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Sept semaines à l’hôpital

J’ai déjà expliqué ici comment, après avoir passé une nuit aux urgences,j’ai été aiguillée vers la gériatrie, car «je n’avais rien à dire, ce n’était pas moi qui décidais de la nature de ma maladie.» Et lorsque j’ai répliqué que je n’avais en tout cas pas un problème gériatrique, on m’a lancé, en sortant de la pièce et en claquant la porte: «Ils disent tous ça.»

J’ai passé les trois premières semaines à convaincre un personnel soignant (médecins, infirmières, aides-soignantes, physiothérapeutes), d’une compétence admirable en matière de gériatrie, que mon problème était non gériatrique. J’étais persuadée qu’il était cardiaque, et il a fallu que les médecins, incompétents en matière cardiaque, décident que, oui, mon problème n’était vraiment pas gériatrique, et enfin, au bout d’un mois de tergiversations, passablement d’allées et venues  d’un hôpital vers l’autre (30-40 minutes en voiture), j’ai eu droit à la pose d’un pacemaker. Il a stoppé d’une minute à l’autre les évanouissements pour lesquels j’étais allée à l’hôpital au départ. Il faut vous dire que pendant ce mois, je me suis évanouie entre une et quatre fois par jour, et qu’à la fin j’étais tellement épuisée que j’en étais arrivée à penser que lors d’un prochain évanouissement, je ne reviendrais pas – la force me manquerait.

Le pacemaker a enfin été posé – la décision a pris quatre fois plus de temps que si on m’avait écoutée dès le départ, je connaissais mon cas, les gériatres ne sont ma foi pas des cardiologues, et je vous fais remarquer que les quelque 4-5 semaines passées inutilement à l'hôpital ont coûté un saladier que personne n'a jamais évoqué, sauf moi. Ensuite, j’ai encore passé quelques jours à cet hôpital dans mon état normal pour voir si tout était en ordre (là, c'était indispensable)l et j’ai commencé à poser des questions et à observer.

Cet hôpital gériatrique avait, m’a-t-on expliqué, été reclassé en hôpital tout court, aussi y avait-on supprimé le personnel spécifique aux besoins de la gériatrie, on y construisait une radiologie toute neuve.

La maison n’en déborde pas moins de patients qui ont des problèmes gériatriques, parmi lesquels sont paumés quelques patients à 100 % lucides qui ont des maladies qui devaient se soigner ailleurs.

A ma question du pourquoi on ne séparait pas les malades lucides des autres, on a répondu que ce n’était pas faisable vu l’organisation du travail dans la maison.

Autrement dit, l’organisation du travail passe avant les patients et, c’est ici que commencent les raisonnements kafkaïens: les personnes qui ont besoin de soins gériatriques sont désormais des malades ordinaires, car le personnel gériatrique a été supprimé d’un trait de plume - ou plus probablement d’un «delete» d’ordinateur. Cependant leurs problèmes restent gériatriques, les médecins qui les soigner des gériatres, et la maison est pleine de patients en gériatrie. Les quelques patients non gériatriques qui arrivent là à cause de décisions arbitraires sont mêlés à la masse et traité comme des cas gériatriques.

Par un personnel désormais insuffisant.

Quant au personnel, il ne se voit plus les mains, et fait de son mieux: il est la première victime de cette situation.

Alors que j’étais à l’hôpital, le quotidien genevois Le Courrier a publié un article intitulé Et si on parlait du travail, par Viviane Gonik. Malheureusement, il n’est plus en ligne. Viviane Gonik y explique comment le management «moderne» a fait glisser la notion de travail vers celle d’emploi, comment il installe la précarité pour que même les plus consciencieux soient les plus préoccupés plus par la perte possible de leur emploi que par «faire du bon travail». Beaucoup ressentent cette priorité inévitable (s’ils veulent manger) comme douloureuse.

En regardant les infirmières et le personnel soignant, cet article du Courrier prenait un sens tout particulier. Il parle aussi d’eux.

