J’ai reçu tout plein de livres de chez Eyrolles dont je vais vous parler ces deux prochains vendredis.
Mais là, coup de cœur, je me suis offert samedi un livre absolument incroyable: Hergé, le feuilleton intégral.
- 464 pages - 24.3 x 30.1 cm
- Couleur - Relié
- ISBN : 9782203098244
- EAN : 9782203098244
Il s’agit du premier tome d’une intégrale d’Hergé absolument géniale, qui sera composée au final de 12 volumes.
Étonnamment, on commence par le volume 11, qui couvre les années 1950 à 1958, mais, et c’est là que ce très beau volume de 464 pages est génial, il ne se contente pas de reprendre l’un après l’autre les volumes de cette époque, et les mettant ensemble, non, il reprend les planches directement issues des journaux de Tintin, qui faisaient au départ paraître les aventures du jeune reporter sous forme de feuilleton chaque semaine.
Parce que oui, Tintin paraissait en tant que feuilleton, et il semble qu’au départ, il n’était pas question du tout d’en faire des albums.
Lisez plutôt ce qu’en dit Casterman:
Au départ, Tintin c’était un feuilleton. Les albums ne sont venus que plus tard et n’avaient pas du tout été prévus, racontait Hergé. C’est de cette version originale des Aventures de Tintin, mais aussi de Quick et Flupke et de Jo et Zette, que propose la présente collection. On y découvrira pour la première fois l’intégralité des bandes dessinées d’Hergé telles qu’elles furent publiées dans Le Petit Vingtième, Cœurs Vaillants, Le Soir et le journal Tintin, ainsi que toutes les créations graphiques qui s’y rapportaient (couvertures, bandeaux-titres, illustrations...)
Et lorsque le passage vers l’album s’est fait, Hergé a revu sa mise en page, coupant de-ci de-là des cases, des dialogues, pour que les livres tiennent dans un format 64 pages (voir plus bas).
Nous avons donc la version longue et non expurgée des aventures de Tintin, mais aussi Jo, Zette et Jocko (qu’est-ce que je les ai adorés, ceux-là, quand j’étais petit), et c’est tout simplement divin.
Alors qu’il pleut-neige et qu’il vente dehors, je suis en pleine lecture ce dimanche, au coin du feu, avec Staecy Kent en fond sonore, ou la Messe en Do de Beethoven, de «On a marché sur la lune», qui au départ n’était qu’une seule grande aventure, divisée en deux par la suite avec, d’une part «Objectif lune», et «On a marché sur la lune».
La présentation est magnifique, nous nous retrouvons avec des couleurs qui sont proches de l’origine (en héliogravure si j’ai bien compris), bien plus pétantes que celles que nous connaissons dans les albums.
Toujours selon Casterman:
Ce captivant retour aux sources permet de redécouvrir l’œuvre d’Hergé dans la fraîcheur du moment de la création. Lors de la publication en album, son souci de perfection conduisait en effet Hergé à apporter d’importantes modifications à ses histoires: il redessinait certains passages, supprimait des images, parfois des planches entières et, à compter de la création du journal Tintin, en changeait systématiquement les couleurs.
De nombreuses couvertures du journal qui faisait sa une sur l’aventure en cours assez régulièrement viennent agrémenter notre lecture, et chaque planche est introduite par un petit résumé de ce qui s’était passé la semaine précédente.
Franchement, c’est top, et le tout a été préparé par de grands spécialistes de la BD et de Tintin en particulier.
C’est du travail d’artisans, c’est beau, c’est le bonheur de lire ça.
Une chose dont je ne me souvenais pas, c’est à quel point «On a marché sur la lune» (en fait «Objectif lune» et «On a marché sur la lune» donc) est un livre rempli d’humour.
Haddock est vraiment impayable, et la crise de Tournesol traité par le capitaine de Zouave est un délice.
Sans compter qu’Hergé était en avance sur son temps… Un peu comme Jules Verne d’ailleurs.
Et c’est vrai que la version longue de ce chef-d’œuvre apporte vraiment un plus jouissif.
À vous offrir, à offrir ou à vous faire offrir en toute priorité, si vous aimez la BD et la ligne claire.
80 €, et 117.40 en Suisse (où l’on continue à nous prendre pour des couillons en ce qui concerne les prix du livre).
