement pas conclusion. Parce que cette expérience est une nouvelle ouverture, un nouveau monde de découvertes qui se déboutonne devant moi. Et comme je suis à la retraite dans deux mois, j’aurai plein de temps pour m’y attarder.
L’artiste: Stéphane Dafflon (site)
L'exposition: Turnover, jusqu’au 7 mai
La galerie: xippas à Genève (site)
Photos © Annik Wetter (sauf les 3 premières qui sont personnelles)
, le 05.04.2016 à 01:39
Super article !
Moi la première vraie claque que j’ai prise, c’est en voyant en vraie (parce que les photos sont très loin de renvoyer l’intensité qu’une œuvre, « en vrai ») une expo dédiée à l’artiste Dan Flavin, qui ne travaillait qu’avec des néons. Ça a été une réelle expérience ! J’ai également été scotché par un monochrome bleu d’Yves Klein (au tout début de ce qui est défini par le terme « art contemporain »)
Après je suis d’accord avec toi Dominique, l’art contemporain est parfois si minimaliste que ça en est déroutant ! Mais j’aimerais préciser que cela ne concerne qu’une partie de l’art contemporain.
Je pense à un artiste qui te parlerait plus, sûrement, il s’appelle Chuck Close. Il a une technique assez bluffante je trouve !
Amicalement,
Truc
, le 05.04.2016 à 06:30
Tout d’abord, merci pour la première et superbe photo, cadrée pour afficher, en trois mots, une phrase qu’il faut, à mon goût, prononcer à voix haute, intelligible et forte, et qui résume mon opinion « générale » sur ce que, personnellement, je ressens par art contemporain, la plupart du temps.
Pour être un artiste contemporain, selon cette conception, il ne faut ni savoir dessiner, ni savoir construire, ni savoir sculpter, ni avoir un don particulier artistique (au sens général) bref, ne rien savoir faire d’autre que ce que le premier venu, moi-même par exemple, saurait faire également tout aussi bien ou tout aussi mal, peu importe, cela n’a pas de sens dans le cas présent de faire une distinction entre les deux, car l’art contemporain transcende les contraires (c’est bon ta phrase, coco, on la mettra dans le flyer de la prochaine expo).
Donc, comme on le voit, il faut avoir beaucoup de tchatche afin d’être capable d’expliquer, surtout de s’expliquer longuement, de se psychanalyser philosophiquement, et surtout sociologiquement, de faire comprendre au vulgaire quelle a été l’intention que l’on a eue avec des boîtes de conserve écrasées, des treillis tordus, des pots de peinture lâchés de haut ou lancés contre des murs, ou la « ponte » d’œufs remplis de peinture.
Pour moi, l’art contemporain est un peu de tout cela, en vrac, en pire, en plus vide de sens.
Le titre de cette chronique est intitulé l’art contemporain et moi.
Alors, puisque c’est « et moi », voilà ce que moi j’en pense, de manière générale. C’est donc tout à fait personnel, tout à fait subjectif, tout à fait juste et tout à fait faux. Là aussi, cela ne sert à rien de faire la distinction.
La seule chose qui importe, c’est de provoquer et de faire parler les gens.
De gustibus et coloribus non est disputandum.
Mais j’adore Tinguely, par exemple, sans penser un instant où diable je pourrais le situer, et je m’en trouve très bien quand même.
Vive certains très rares arts et encore plus rares artistes contemporains !
Pour les autres, je peux, n’importe qui peut se dire artiste, faire des œuvres d’art contemporaines, et surtout faire parler de soi, demander et obtenir des subsides culturels, encore que pour pondre des œufs, je n’aie, de par ma conformation physique masculine native et naturelle, aucune possibilité de réaliser une telle œuvre artistique de la même manière.
Je pourrais étudier une autre manière de pondre des œufs par un orifice naturel, mais cela ne m’intéresse pas, et je n’aurais aucun succès. Enfin, je crois. Mais on ne sait jamais, ça reste à découvrir. Il y a bien quelqu’un qui le fera une fois.
Il saura expliquer quel est le fondement de sa démarche, je n’en doute pas un instant.
, le 05.04.2016 à 08:53
Merci pour ce très bel article et surtout pour les interrogations qu’il dévoile et qui sont aussi les miennes.
J’ai ressenti cette façon de se « vider » (ou de se libérer ? ) devant une œuvre pour espérer sentir une vibration qui est souvent rare mais tellement intense quand elle se produit.
, le 05.04.2016 à 09:29
Merci pour ce bel article et tes émotions partagées!
Et bonnes découvertes pour la suite
, le 05.04.2016 à 09:33
J’adore ce genre de truc minimaliste… le problème, c’est que ce genre de truc coûte un bras… les seules fois où un truc m’a suffisamment « happé » pour le vouloir, ça m’a fait un peu mal: 16K pour une magnifique oeuvre dans une petite boutique à Saint-Paul-de-Vence ou 360K pour un tableau chinois dans une vente chez Drouot.