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Photo V. Vogelsang

«Les évaluations du travail sont devenues de plus en plus extérieures, fondées sur des indicateurs de débit: le nombre de patients, de dossiers, d’élèves qui réussissent, etc. Il s’est développé un discours paradoxal autour de la qualité (ou de la satisfaction de l’usager/client): qualité totale dans le discours, exigence de rentabilité sans se préoccuper de la réalité du travail, que de toute façon le manager ne peut plus percevoir, dans la mesure où il ne connaît pas nécessairement le métier. Notion de qualité d’autant plus floue et absurde qu’elle se base sur des indicateurs abstraits, déconnectés du travail, alors même que les employé-e-s, dépassé-e-s par la surcharge de travail, ont souvent l’impression – justifiée – de bâcler leur travail.»

Saynète typique, c’est microscopique, mais répété mille fois on ne peut plus parler d’insignifiance, cela victimise typiquement autant le soignant que son «client».

«Monsieur, je vais vous aider à prendre une douche?»

«Oh oui, malheureusement je ne peux pas marcher.»

«Oh, mais Monsieur, nous sommes là pour ça. On va vous mettre dans le fauteuil.»

Elle l’aide à s’installer dans le fauteuil. Il souffre terriblement d’une jambe qu’on vient d’opérer.

«Peut-on faire un détour par les toilettes?»

«Non, je n’ai pas le temps tout de suite.»

«Oui, mais moi, je dois…»

Inutile; la douche, elle pourrait, le détour est de trop, elle le plante là pendant plus d’une heure, il se tord de douleur.

Lorsqu’elle finit par arriver, elle prend les devants et reproche au monsieur de ne pas comprendre, elle a 20 patients, 10 d’entre eux sont en fauteuil.

«Mais Madame, moi je ne vous ai pas demandé que vous me douchiez si vous n’avez pas le temps. Vous n’aviez qu’à me laisser dans mon lit. Il faut simplement que j’aille aux toilettes.»

«Ah nous vous offrons des choses, on nous les refuse, ensuite vous vous plaignez…» etc. etc.

Une demi-heure après, lorsqu’ils sont revenu, le monsieur a passé aux toilettes «in extrêmis» comme il dit, puis l’aide-soignante l’a douché. Soudain, elle s’écroule:

«J’ai voulu bien faire, faire plaisir à tout le monde, faire mon travail convenablement.»

C’était impossible.

En partant elle lance:

«Et il faut encore que j’aille noter tout ça dans l’ordinateur

Et là, il vous revient à l’esprit une autre réflexion de Viviane Gonik:

«[Une des...] grandes tendances dans les méthodes de management et d’organisation du travail [est] une multiplication de prescriptions, d’indicateurs à fournir, de comptabilisation des activités, une masse de travail administratif à accomplir qui détourne des activités réelles du travail et en dénature le sens: il faut passer son temps à remplir des tableaux d’indicateurs et d’objectifs plutôt que résoudre les problèmes des usagers, bien s’occuper des malades, des élèves ou des clients.

Le travail, l’activité réelle, disparaît du contrôle, seule reste l’enveloppe: il s’agit alors de contrôler directement les personnes. On ne s’intéresse plus à la productivité des biens et des services mais uniquement à la rentabilité des personnes.»

Manifeste_sur_la_pénurie_de_personnel_médical_-_rts_ch_-_info_-_suisse

Photo Keystone

 A l’hôpital des Trois-Chêne à Genève, ces principes sont appliqués en plein.

Il y a d’abord le tour de passe-passe du reclassement, qui a pseudo-changé la nature de la boîte sans en changer les clients, sauf de rares accidents comme moi, qui s’en trouvent très mal.

Il y a ensuite des protocoles pour tout, pour des choses dont on ne penserait jamais qu’il faut les réglementer, genre comment on change les serviettes, ce qui a le droit d’entrer ou de sortir d’une chambre, je ne multiplie pas, mais je peux vous dire que vous demandiez quelquefois de petites choses totalement quotidiennes pour lesquelles la/le pauvre infirmier{e) déjà surchargé devait perdre un bon quart d’heure en démarches administratives stériles. Un malade sensible finit par renoncer, mais là-bas, la plupart des malades discernent mal leur entourage.

Cette activité en surchauffe n’est pas un accident de parcours de l’hôpital des Trois-Chêne, elle est le résultat de la pratique d’un management spécifiques, ouvertement prônés par des chefs-d’entreprise:

«(…) Veillez à exiger toujours trop de votre personnel. Créez une espèce de frénésie (…). Créez un maximum de compétition. Tout le monde doit réaliser que seul le plus habile survivra. (…) Cherchez constamment des gens à blâmer (…)» disait lors d’une conférence donnée à des managers de la City Bank un psychologue du travail.