Je laisse pour la fin encore une fois la parole à l'éditeur:
« Hergé, le feuilleton intégral paraît sous les marques de Moulinsart et Casterman. C’est le premier tome d’une collection qui aurait pu s’appeler la Pléiade d’Hergé, puisqu’elle réunira, en douze épais volumes, l’ensemble des bandes dessinées d’Hergé dans leur version originale. Pour la première fois, nous pourrons les relire telles qu’elles sont parues dans les hebdomadaires Le Petit Vingtième, Cœurs vaillants et Tintin.
Accompagné d’un riche appareil critique écrit par Jean-Marie Embs, Philippe Mellot et Benoît Peeters, chaque tome de cette collection rassemble les Aventures de Tintin, mais aussi celles de Jo, Zette et Jocko, de Quick et Flupke, et de bien d’autres héros moins connus et parfois jamais réédités. Cette collection, dont la parution s’étalera sur six ans, permettra de découvrir l’œuvre d’Hergé dans la fraîcheur de son apparition et de se délecter de nombreuses séquences et couvertures inconnues. »
, le 30.11.2015 à 07:59
Eh bien voilà un problème de cadeau de Noël évacué pour six ans! Merci, François!
, le 30.11.2015 à 08:25
12*117.40 =1 408,8
, le 30.11.2015 à 08:45
ah superbe, hâte de voir ça.
ça veut donc dire qu’on retrouve les planches et vignettes manquantes ou avant remaniement pour les albums tel qu’on les connaissait jusqu’à présent ?
, le 30.11.2015 à 09:14
Sans vouloir être pédant: Jules Verne (sans s) et Henri Vernes (Bob Morane) qui n’était pas son fils ;-) et qui à fait le bonheur de mon adolescence (comme Jules d’ailleurs). Voilà deux auteurs (Hergé et Vernes) qui ravivent un peu l’étoile de la Belgique en ces temps difficiles…
, le 30.11.2015 à 09:26
Tintin !! a bercé mon enfance et aussi bien plus tard.
Comme dit ici, c’est sympa de retrouver la « fraicheur » initiale.
Néanmoins, Hergé … son époque et ses orientations politiques disons, douteuses.
En témoigne la dernière vignette de Tintin au Congo: Tintin et Milou viennent de quitter le village africain et les chiens du village de se lamenter: « ce Milou, tout de même, quel type !! »
Faites en et pensez en ce que vous souhaiterez. J’ai du mal.
, le 30.11.2015 à 10:57
Exactement! Top non?
, le 30.11.2015 à 10:58
C’était une autre époque, et c’est important de pouvoir la voir à travers ces BD aussi…
, le 30.11.2015 à 10:59
J’ai corrigé pour Verne… Merci. J’ai dû trop lire de Bob Morane quand j’étais petit-
, le 30.11.2015 à 11:37
Mes parents m’avaient offert la compilation en un seul volume des éditions du journal « Tintin » parues en… 1979. On y trouvait entre autres une réimpression des épisodes du « Lotus bleu » tels qu’ils étaient paru dans la version originale, mais coloriés. Il y avait pas mal de différences entre cette version et celle parue en album, ça avait surpris le gamin de huit ans que j’étais !
Y a-t-il autant de différences entre les histoires parues dans ce recueil et les albums ?
, le 30.11.2015 à 11:39
Je n’ai pas les anciennes versions à la maison. Je ne suis donc plus certain. Mais je connaissais vraiment bien ces aventures, et là, il me semble découvrir pas mal de nouvelles choses.
, le 30.11.2015 à 12:53
@Ysengrain, Robert…
Vous voulez corriger le passé ?
1984 :-(
, le 30.11.2015 à 14:57
Je pense qu’on peut reprocher un peu trop facilement certaines choses à Hergé, mais il faut aussi savoir les remettre dans le contexte et la mentalité de l’époque et, surtout, ne pas oublier que beaucoup des albums suivants sont emprunts d’un humanisme certain.
En ce qui me concerne, je n’aime pas la première moitié des albums – hormis le Lotus Bleu, qui est un véritable OVNI dans la collection, pour sa noirceur – et pour moi, Tintin décolle à partir des 7 boules de cristal, avec un certain nombre de petits bijoux comme Objectif lune, Les bijoux de la Castafiore et Vol 714.
, le 30.11.2015 à 16:41
Bien d’accord avec le premier paragraphe de Gilles Theophile. Hergé nous parle surtout de notre société, belge ou ouest-européenne, comme on voudra. Il nous dit ce que nous (la majorité, à une époque de notre histoire) pensions sur les différents groupes sociétaux de cette époque en Afrique centrale, aux É.-U., en URSS, en Amérique du Sud, en Extrême-Orient… C’est une analyse faite à un moment bien défini et qui nous permet de mesurer combien les mentalités ont évolué en Europe occidentale.