A ces prix, pas la peine de dire que mes murs portent mes photos et pas grand chose d’autres…
T
, le 05.04.2016 à 12:39
Ah oui, je reconnais l’endroit! C’est juste à côté de:
, le 05.04.2016 à 17:17
Qu’est-ce que l’art ?
Au fil des années, je me suis forgé un genre de petite définition personnelle : l’art est un générateur d’énergie.
Il y a d’un côté le créateur, qui a le sentiment de produire une oeuvre.
Il y a de l’autre côté le passant qui passe et qui s’arrête. Et qui ressent quelque chose. Une force. Une énergie.
Et au milieu, il y a l’oeuvre, qui est un genre de réacteur perpétuel.
Mais attention, certains ne sont pas sensibles à ce réacteur-là, ils n’en perçoivent pas l’énergie. Ils sont sensibles à d’autres. Ou à aucun.
D’où la subjectivité inhérente à l’art, aux artistes, aux oeuvres et aux individus récepteurs.
J’ai pris conscience de cette dimension énergétique le jour où je me suis retrouvé devant le tableau de Picasso, Guernica, au musée de la Reine Sophie, à Madrid. Certains visiteurs restaient distraitement trente secondes devant le tableau et repartaient. D’autres, dont je faisais partie, étaient tétanisés, le souffle coupé, et n’arrivaient pas à en détacher leur regard.
Puis j’ai fait le lien avec la musique, la manière dont elle peut transporter certains humains (et pas d’autres).
Ses détracteurs pourraient dire que l’art contemporain est en quelque sorte l’exploitation industrielle à forte marge de réacteurs portatifs défiscalisables :-)
, le 05.04.2016 à 19:27
Trucmouche: En lisant ton commentaire ce matin, j’ai eu deux réactions instinctives:
“Monochrome”: voilà typiquement le terme qui me met sur les pattes de derrière. Continuant ma lecture j’ai vu “un artiste qui te parlerait plus, sûrement, il s’appelle Chuck Close.” Je me suis dit que tu avais bien deviné. N’importe quoi peut m’intéresser d’avantage qu’un monochrome. Alors j’ai jeté un oeil sur Chuck Close. Effectivement, le bonhomme est intéressant. Ça vaudrait la peine, je pense, de découvrir un de ses tableaux en “dézoomant” depuis une position très proche, centrée sur un détail. Puis découvrir que ces formes sont des comme des pixels qui prennent sens dans une vue d’ensemble.
Ce soir, en commençant à écrire cette réponse, je suis quant même allé taper “monochrome bleu d’Yves Klein” dans google (tout en me rendant compte qu’un écran de 21 pouces ne saurai se subsituer à une vision réelle). Et tu sais quoi? J’aime énormément le bleu, et particulièrement celui que j’ai vu là. Alors oui, je comprends que tu ais été scotché. J’espère m’en souvenir la prochaine fois que j’irai à Paris.
Tu as raison: ce minimalisme n’est pas représentatif de tout l’art contemporain. D’ailleurs, malgré toutes mes réserves, je me rappelle avoir déjà publié ici un billet sur un artiste contemporain, Luc Tiercy, dont j’aime énormément le travail!
Zallag: De rien pour la photo! Et je comprends que ton point de vue est proche de celui qui était le mien il y a peu…
Lorsque tu écris “de faire comprendre au vulgaire quelle a été l’intention que l’on a eue” tu m’apporte un élément de plus dans mes tentatives de répondre à la question “Qu’est-ce que l’art”: j’ai tendance à penser que si le “vulgaire” (moi) a besoin d’explications pour aimer une oeuvre, on n’est pas dans une démarche artistique. Pour moi, soit je suis touché soit je ne le suis pas. Je ne parle pas d’oposition manichéenne, mais s’il n’y a pas d’éteincelle, si rien n’attire mon attention d’une manière ou d’une autre, je passse mon chemin. Après, une fois que j’ai “accroché”, après avoir pris le temps de me mettre à l’écoute de moi-même et de ressentir, après seulement, peut-être que je serai intéressé par les commentaires ou explications de l’artiste. Encore que cela dépende du style d’icelui. Si l’ai l’impression d’avoir affaire à un illuminé ou un intello-philo-technico-pédant, je l’éviterai. Et dans ce cas, peut-être même que ma première impression pourra s’en trouver troublée, comme invalidée.
”…n’importe qui peut se dire artiste,” Certes. Et d’une certaine manière, nous le sommes tous! Alors sois créatif, n’hésite pas à innover! A défaut de pouvoir pondre comme la dame, bois du colorant et pisse-nous un monochrome!
soizic: C’est vrai que plus j’avance en âge, plus les questions m’intéressent. Sans toutefois, je l’avoue, me désintéresser des réponses, surtout quant celle-ci posent question!
Un journaliste: – Pourquoi, vous autres Jésuites, répondez-vous toujours aux questions par d’autres questions?