Ajoutez à cela la menace du renvoi d’un job que vous aimez à la moindre erreur, que vous exerceriez avec compétences si on vous en donnait les moyens, mais qui est organisé de telle sorte que vous finirez par faire LA faute un jour, et vous avez le management par la peur. L’infirmière (mais aussi le médecin, l’instituteur, l’ouvrier, etc) sont soumis «à une multiplication de prescriptions, d’indicateurs à fournir, de comptabilisation des activités, une masse de travail administratif à accomplir qui détourne des activités réelles du travail et en dénature le sens: il faut passer son temps à remplir des tableaux d’indicateurs et d’objectifs plutôt que résoudre les problèmes des usagers, bien s’occuper des malades, des élèves ou des clients.»

J’ai constaté lors d’un passage sans histoire particulière à l’Hôpital cantonal depuis lors que si les mêmes principes sont appliqués là aussi, c’est avec une moindre frénésie, comme si d’être isolé dans la campagne, dans un établissement qui n’a plus de vraie définition, cela poussait les administrateurs à des extrêmes qui ne paraissent pas indispensables quand on est dans la Cité.

Je conclurai en rappelant trois choses:

a) en tant que patiente, je n’ai jamais eu à me plaindre des soins reçus une fois la pénible admission passée. Les délais (cinq semaines pour le pacemaker, plus les mille interminables petites attentes dues à la surcharge du personnel) sont entièrement imputables aux technocrates qui gèrent l’hôpital, et non au personnel, qui court toute la jounéedans une frénésie sans fin;

b) LES VICTIMES DE CE SYSTEME, CE SONT LES INFIRMIERES ET LES INFIRMIERS, LES AIDES-SOIGNANT(E)S, LES LABORANTIN(E)S… Ce texte est une lance que je romps pour eux.

Les patients ne font que subir les contre-coups (dans mon cas cinq semaines pour prendre une décision qui pour d’autres avec des symptômes similaires aux miens avait été prise en moins de huit jours), les attentes, et même les erreurs;

c) plus on avancera, plus ce système produira des infirmiers et infirmières cyniques, peu compatissants, trop occupés à remplir les objectifs pour vraiment s’occuper des malades.

Comment se sortir de là?

Dans toutes les grandes entreprises (un des hôpitaux de Genève n’étant ici qu’un exemple vécu) revenir à la qualité du travail et à la fin de la précarité, afin que le travailleur redevienne autre chose qu’un élément que le management «moderne» cherche à précariser et à éliminer à tout prix, en faisant de ceux qu’on est forcés de garder des machines à faire du fric qui finira aux iles Caïmans.

On peut toujours rêver…

40 commentaires
1)
Lebarron
, le 15.12.2014 à 00:29

Excel le véritable directeur des ressources humaines

2)
aacp
, le 15.12.2014 à 00:43

On peut toujours rêver, oui…

Je suis chef d’un service de chirurgie orthopédique d’un hôpital général en France, et ce que vous décrivez, c’est ce que je vis au quotidien, de plus en plus mal.

M’autorisez-vous à montrer ce texte à ma direction ? Car il vient d’un patient (très patient, 5 semaines !) et il exprime ce qui ne sera jamais exprimé dans tous les « questionnaires qualité », qu’on fait remplir à la sortie du service, pour alimenter ces fameux indicateurs qui n’indiquent pas grand chose, mais que le management nous impose.
Peut être réaliseront-ils que le discours des soignants n’est pas loin de la réalité vécue par les patients, malgré la très haute qualité qu’ils imaginent atteindre avec leurs indicateurs.

On peut toujours rêver…

3)
Radagast
, le 15.12.2014 à 08:34

Merci Anne pour ce bel article qui, à travers cet exemple, donne à lire le monde avec plus d’acuité. Merci

4)
Crifan
, le 15.12.2014 à 08:41

Merci pour ce témoignage et cette analyse, Anne!

5)
Guillôme
, le 15.12.2014 à 08:43

Tout d’abord, tous mes voeux de santé après cette pose d’un pacemaker!

Le disfonctionnement que vous décrivez est malheureusement tellement applicable au monde du travail en général! Quel drame qu’on en soit arrivé là aussi pour la santé et l’humain!