Hergé est un miroir pour nous. (et si j’osais : certains ne se trouvent pas si beaux dans ce miroir, mais je reconnais que c’est un peu trop facile).
, le 30.11.2015 à 19:27
Très chouette article, mais se plaindre du prix plus élevé en Suisse me paraît indécent : les salaires sont plus élevés en Suisse (même dans le métier de libraire dont la rémunération est particulièrement faible) ainsi que les loyers des locaux commerciaux. Donc, oui, un prix un peu plus élevé est justifié par plein de raisons.
Enfin, peut-être cela changera-t-il à l’avenir, car Economie Suisse a manifesté plusieurs fois le désir d’aligner les salaires suisses sur les salaires européens. Là, excusez-moi des termes employés, on l’aura dans le cul : des prix européens et des salaires européens… et les yeux pour pleurer.
Et pour François, j’ai un ami directeur d’école qui touche à peine plus de 2’000 euros par mois.
Nous avons une chance exceptionnelle en Suisse de bénéficier de salaires très largement supérieurs à ce qui se pratique en Europe… même avec des prix majorés de 20 à 30 % sur certains produits, nous sommes largement gagnants. Alors, peut-être devrions-nous cesser de pleurnicher…
, le 30.11.2015 à 20:06
Robert, il s’agit de l’île mystérieuse?
Il n’est pas en couleurs… Il a été publié où et quand? C’est assez étrange, ces cases.
Dortmunder: pas d’accord. Ce ne sont pas les libraires qui se font plus de marge, mais les distributeurs, on en a assez parlé lors de la votation sur le prix unique du livre!
Je suis allé faire des cadeaux de Noël, j’ai acheté plein de bouquins pour tout le monde, à 30 et 40 francs, avec des prix dessous en € entre 15 et 20.
C’est tout de même largement exagéré.
, le 30.11.2015 à 21:46
Le dessin mis en lien par Robert provient de L’Étoile mystérieuse.
C’est un des thèmes de l’humour juif.
Mais c’est anti-sémite quand c’est dessiné par Hergé ?
, le 01.12.2015 à 09:07
De l’humour juif ? Pas vraiment. Les dessins paraissent en 1942, au pires moments de la Shoah. A Paris, en septembre 1941 s’était ouvert une exposition à l’antisémitisme ordurier, Le Juif et la France.
Dans l’Ile mystérieuse, le chef des ennemis de Tintin est un chef d’entreprise juif basé à New-York qui s’appelle Blumenstein et reprend les traits caricaturaux attribués aux juifs. Américain et juif, les ennemis désignés par la propagande nazie. Degueldre, le chef fasciste belge, membre de la Waffen-SS, qui fut un ami d’Hergé, a toujours prétendu avoir été le modèle de Tintin.
Mais voilà, tout n’est pas si simple. Disons que Hergé avait à ses débuts la naïveté d’un boy-scout prêt à entendre de dangereuses sirènes, et que cette position était largement celle affichée par les milieux de catholiques conservateurs auxquels Hergé appartenait. Mais son extraordinaire talent le sauvera largement. Dans le Lotus bleu, Hergé s’en prend aux clichés racistes sur les Chinois.
Passons donc sur l’épisode, Tintin est par ailleurs d’une extraordinaire richesse et le nombre incroyable de ses traduction démontre bien qu’il touche par ses bandes dessinées à l’universel.
, le 01.12.2015 à 18:03
On ne peut plus, de nos jours, aborder l’œuvre de Georges Remy sans que l’on vous jette à la tête l’un, le racisme exposé dans les premières éditions de « Tintin au Congo » dans lequel Tintin, faisant la classe à quelques enfants noirs leur déclare : « Mes chers amis, je vais vous parler aujourd’hui de votre patrie : la Belgique !….. », l’autre, l’arrestation de Hergé le jour même de l’entrée des troupes Britanniques dans Bruxelles (pour rappel, il ne fût pas inquiété).
François évoque la parution du premier volume de l’intégrale de l’œuvre du père de la ligne claire et de l’école belge telle qu’elle fût publiée, sous forme de feuilleton. D’abord dans le Vingtième Siècle (dans le supplément hebdomadaire de ce quotidien très conservateur et catholique qui s’appelait le Petit Vingtième et dont il était le responsable éditorial) ; ensuite, pendant la guerre, dans le Soir (que l’on surnommait « volé », car les Allemands en avait fait un organe de propagande ; et pour finir dans l’hebdomadaire Tintin, créé peu après la guerre par un résistant appelé Raymond Leblanc.