Le Jésuite, fronçant les sourcils: – Qui vous a dit ça?
TTE: Oui, mais de pareils prix – je pense – ne sont possibles qu’à partir du moment où il y a spéculation. La spéculation sur les oeuvres d’art, qu’elle soient contemporaines ou non, est une calamité. En fait, toute spéculation en est une.
Caplan: Je t’aime, toi!
Tilékol: J’aime bien ta proposition. Energie. Je m’y retrouve tout-à-fait, plus particulièrement dans le domaine de la musique. Et cette énergie peut être fougueuse ou douce, mais elle est effectivement importante. Je dirais que l’énergie est vie, et la vision de l’art comme générateur de vie me plaît bien!
, le 05.04.2016 à 20:51
Je ne puis dire si les oeuvres de ces artistes étaient déjà dans la spirale de la spéculation (je ne connaissais aucun des deux)… pour le second probablement. Pour le truc à 16K, je pense qu’il y avait vraiment pas mal de boulot… maintenant je ne dis pas que parce qu’il y a beaucoup de boulot, ça mérite de l’argent (sinon tous les François Pignon deviendraient riche avec leurs réalisations immondes).
Le « problème », c’est que quand les oeuvres d’un artiste trouvent le chemin d’une galerie qui a pignon sur rue, il a déjà une certaine cote… enfin, il faut bien qu’ils gagnent leur vie mais généralement, pour ce qui m’a attiré, c’est déjà hors de prix pour moi.
T
, le 05.04.2016 à 21:24
TTE : ta phrase « je ne dis pas que parce qu’il y a beaucoup de boulot, ça mérite de l’argent » me rappelle quelque chose. Je crois que c’est Lanza Del Vasto qui écrivait:
« Marx a dit que la valeur d’un objet est directement proportionnelle au nombre d’heures de travail inclus dans cet objet. Alors je pose la question: quelle est la valeur d’une esquisse de Rembrandt? »
, le 05.04.2016 à 21:55
L’Art contemporain…
J’ai de la peine avec ça.
En particulier avec la musique dite contemporaine.
Certes, quand tu fais partie d’un orchestre ou d’un choeur, que tu dois t’y coller, pour finir, tu y trouves ton plaisir, et tu trouves ça intelligent.
Mais ça ne parle tellement pas aux tripes, et tellement seulement à l’intellect, que ça m’ennuie profondément.
Typiquement, j’adorais les concerts de l’OCL (Orchestre de Chambre de Lausanne), mais le fait qu’ils se sentent obligés de mettre une oeuvre contemporaine dans chacune de leur soirée d’abonnement m’a fait les fuir.
Je comprends bien le problème des musiciens « classiques » de notre époque: ils ne peuvent pas faire du Bach, du Mozart ou du Brahms, mais de la à nous emmerder à tel point avec leurs dissonances, il y a quelques pas…
, le 06.04.2016 à 00:39
Il me semble que c’est exactement le contraire de ce que l’experience de l’auteur de l’humeur du jour veut nous faire comprendre.
, le 06.04.2016 à 01:59
La quintessence humoristique et critique de l’art contemporain ne se trouverait-elle pas dans « Les tontons flingueurs », alors que ce cher Delafoix découvre (ou est sur le point de découvrir) l’anti-accord absolu, fait d’une multiplication de bruits improbables de casseroles, de bulles et autres couinements aqueux ? C’est géant ! Au moins lui, garni de pédanterie culturelle absolue en est-il convaincu.
L’originalité de l’art contemporain, c’est qu’il est contemporain. De notre époque quoi. Tous les artistes font de l’art contemporain puisqu’ils sont au moins contemporains d’eux-mêmes. C’est le temps qui passent qui confère un nouveau statut à leur art : d’antique à cubique en passant par le classique, n’a-t-il pas eu au moins de manière éphémère la qualité de contemporain, avec cette dose de disruptivité suffisante qui le range dans une « autre » catégorie, nouvelle et incomprise, jusqu’à ce qu’on s’y habitue. Et un nouveau cycle commence, ou non.
Et si notre époque est désabusée, dystopique, sombre et désespérante, est-il étonnant que l’art contemporain en soit le reflet de la part de quelque esprit justement dérangé par cette époque qui n’accouche de rien ? Pour moi qui suis normal, équilibré, raisonnablement intelligent, parfait représentant de cette masse désespérante si justement critiquable par cet art qui me devient tellement incompréhensible que je l’exècre ? Cet art est-il donc fait pour moi ? Ou bien m’ignore-t-il ostensiblement à la manière d’un pied de nez : je ne suis décidément pas son public ?
Quant à la réflexion a priori disqualifiante : « je suis capable de le faire ! » oui, en effet… Sauf que je ne l’ai pas fait. Je n’ai pas tiré de trait noir sur fond blanc. Je n’ai pas dessiné de couteau sans lame auquel il manque le manche, je n’ai pas crié ma douleur dans un tourbillon de souffrance, je n’ai pas non plus inventé l’anti-accord absolu. Alors, désolé, ce n’est pas moi l’artiste.