6)
Filou53
, le 15.12.2014 à 09:19

Mon épouse était infirmière. Cela lui est arrivé plus d’une fois de téléphoner la nuit à son travail pour s’assurer qu’elle n’avait pas oublié quelque chose.
Nous avons finalement choisi qu’elle arrête de travailler et pourtant, elle aimait vraiment ce qu’elle faisait.

Non seulement on restreint le personnel soignant mais en plus on l’accable de procédures et de paperasseries qui sont prioritaires par rapport aux soins à donner. Monde merveilleux…

Ceci dit, c’est partout la même chose, hélas…
Excel est effectivement le seul maître à bord.
Et encore, nous vivons dans des pays favorisés! Je n’ose imaginer ‘ailleurs’.

Merci pour cet article et surtout, prenez soin de vous.

7)
ysengrain
, le 15.12.2014 à 09:55

Anne, au vu de ce que tu décris des symptôles que tu présentais, il faut ētre particulièrement incompétent médicalement pour passer à côté d’un bloc auriculo-ventriculaire du 3 ème degré: il suffit de pratiquer un èlectrocardiogramme. Que ce soit aux urgences ou en gériatrie la somme des incompétences est rffrayante.

J’ai quitté le monde actif de la santé avec la conviction su’on ne soignait Plus les patients mais qu’on prenait soin des protocoles.
Ces protocoles ont été mis en place afin de tenter de rationaliser les soins avec une connotation financière: tout le monde soignera de la même manière quel que soit le patient, ce qui est conceptuellement d’une idiotie sans nom.

8)
Anne Cuneo
, le 15.12.2014 à 11:01

M’autorisez-vous à montrer ce texte à ma direction ?

Ces textes sont publics (l’autre c’est Une nuit aux urgences, démonstration de comment on accueille les malades dans la surcharge – le personnel n’en peut plus, le malade trinque.

9)
Anne Cuneo
, le 15.12.2014 à 11:12

Anne, au vu de ce que tu décris des symptôles que tu présentais, il faut ētre particulièrement incompétent médicalement pour passer à côté d’un bloc auriculo-ventriculaire du 3 ème degré: il suffit de pratiquer un èlectrocardiogramme. Que ce soit aux urgences ou en gériatrie la somme des incompétences est rffrayante.

La seule faible excuse des médecins, serait que mes électrocardiogrammes étaient toujours impeccables.
Sauf que si j’avais été en cardiologie on aurait aussitôt procédé à un «tilt-test», qui provoque l’évanouissement pour voir ce qui se passe alors. En gériatrie, il leur a fallu trois semaines pour en apprendre l’existence. On l’a fait, on a vu que je faisais des arrêts du coeur, et ils ont encore tergiversé de l’opportunité, décidé que non, après quoi mon cardiologue privé a gueule, organisé, et fait poser ce pacemaker en 36 heures

10)
Alain Le Gallou
, le 15.12.2014 à 12:07

Toutes mes pensées pour vous souhaiter la meilleure convalescence possible et un total prompt rétablissement.

11)
Nept
, le 15.12.2014 à 13:19

Un autre problème énorme, en plus de l’administratif envahissant, est celui de l’hyperspécialisation médicale croissante.
Il n’y a plus assez de médecins polyvalents, pouvant approcher un patient par plus d’un problème à la fois.
Du coup, on ne compte plus les situations où on a aux urgences un patient ayant une pathologie pas trop simpliste que personne ne veut dans sa salle (et j’imagine que Ysengrain et aacp ci-dessus ne me démentiront pas).

Exemples récents : un patient avec une fracture vertébrale, non à opérer. Retour à domicile immédiat impossible car douleur importante et aides à mettre en place. Les orthopédistes et neurochirurgiens n’en veulent pas : pas chirurgical. Les gériatres non plus, trop jeune. Il n’y a pas de lit « douleur » ni « social ».