Je remercie le « Boss d’Ici » pour cette excellente initiative, car cette publication sera marquante et nombreux seront ceux qui apprendront de nouvelles choses sur l’auteur et ses créatures, particulièrement lorsque paraîtront les planches des débuts, issues du « Petit Vingtième ». Certes 80 euros, c’est pas donné, mais les ouvrages sont magnifiques, 440 pages, une mise en page superbe, une impression impeccable. Ce sont ce que l’on appelle de beaux livres, des livres d’art.
À ceux qui voudraient en savoir plus sur Georges Remy, je ne saurais trop recommandé la lecture de sa biographie par Pierre Assouline, que l’on ne pourra pas accuser de complaisance. Il y a aussi celle écrite par Philippe Goddin, très documentée.
Sachez quand même que, malgré ce que l’on nous radote sans arrêt, Hergé ne fit jamais partie de « Rex », le parti de Léon Degrelle (et non Degueldre), même s’ils se sont connus, car Degrelle avait souhaité qu’Hergé illustre ses livres, ce que le dessinateur a toujours refusé.
Hergé ne peut pas échapper à son passé d’homme de droite, conservateur, issu de la petite bourgeoisie bruxelloise. Il a poursuivi son travail durant la guerre au sein d’un journal lié à l’occupant, mais il ne fût pas un « collaborateur » au sens que l’on donne à ce mot dans le contexte de la seconde guerre mondiale. Il est aussi resté fidèle à ceux de ses amis qui furent condamnés au moment de l’épuration, amis qu’il continua de voir jusqu’à leur rendre visite en prison. On lui reprochera aussi cette fidélité à ses amis.
Mais on ne peut pas non plus effacer l’humanisme de ce créateur dans la deuxième partie de sa carrière, après la guerre.
Sans les excuser le moins du monde, les artistes qui eurent des comportements inciviques durant ce conflit sont nombreux et ce sont, évidemment, les plus connus qui sont restés dans le collimateur le plus longtemps et encore aujourd’hui. Des inciviques et des collabos anonymes, on a pu en croiser par dizaines dans nos rues entre la fin de guerre et leurs décès et pour les plus résistants (!?!) on doit pouvoir encore en apercevoir sans que personne ne réagisse.
Pour revenir au génie de Hergé, pensez aussi à offrir, vous faire offrir ou à vous offrir la merveilleuse « Chronologie d’une Œuvre« , colossale compilation due au Tintinologue Philippe Goddin, 7 volumes, près de 3 000 pages.
Un très grand nombre d’ouvrages ont été publiés à propos d’Hergé et de Tintin. À vous de choisir… Il y a aussi de nombreux sites, Google vous aidera à les trouver.
Bonnes lectures…
, le 01.12.2015 à 19:04
A vos agendas :
Hergé le feuilleton intégral : 1935-1937 Album – 9 mars 2016.
, le 01.12.2015 à 19:38
Merci pour ces rectifications nécessaires, Daniel !
, le 01.12.2015 à 20:07
Oui, et merci pour la date de sortie du suivant!!!
, le 01.12.2015 à 20:07
@ guru : J’aime pas qu’on attaque les morts, surtout quand ce sont de géniaux créateurs et que l’on ne sait d’eux que ce qui les salit. M. Patrick Roegiers vient de commettre un ouvrage dégueulasse à propos de Georges Simenon, rien que pour se faire mousser. On a pu apercevoir ce paon faire la roue chez Laurent Ruquier, histoire de vendre du papier. Lorsqu’il aura fait la preuve du quart de la moitié du dixième du tiers du talent de cet immense romancier que fût Simenon, nous en reparlerons. Le paon a une grande queue, mais peu d’esprit !
, le 01.12.2015 à 21:42
On este n Suisse. Un dessin amusant de Tintin au Congo version helvétisée, c’est quand il fait la classe et qu’il dit « Mes chers amis, je vais vous parler aujourd’hui de votre patrie : la Suisse ! » avec la carte de la Suisse au tableau noir.
J’ai un scan mais je n’arrive pas à publier une image :-(
, le 02.12.2015 à 19:10
C’est celle-ci?
Amitiés,
Arnaud
, le 03.12.2015 à 09:42
@ Daniel: si tu passes à Bxl, on en parle…
, le 04.12.2015 à 12:49
Oui Arnaud, merci.Pittoresque, non?