D’autre part, loin de moi l’idée saugrenue que de mesurer le poids relatif de cet art dans la société pré-post Panama papers en kilo. Mais on a les filtres et les repères que l’on peut. D’ailleurs un artiste qui dépasse le quintal est souvent mort et n’a plus besoin de mettre du beurre dans les épinards. Et de se rappeler que de son vivant, il se contentait d’épinards à la vapeur. Notre époque est…
Rencontrerai-je l’artiste par le biais de son art ? C’est une autre histoire. Mais pourquoi pas ?
, le 06.04.2016 à 08:28
Dom, merci de ton commentaire bienveillant au sujet du mien.
Mais que veux-tu, je ne croche pas ou très rarement à quelque chose qui ne me dit rien du tout.
Si un objet doit être apprécié, reconnu, légitimé comme étant une œuvre artistique du simple fait qu’il a été placé dans un musée, cela me semble faux.
Ce n’est pas à moi de m’émouvoir devant quelque chose. C’est à l’objet, c’est à l’œuvre de me convaincre, de me toucher, de me parler.
Je m’explique : je verrais un triangle de tubes colorés, ou une ligne droite peinte sur une plaque de métal blanche dans un container de déchetterie, ça ne me ferait aucun effet.
Pareil avec un tableau de Mark Rothko. Je n’y verrai rien du tout, s’il est dans un container. Si c’est au mur d’un musée, je saurais que je suis censé être devant une œuvre, et que je devrais donc théoriquement ressentir quelque chose.
Mais si, dans une déchetterie, je voyais un petit vase grec, un tableau impressionniste, une photo de Salgado, je serais probablement tout de suite frappé d’émerveillement. Je sentirais que l’objet me parle.
Autre chose sur la valeur des œuvres d’art.
Je me souviens avoir entendu un expert de Sotheby’s interviewé sur ce sujet. On lui demandait ce qui faisait le prix d’une œuvre d’art en général, là c’était un petit « Balloon dog » de Jeff Koons.
Il a attendu avant de répondre pensivement : « Le prix, la valeur d’une œuvre d’art ? C’est tout simplement la somme d’argent qu’une personne accepterait de débourser pour l’acquérir, il n’y a pas d’autre critère… »
Une œuvre de Rothko ?
Orange, Red, Yellow est une peinture acrylique abstraite, contenant trois blocs de couleurs : de haut en bas, une bande horizontale jaune, un rectangle orange et un deuxième rectangle orange plus large. Les blocs sont peints sur un fond rouge.
En mai 2012, Orange, Red, Yellow (1961) a été adjugé à près de 87 millions de dollars.
Zoomez afin d’apprécier les détails dans une nouvelle fenêtre …
, le 06.04.2016 à 08:38
Un super dialogue est engagé ! Merci pour vos contributions. Je compte bien y revenir, mais ne le pourrai pas avant ce soir.
Alors, comme on disait dans le temps : « Allo, mademoiselle, ne coupez pas! »
, le 06.04.2016 à 08:42
Je ne pense pas que Marx avait en tête les artistes quand il a dit ça… et puis il n’y a pas que la spéculation qui fait grimper les prix. On pourrait réunir les 100 plus grands fans de Star Wars dans le monde et leur proposer la maquette originale de R2-D2 aux enchères et je suis certain que celui qui gagnera préférerait se couper le bras plutôt que de revendre l’objet… même 10x le prix.
Bref, j’adore ces trucs minimalistes et j’espère une fois tomber sur une oeuvre d’un artiste qui n’est pas encore trop « exposé »;-)
T
, le 06.04.2016 à 08:56
Je ne suis pas totalement au fait de l’art plastique contemporain (si ce n’est que Xippas représente l’artiste Denis Savary, avec qui nous avons collaboré deux fois et qui est devenu un ami, que Tinguely était mon voisin d’enfance et que Stéphane Dafflon vient de mon village…). Je reste ouvert, surtout qu’à mon sens il appartient plus au musée qu’au salon: c’est rarement décoratif.
Non. Moi je produit dans les arts vivants contemporains. Et pour celles et ceux qui veulent avoir une idée, nous jouons, avec la 2b company un spectacle qui s’appelle Chorale, ce vendredi à L’Echandole d’Yverdon. Venez, c’est court, c’est joli. Et je crois que c’est drôle, mais « autrement ».
, le 06.04.2016 à 19:54
Malin de nous titiller les neurones avec une telle Intro graphique, Dom!
Le recul nécessaire et l’étroitesse de l’espace disponible pour le cadrage final ont décidé du gagnant : le doigt cliqueur ;-)
Ce qui semble se vérifier dans la deuxième photo et l’apparente tristesse de cette borne d’incendie solitaire…
Dans l’impossibilité de me faire un avis sur l’art contemporain, ce qui (en comparant hâtivement avec le travail actuel que font des journalistes d’investigation sur l’art de la dissimulation de biens) me demanderait plusieurs vies dont je ne suis pas mécontent de ne pas disposer, je m’en tiendrai donc à l’émotion.