Autre exemple : patient avec une maladie ontologique et une insuffisance rénale majorée, avec une mauvaise fonction cardiaque et une récidive d’épanchement pleural. Problème aigu : dyspnée. Cause aigue : l’épanchement.
Les pneumos n’en veulent pas car l’épanchement est d’origine cardiaque.
Les cardions non plus car l’épanchement est d’origine néoplasique.
Les onces non plus, car c’est cardiaque.
Les néphros non plus car le problème rénal est mineur…

Et c’est là que je suis heureux que dans mon institution, le mot de la fin revient à l’urgentiste, et que je peux donc imposer la salle de mon choix. Au prix en général d’une gueulante d’un assistant de la salle de réception le lendemain, mais je le renvoie au directeur médical… du coup il la ferme :-)

Il n’y a plus de salle « généraliste » pour les problèmes flous.
Il n’y a plus que des statistiques, durée d’hospitalisation « justifiées », … au détriment parfois d’une humanité… et qualité dans la prise en charge. Dommage .

12)
François Cuneo
, le 15.12.2014 à 13:46

Je vois que pas mal de médecins sont d’accord avec Anne.

Juste un mot sur la conclusion: ce n’est certainement pas pour que l’argent passe aux Îles Caïmans que tout cela est mis en place.

C’est parce que la société (en Suisse) ne veut pas que les assurances maladies augmentent. Chaque année, c’est la même rengaine: nous augmentons de 1 à 5% le prix de l’assurance, ça fait un scandale dans la presse.

L’argent ne part pas aux Îles Caïman, il part dans les soins, dans les appareils de plus en plus coûteux. Il n’y a aucun « méchant capitaliste » là-derrière il me semble.

D’autre part, les protocoles ont été mis en place pour répondre aux attaques incessantes des utilisateurs qui sont à l’affût de la moindre petite chose pour attaquer l’institution.

On fait la moindre erreur? On se ramasse un procès. C’est la même chose à l’école.

On doit donc faire hyper gaffe, quitte à ne plus rien faire sans protocole, ou carrément à ne plus rien faire du tout.

13)
Anne Cuneo
, le 15.12.2014 à 14:46

Je vois, cher Fraançois, que tu ne comprends pas bien le fonctionnement des choses.D’abord, les Suisses viennent de refuser une rationnalisation des assurances (40 assurances différentes, 40 adinistrations , 40 PDG grassement payés – ce gaspillage là fait partie du discours sur les assurances), ils ont cru les arguments d’un lobby. Ensuite, les économies sont faites sur le dos du personnel, et la décision de faire des économies est politique. Ce sont toujours la santé et l’instruction publique qui trinquent sur la part cantonale et fédérale des coûts de la santé et de l’instruction. Et enfin, ces équipements, tu crois qu’ils. Ies prennent où?
Et les médicaments? Novartis, Hill Com etc. Et que crois-tu qu’ils fassent de leurs bénéfices?
Les discours simplistes ne son pas ton genre, tu m’étonnes un peu.

Depuis mon iPhone. Coquilles éventuelles

14)
LC475
, le 15.12.2014 à 16:54

Merci Anne pour cet article qui éclaire sur bien des aspects, et prends soin de toi.

15)
François Cuneo
, le 15.12.2014 à 17:11

Je suis certainement simpliste et ne vois pas tout, mais la conclusion de ton article sur ce point l’est un tout petit peu également il me semble:-)

16)
Madame Poppins
, le 15.12.2014 à 17:41

Tout d’abord, Anne, j’espère que tu vas mieux maintenant et que tu es bien suivie depuis ta sortie d’hôpital. A 20 ans, je trouvais ma grand-mère un peu zarbi de me souhaiter à chaque fin d’année une « bonne santé » : à 45, je trouve que c’est magique d’être en bonne santé et je la souhaite à toutes et tous.

Cela dit, je comprends la réaction de François même s’il réagit par rapport à un autre contexte – ce qui ne m’empêche pas de ne pas encore avoir décoléré suite au refus populaire de la caisse en lieu et place des caisses mais c’est une autre histoire -.

Ainsi, nombreux sont les gens qui veulent le risque zéro, qui doivent avoir un « coupable », un « méchant », à qui faire porter une responsabilité là où nos grands-parents auraient vu « la faute à pas de chance ». Moralité, les médecins en sont arrivés à expliquer aux patients, avant une opération, les problèmes pouvant survenir au cours d’une intervention, ce qui ne me cause pas d’état d’âme. Ce qui m’interpelle, c’est qu’ils en sont à expliquer les risques avoisinant les 0,1 % des cas parce que s’il advient, on reprochera (on = la justice, qui n’est que l’émergence des lois voulues par le peuple) à ce toubib de ne pas avoir respecté son devoir d’information. Moralité, ces risques de 0,1% sont anxiogènes, empêchent les gens de se former un avis et le patient tourne en rond dans sa tête.