Aujourd’hui, chrysalides dans leur cocon d’acier, certaines semblent sous sédatif en attente de l’envol final.
Fut un temps pas si lointain, elles étaient fières et droites, avec deux petits bras et un appendice facial qui donnait envie d’entamer une discussion.
Un conseil: Eviter de dire à un bambin qu’il s’agit d’un pompier montant la garde, il risque de commander le même à installer devant la maison pour Noël ;o).
Elles sont là, indispensables sans être spontanément nées du trottoir.
D’où un grand merci aux artistes anonymes, rarement grassement payés, qui enrichissent encore notre environnement quotidien.
, le 06.04.2016 à 20:34
François: L’art contemporain est parfois difficile d’accès, oui. Ceci dit, on n’a – je crois – jamais eu autant qu’aujourd’hui la poissibilité d’écouter de la musique en quantité, quand et où l’on veut, avec un niveau qualité (technique et artistique) élevé, que ce soit en concert ou en reproduction. Et je crois que plus on en écoute, plus on creuse notre zone de confort, notre sytmème de références estétiques, dont il est peut-être difficile de sortir.
Un ancien collègue, dont j’ai parlé ici comme étant celui qui m’a initié à la musique baroque sur instruments anciens, était également grand fan de musique contemporaine. J’avoue avoir eu plus de mal à le suivre sur ce terrain, mais j’ai eu tout de même l’occasion de faire l’expérience d’une certaine ouverture. Et il me racontait que son fils de 3 ans, lorsqu’il y avait un disque qui tournait à la maison, aimait se mettre devant une des enceintes et danser, qu’il s’agisse de Vivaldi ou de Berio!
Rebondissant sur la remarque de nic, je dirais que si cette musique ne parle pas aux tripes, peut-être que la responsabilité en revient aux trippes plus qu’à la musique?
Origenus: Effectivement Bach, Mozart et les autres ont fait de la musique contemporaine. Et d’ailleurs, certains ont eut beaucoup de mal à se faire accetpter par leurs contemporains! Je me souviens que mon père me disait que lorsque Beethoven a composé ses derniers quatuors, les auditeurs ont crié à la cacophonie! Autre exemple: dans sa pièce Six personnages en quête d’auteur, Pirandello situe l’action sur un plateau de théatre, pendant les répétitions, avant que le décor ne soit même construit. Au lever de rideau, le chef machiniste en bleu de travail est en train de planter des clous. Et bien lors de sa création en 1921 à Rome, il parraît que ça a été une véritable émeute. Oser présenter un plateau nu, sans décor!
Zallag: L'objet doit convaincre par lui-même, et non parce qu’il est dans un musée. Entièrement d’accord. Mais il reste que notre aptitude à être convancu – ou au moins séduit, interpellé – joue un rôle capital. C’est là je crois que nous différons. Il y a trois ans, certaines musiques que j’écoute aujourd’hui m’auraient parrues inaudibles et intello. Par les hasards de la vie et mon goût pour la découverte, j’ai peu à peu assouplis mes critères esthétiques et ce qui à l’époque me semblait cérébral me parle de manière très “tripale” et émotionnelle aujourd’hui. Mais je ne dis pas que c’est “mieux”, hein, je dis simplement que l’auditeur, le spectateur d’une oeuvre, la reçoit en fonction de ce qu’il est et que ce paramètre-là n’est pas immuable ni forcément objectif. Cette réalité est d’ailleurs valable dans tous les domaines. Nous percevons la réalité avec ce que nous sommes! Et chacun a ses propres lunettes!
Je me souviens d’une histoire que l’on m’a racontée: alors que Gandhi rendait visite à Romain Rolland, celui-ci lui fit écouter un extrait de la messe en si, de Bach. Le Mahatma écouta attentivement, et à la fin, Rolland lui dit: “C’est beau, hein?” Ce à quoi Gandhi répondit: “Certainement, puisque vous le dites”. Et Romain Rolland compris que, pour ses oreilles indiennes, la musique de Bach était certainement moins “évidente” que pour nous.
Quant à la question de la valeur, je suis personnellement partisan d’une distinction fondamentale entre le coût (ou le prix) et la valeur. Il est vrai que si une oeuvre peut atteindre un prix élevé, c’est parce qu’il y a des amateurs qui lui attribuent suffisamment de valeur d’une part, et qui ont les moyens de payer cher d’autre part. Mais pour moi, le prix d’une oeuvre n’est pas sa valeur. Ce sont deux choses différentes, qui s’influencent certainement mais restent distinctes.
TTE: Marx ne pensait probablement pas aux objets artistiques, tu as raison. Mais je crois que la remarque de Lanza del Vasto joue justement sur cette distinction entre la valeur et le coût.