Pour l’école, bien sûr, il est scandaleux qu’un enfant puisse se noyer dans une piscine parce qu’il avait été laissé sans surveillance mais on voudrait que l’école assume également la responsabilité d’un éventuel glissement de terrain dans un camping au sud de la France et là, on va trop loin. Du coup, les profs comme le corps médical passent leur temps à faire signer des feuilles et à suivre des procédures visant à empêcher qu’on ne puisse leur reprocher le moindre manquement éventuel par la suite. Passant à côté de leur métier, à savoir soigner et former.

Quoi qu’il en soit, prends soin de toi, Anne, et que l’année 2015 soit placée sous les auspices de la santé recouvrée !

17)
Nept
, le 15.12.2014 à 17:55

Le risque zéro… Vaste débat. On l’a vu récemment avec les soucis attribués au Motilium… Problèmes reels mais exceptionnels, mais on oublie les problèmes liés à ce qu’on traite… Et aux alternatives !

Et on fait signer des consentements éclairés de 36 pages!

18)
Argos
, le 15.12.2014 à 18:48

D’abord, Anne, mes meilleurs voeux de rétablissement.
Ce que tu nous décris a finalement un nom très simple celui de Bureaucratie. Elle est de plus en plus envahissante, chaque geste devant être justifié et le résultat est une inefficacité croissante, entrainant pas ailleurs une déresponsabilisation également croissante.

Dans mon coin du Caucase, l’ordonnance médicale n’existait pas. Le médecin écrivait le nom des médicaments sur une fiche et on allait à la pharmacie.
A présent, le médecin doit remplir des formulaires précis, les tamponner, les enregistrer et demander une taxe d’une vingtaine d’euros qui part dans les caisses sans fond de l’Etat.

A la pharmacie, le préposé doit soigneusement enregistrer les médicaments, découper aux ciseaux les différentes prescriptions – mais oui – et constater en suite qu’il n’a pas le médicament en stock. Résultats : les médecins ont moins de temps pour leur vrai boulot, les files s’allongent dans les pharmacies. Tout cela parce qu’au nom du nouvel accord d’association avec l’Union européenne, il faut se mettre aux normes.

Et rappelons que dans une bureaucratie, c’est toujours le plus incapable qui monte plus haut, les gens compétents finissant pas abandonner. Dans tous les lieux où j’ai travaillé, la bureaucratie a toujours tenté de m’empêcher de faire correctement mon travail. Heureusement, j’ai une sale mentalité et je possède encore quelques ressources pour lutter contre la bêtise humaine.

19)
jibu
, le 15.12.2014 à 19:05

« Brazil »
Un film toujours d’actualité !

20)
Anne Cuneo
, le 15.12.2014 à 19:54

Je dois être dans un hôpital particulier ((l’hopital gériatrieue ne compte pas parce qu’on vs. considère comme incapable de prendre des décisions), mais on me demande mon autorisation pour la moindre pilule, on vérifie mon identité a la moindre piqûre, et la seole feuille que j »ai dû signer, c’était pour oui ou non me ranimer au cas où. J’ai dit non, même si c’est une « erreur médice ».Et j’ai apprécié ces contrôles. Le risque zéro n’existe pas et il faut être déraisonnable pour ne pas accepter. Les fous des tribunaux qui font des procès à tout bout de champ utilisent la santé commee reste.

Via Phone, coquilles possibles

21)
Jean-Yves
, le 15.12.2014 à 21:31

@ Anne.
Soutien moral inconditionnel. J’ose bises, ne m’en veuillez pas !

La narration distanciée de cette expérience, autant que les réactions circontanciées des intervenants, confirment mon addiction pour ce site.

On peut toujours rêver…

Ces protocoles ont été mis en place afin de tenter de rationaliser les soins avec une connotation financière: tout le monde soignera de la même manière quel que soit le patient, ce qui est conceptuellement d’une idiotie sans nom.

Il n’y a plus que des statistiques, durée d’hospitalisation « justifiées », … au détriment parfois d’une humanité… et qualité dans la prise en charge. Dommage.