Mirou: Eh mais c’est que ça m’intéresse beaucoup! Sauf que le 8 avril je suis au Cully Jazz. Ceci dit, je garde le lien vers ton site et ne manquerai pas de surveiller les prochaines dates! Et au passage, ce lien me permet de mettre un visage sur ton pseudo! Cool!
Jean-Yves: Excellent, ta vision de la borne à incendie! Je l’avais vue, oui, mais pas de cette manière-là. Du coup je sens que chaque fois que je passerai devant, j’aurai envie de la réconforter d’un câlin! Mais surtout, je vais refaire une photo, pour le plaisir, en cadrant de manière à lui donner d’avantage de présence.
Merci encore à chacune et chacun!
, le 06.04.2016 à 23:42
@ Dom’ Python: raté, je ne suis pas en photo sur le site :-). C’est un autre commentateur de Cuk qui chante sur les photos!
A une prochaine alors!
, le 07.04.2016 à 00:27
Prudence, quand même ;o)
Une accréditation officielle semble le minimum requis pour éviter tout malentendu avec les représentants de l’ordre ou les passants suspicieux.
Ce serait dommage de perdre un rédacteur occupé à soutenir ses sources.
J’en parle de suite au BossPatrond’Ici…
Allo … François?
Considérant que nous, citoyens lecteurs, européens et bien au-delà devons protéger l’éventail des cultures représentées ici, à quand une GoldenCukCard de presse internationale? :D
Rédigé sous stimulants mondialement autorisés, accessibles en échange d’une participation modique mais mensuelle, et profitant que la science ne se soit pas encore exprimée sur les risques d’addiction ;o)
, le 07.04.2016 à 05:58
Jean-Yves: Il y a une chose que tu ignores et qui peut expliquer mon audace, c'est que juste en face de cette borne triste se trouve la caserne des pompiers. Il y a donc dans ce périmètre comme un champ énergétique bienveillant à l'égard de toute manifestation de tendresse envers ce qui appartient de près ou de loin au combat pyrocide. Et si d'aventure un Pandore zélé s'avisait de me tenir rigueur de mon geste, je n'aurai qu'à m'écrier À MOI LES POMPIERS! et je serai bientôt entouré par un commando de soldats du feu qui saura bien faire entendre raison à l'imprudent!
Mais merci pour ta sollicitude!
, le 07.04.2016 à 06:01
Hi-Phil: on ne dit pas les arts moches, mais les laids arts!
edit: Autrement dit, j’ignore s’il y a des arts moches,
mais en tout cas il n’y a pas de laids arts!
, le 07.04.2016 à 08:21
Oh lalaaaaaa, à 6h du mat en plus… Dom, tussor!! :)
, le 07.04.2016 à 09:03
François, je te lance un défi, écoute «Proverb» de Steve Reich (Sur le disque Proverb – City Life – Nagoya Marimbas, par le Theatre of Voices et le Steve Reich Ensemble dirigés par Paul Hillier, Nonesuch Records, 1996.) et tu nous fais un commentaire.
Sur ton système cela doit sonner pas mal ;-)
Cela existe même sur Qobuz mais seulement en qualité CD visiblement.
, le 07.04.2016 à 13:20
nic: amateur de la musique de Steve Reich, je ne connaissais pas cette oeuvre. J’aime beaucoup! Certains passage m’ont irrésistiblement fait penser à un CD de Perrotin que j’ai. Et il se trouve que Paul Hillier est sur les deux!
Hi-Phil: …j’comprends pas…
, le 07.04.2016 à 13:46
Excellent! Je connaissais Morisson et les Doors, mais pas son surnom. Donc flop.
Par contre je m’étais dit que si tu avais mentionné Iggy Pop (« L’Iguane ») j’aurais applaudi des deux pattes avant!
, le 07.04.2016 à 14:25
@Dom «Elle s’inspire de l’étude de la musique polyphonique du Moyen Âge et en particulier des œuvres de Pérotin…» ;-)
Source
Merci pour le lien, je mets ce disque sur ma liste de souhaits.
, le 08.04.2016 à 11:35
Je suis heureux de lire un article comme celui-là sur Cuk.
Je travaille moi-même dans le milieu de l’art contemporain depuis… oula longtemps (+ de 20 ans !).
Autant vous dire tout de suite que les commentaires habituels sur l’art contemporain me blessent toujours autant mais je n’en veux à personne car je comprends tout à fait combien l’ignorance devant tel ou tel aspect peut légitimement créer de l’aversion.
Mais tout de même c’est lassant d’entendre toujours les mêmes lieux communs et attaques qui mélangent tout (artistes, travail, marché de l’art, critiques…).
Bref lire un tel papier est si rare, si honnête, qu’il démontre les grandes qualités d’esprit de son auteur.
Rapidement…
Je ne vais pas rentrer dans le détail mais non, les artistes ne se foutent pas de votre gueule et oui, ils sont pour la plupart très sensibles et virtuoses. Oui je parle bien des artistes dont l’oeuvre déclenche généralement des « c’est de la merde », « mon petit neveu de 3 ans fait la même chose » ou autre « Michel-Ange doit se retourner dans sa tombe ».
Je m’intéresse également (mais au titre de simple « curieux ») à la cosmologie et à la science en général. Très franchement je n’y comprends rien. Enfin, je comprends les vulgarisateurs. Mais rentrer plus dans le détail me demanderait un effort colossal et des qualités mentales liées à la physique (quantique ou non) que je n’ai bien évidement pas le temps de développer.
Mais je fais confiance à tous ces vulgarisateurs et ce qu’il me racontent me fait rêver.
Et bien il en va de même avec l’art contemporain. Sauf que là c’est moi qui suis « à la place » des scientifiques car j’ai toujours travaillé dans ce milieu.
Mais il n’existe pas de vulgarisateurs de l’art contemporain. On en trouve de très bons pour plein de périodes de l’histoire de l’art mais sur les créations actuelles c’est souvent minable. Du coup l’art actuel déroute.
Le truc c’est que vulgarisation ou non, on va plus faire confiance à un scientifique qui bosse sur la théorie des cordes ou la gravité quantique qu’à un artiste qui bosse sur son propre champ de recherche.
Pourtant les deux auront la plupart sur nos vies à tous un impact nul. Car c’est souvent un argument contre l’art : « À quoi ça rime ? », « Tout cet argent pour ça ? ». Autant d’arguments moisis qui collerait aussi très bien au scientifique dans son labo dont le champ de recherche, isolé, peut paraître totalement dérisoire et inutile ! Jeter un oeil aux titres des thèses scientifiques peut facilement réveiller le populiste réactionnaire qui sommeille en nous !
Pourtant le scientifique fait sérieux, et l’artiste (contemporain) passe pour un tchatcheur sans vergogne prêt à tout pour vendre un tas d’immondices une fortune… c’est comme ça.
Et c’est terrible ! CAR C’EST FAUX !
Je vous demande donc de me croire : 99% des artistes sont « sérieux », talentueux, honnêtes et produisent des oeuvres sans doute difficiles à comprendre et/ou à appréhender mais de grandes qualités (même celui qui fait un caca géant sur une pelouse, oui).
La bonne nouvelle dans tout ça c’est que de même qu’il est inutile d’avoir une thèse en physique quantique pour rêver sur le spin de 2 particules, il est également inutile de connaître l’histoire de l’art pour savourer une exposition de Xavier Veilhan, Gilles Barbier ou Ugo Rondinone (au hasard).
Faut juste laisser tomber sa peur et… regarder.
Vous verrez, c’est magique comme la création humaine est riche, variée, surprenante.
Un véritable feu d’artifice qui change des codes de lectures habituels.
Et ça, ça fait un bien fou.
:-)
, le 13.04.2016 à 08:12
Ça fait presque quatre lustres que je fréquente une maternelle de l’art contemporain, l’endroit où de jeunes gens apprennent… quoi, au juste ? à devenir artiste ? devient-on artiste ? Et bien je suis de votre avis, à tous : c’est n’importe quoi ! et c’est magnifique !
Je ne suis pas pour autant un spécialiste de la chose, l’histoire de l’art ne m’intéresse absolument pas, ce qui fait que je n’ai pas forcément le bagage indispensable à la compréhension de ce qu’il m’est donné à voir. Et c’est sans doute là qu’une certaine proportion de l’art contemporain est inintelligible : ça s’adresse à des initiés, une élite qui sait, et qui peut hocher la tête d’un air compassé et attentionné alors que le commun des mortel hochera la tête d’un air outré et dégouté. Comme en musique, certain genres ne s’adressent pas à la plèbe.
Pour autant, quel que soit le genre, certaines œuvres ont cette capacité à frapper l’esprit, à donner envier de contempler, et je crois que le terme de résonance employé à plusieurs reprises est primordial. Si je me place du point de vue du praticien et non plus du spectateur, quand je produit quelque chose, j’ai le sentiment que l’idée n’est pas née dans la sauce blanche située entre mes oreilles, mais qu’une antenne en moi a capté l’idée qui se baladait quelque part dans une autre dimension comme avec un poste de radio quand, en balayant la plage de fréquences, on finit par trouver du son intelligible. Et je crois que c’est aussi ce qui se passe quand on tombe en arrêt, pour des raisons inconnues, devant une œuvre : la syntonisation s’est effectuée, et on est réglé sur la même fréquence que l’artiste au moment de la création.
z (mais il y en a quand même qui se foutent de la gueule du monde, je répêêêêêêêêêêête : l’artiste est un humain comme les autres, y’a des gens formidables, et d’autres…)
PS : Dom’ tu est infernal, avec tes billets qu’il faut une semaine pour ébaucher un semblant de réponse !
, le 13.04.2016 à 13:00
@analiva: Merci pour ton long commentaire. Très touché. J’ai tendance à penser que, de manière générale, dans le domaine artistique comme ailleurs, la grande majorité ne se fout de la gueule de personne. Du moins pas volontairement.