A lire les méthodes de rationnalisation décrites, et tout en admettant qu’il y ait des progrès à faire (même si ce n’est pas, et de loin, la corporation que je mettrais en première ligne), je m’interroge, donc …

Question naïve aux intervenants qualifiés :

Notre “prise en charge” risque-t-elle, à terme, de dépendre d’accessoires portables connectés et localisés, suffisament “renseignés” pour induire une orientation automatique vers le service le plus “adapté” à notre assurance santé ?

22)
PtitVert
, le 15.12.2014 à 23:17

Quand je lis ton texte Anne, j’ai l’impression de voir le même phénomène dans les entreprises, avec cette segmentation des tâches, cette segmentation des responsabilités, ce manque d’indien, ce surplus de travail, cette incompétence, cette de déresponsabilisation, …
Tout cela au nom d’un soi-disant standard iso, « best pratices » XYZ, …

Grosso modo, ce que je veux dire, c’est que si on transpose le texte d’Anne dans une autre domaine que le domaine médical, on serait surpris de voir que son texte est aussi vrai.

Je connais, de par mon travail, les entrprises financiaires et je reconnais à 90+% ce même problème.

On vit dans une société de technocrate , qui n’a d’yeux que pour les chiffres et ses optimisations en se foutant de l’être humain.

23)
ThierryS
, le 16.12.2014 à 07:02

Désolé pour ce commentaire tardif
D’abord tout mes voeux de rétablissement
D’autre part, et malheureusement, ce que tu décris n’est pas spécifique à la Suisse ou la France. Nous le vivons au quotidien en Suède avec une administration Kafkaïenne qui veux gérer de A à o¨(oui on a des lettres en plus), l’ensemble de l’activité hospitalière. Un conseil, ne tomber jamais malade pendant les vacances d’été.

24)
Gr@g
, le 16.12.2014 à 08:45

Tout d’abord je te souhaite, Anne, mes meilleurs vœux pour ta santé!

Sinon, je reconnais tout à fait le système technocratique qui prend de l’ampleur dans tous les secteurs, egalement dans le social, ce qui rend très compliqué les rapports entre le terrain et les organes dirigeants. Dans ma branche, l’animation socioculturelle, il y a par exemple une volonté, non désirée par le terrain, d’ouvrir x heures par semaines, le fait d’être ouvert devenant plus important que de savoir s’il y a du monde pour venir dans ces moments. Il faut savoir que dans cette branche professionnelle, l’une des valeurs de base est la libre adhésion des participants.

Ton texte est criant de la réalité de terrain de certaines professions, et tu as su avoir un regard parfaitement aiguisé alors que tu passais par des moments pas simple. Bravo à toi pour cette lucidité, et cette faculté à relever la complexité!

25)
Jambo
, le 16.12.2014 à 14:00

Bonjour Anne,

Tous mes voeux de bon rétablissement.

Ensuite, je suis totalement d’accord avec toi. Concernant le prix de la santé, on peut vraiment pointer du doigt les fournisseurs: médicaments et matériel. Il suffit de comparer les prix entre pays. Pourquoi nos chères pharmas (oui celles qui enorgueillissent d’être suisses), nous font payer le prix fort sans remords soit disant parce que nous, les suisses, on peut payer? Pour moi c’est scandaleux ce d’autant plus que les professionnels ne peuvent même pas se fournir à l’étranger directement. Pharmasuisse leur intedit formellement. Cela vaut également pour le monde vétérinaire où les abus de tarifs sont encore plus important…

Après, comme de nombreuses personnes le disent ici, c’est un phénomène de société et ce qui se passe à l’hôpital survient également en entreprise. J’ai la désagréable impression qui se confirme depuis des années qui l’on arrête pas augmenter le staff du « middle management » au détriment de ceux qui font le travail et que ces MBAs sont tous formatés (voire « brainwashés ») sur le même modèle du risque zéro pour leur personne au détriment de tous les autres… Long débats.

Il y’a une maxime que j’aime bien dans mon milieu « Keep coders, fire everyone else ».

26)
Ange
, le 16.12.2014 à 21:06

Bonsoir,
Si vous avez l’occasion, je vous conseil « Sicko« , un film de Michael Moore sur un comparatif des soins hospitaliers entre différents pays. Il date de 2007, mais il semble que la situation n’a guère avancé !
Meilleurs voeux de rétablissement et de fin d’année !