Ce que je veux dire par là est qu’il peut arriver qu’un plombier par exemple, soit convaincu de faire du bon travail, mais que peu après son intervention, il y ait de nouveau une fuite. Ou que la fuite n’est pas revenue, mais que, en raison du fait que le plombier à bouché la fuite sans chercher à comprende, un autre problème apparaisse. C’est également vrai en médecine. Traiter le symptôme sans chercher la cause peu entraîner d’autres symptomes, d’autres pathologies… etc.
Et dans les deux professions il peut y avoir des escrocs qui profitent de l’ignorance du client pour travailler mal et se faire du pognon, et il peut y avoir des gens qui, en toute bonne foi, font un travail dont la qualité n’est pas à la hauteur des attentes du client, mais sans qu’il y ait de leur part une volonté délibérée de tromper le client. Et là, ou mettre le curseur? Jusqu’où peut-on accepter l’erreur involontaire, la part de risque? La perfection n’existe pas, tout le monde en convient. Mais il me semble que, de plus en plus, on a du mal à accepter d’y être confronté directement. De plus en plus, on va chercher des responsables, en faire des coupables, et réclamer justice voire vengeance. Nombre de procès sont intentés là où nos ancêtres acceptaient l’imperfection de toute entreprise humaine. Mais tel n’est pas mon propos.
Pourquoi ce parallèle? Parce que si l’incompétence d’un plombier ou d’un médecin peut être relativement facilement être décelée par un quidam (ou une quimesieu), qu’en est-il de l’artiste? S’il est aisé de constater l’erreur de la part du plombier qui remplace le mauvais tuyau ou du chirurgien qui ampute la mauvaise jambe, qui peut dire si un peintre se trompe? Qui peut déceler l’erreur? Car si, comme tu l’écris, « 99% des artises sont sérieux », il reste la question de savoir qui a les compétences pour désigner le 1% restant. Et c’est là que ça coince, parce que les « spécialistes », auto-proclamés ou reconnus, ne sont pas d’accord. (Et vraissemblement pas d’accord non plus sur ce poucentage, soit dit en passant!)
C’est pour cette raison que je me trouve de plus en plus à l’aise dans le choix que j’ai fait de ne plus dire « c’est touchant » mais « je suis touché ». Voire à ce sujet mon article Beauté et objectivité. Le débat de savoir si les peintures de Stéphane Dafflon exposées dans la galerie Xippas sont belles, ou même artistiques ne m’intéressent plus du tout. Monsieur Dafflon est-il sérieux, talentueux et honnête? Franchement, je n’en ai rien à cirer. Il s’est passé quelque chose lorsque j’ai regardé ses tableau et je lui en suis reconnaissant.
En ce sens, plus qu’une explication, une initiation, je suis en quête de l’attitude intérieure qui fera que je m’ouvrirai ou non à telle démarche, que je serai ou non touché intérieurement par telle oeuvre. En ce sens, mon ami-cousin, en me parlant de cette invitation à la rencontre, m’a offert une clé essentielle, décisive, qui dépasse d’ailleurs de très loin le seul domaine artistique.
, le 13.04.2016 à 13:04
@zit: Merci pour ton intro. « c’est n’importe quoi ! et c’est magnifique ! », j’adore!
Mais le terme de compréhension que tu utilises me semble être un des coeurs du malentendu artistique. Je ne dis pas qu’il ne faut pas comprendre, mais à mon sens le problème est justement que l’on cherche à comprendre. Pour moi il y a d’abord la rencontre, l’étincelle, le « coup de foudre », l’interpellation éventuelle. Puis seulement la compréhension peut venir. Et si l’histoire de l’art peut m’intéresser, ça n’est pas d’abord pour la compréhension, mais pour la connaissance. Et j’écris ce mot non dans son sens intellectuel, mais dans sont sens originel: faire connaissance avec quelqu’un permettra peut-être de le comprendre, mais ça n’est pas pour moi le but premier. Du moins me semble-t-il.
J’aime bien aussi ton image de l’antenne. C’est effectivement la sensation que j’ai. Mais avec une nuance: si l’artiste est un récepteur, il n’est pas que ça. Deux radios qui capteront le même signal reproduiront le même son. Deux artistes qui captent la même idée produiront probablement des oeuvres très différentes, et peut-être même contradictoires! Ainsi si l’antenne reçoit, c’est quand même la « sauce blanche » – et tout ce que tu es – qui fera que ce que tu produis est une oeuvre, une création.
dp (et comme disait mon pèèèèèèèèèèèèèère: « là où il y a de l’Homme, il y a de l’Hommerie »!)
P.S. « Semblant de réponse »? N’hésite pas à développer!
, le 13.04.2016 à 13:18
@nic: Merci! A défaut de pouvoir lire la pochette du CD, je vois que Wikipedia est mon ami!