27)
mff
, le 16.12.2014 à 22:16

Anne c’est très exactement ce que j’ai constaté dans certains hôpitaux et dans le sociale :((((

Il faut être « solide » ou ne pas avoir trop de conscience pour faire ce travail dans de tel conditions :(

Y aurait-il la possibilité de rendre publique ton article par exemple dans une revue lue largement ou sous une autre forme ? qui sait cela ferait peut-être bouger les choses….on peut rêver ;)

Oui bien sûr tout ceci est applicable aussi dans les entreprises mais dans le social, dans la médecine cela est particulièrement grave!

Rétablie toi le mieux possible :)

28)
pelerin
, le 16.12.2014 à 22:52

Merci Anne pour votre saisissant témoignage qui mériterait, en effet, une audience plus large.

Je vous souhaite le meilleur rétablissement possible.

29)
Tom25
, le 16.12.2014 à 23:59

J’ai déjà entendu dire que je n’avais pas besoin des chimios qu’on m’a administrées. Que les lobbies faisaient pression pour pousser leur traitentement. Soigne t’on (aussi) des gens en bonne santé ?

En tout cas, content que tes soins te fassent aller mieux Anne.

30)
Anne Cuneo
, le 17.12.2014 à 00:33

Point d’orgue kafkaïen: j’apprends de. source sure que si , une fois à l’hôpital gériatrique je n’ai plus pu en sortir, c’est qu’ils s’accrochent aux malades  » normaux » qqui leur permettent de justifier leur titre d’hôpital. Les infrastructures manquent? Détail. Mon médecin a fout fait pour me transférer en cardiologie. Rien à faire. Kafka reigne.

Merci à tous pour vos contributions et vos voeux.

Encore une fois sur iPhone: danger de coquilles.

31)
aacp
, le 17.12.2014 à 00:39

@ Jean Yves

J’étais cet après midi à une réunion sur la future informatique de mon hôpital. Les informaticiens étaient tout heureux de nous montrer un logiciel de prescription médicale couplé à des protocoles, qui pouvait pratiquement prescrire tout seul.

Ce qui m’a « rassuré », c’est le bon qu’on fait tous les médecins de la salle en voyant ça, pensant que c’est folie !

Mais oui, malheureusement, on y arrive, et pas mal de développements dans ce sens sont en cours.

@ Nept

Non je ne démens pas. En France on a un code officiel pour « maintient au domicile difficile » (la vertèbre trop douloureuse pour rentrer à la maison n’est qu’un exemple parmi d’autres). Mais on n’a pas le droit de l’utiliser comme « diagnostic » principal : être simplement humain, avant même de soigner, ce n’est pas valorisé, au propre et au figuré, on ne peut donc plus avoir de service généraliste. Il faut une bonne raison pour facturer…

32)
François Cuneo
, le 17.12.2014 à 08:52

Audience plus large, audience plus large… Il y a tout de même entre 4’000 et 6’000 lecteurs quotidiens sur ce site!:-)

33)
DrakeRamore
, le 17.12.2014 à 08:55

Hé ben, ça laisse pantois…
Je te souhaite un très bon rétablissement.

Je confirme une chose : j’ai l’impression de lire un résumé de ce qu’est notre fonctionnement dans la boite où je bosse, qui n’est ni médicale, ni suisse…

34)
Jambo
, le 17.12.2014 à 11:04

@Anne

Même situation pour mon père, il y’a quelque mois, mais cette fois pour un problème neurologique difficile a diagnostiquer. Comme il a 76 ans, ils l’ont transféré des urgences des HUG à la gériatrie: oui forcément il est « vieux » alors c’est un problème gériatrique! Impossible de le faire retransférer à l’hôpital ensuite. Même par son médecin neurologue… Un comble.

35)
babydoc
, le 17.12.2014 à 20:52

Bonjour,

En tant que médecin assistant vaudois (équivalent d’interne a Genève et en France) je ne peux que confirmer la problématique de la technocratisation. L’exemple suivant est selon moi édifiant:
Dans mon hôpital, j’ai la chance de timbrer, ce qui rend le nombre d’heures supplémentaires effectuées par les médecins assistants visibles. Même si par de savants calculs on nous soustrait environ 15 heures par mois, ces heures sont rémunérées et posent donc problème à la direction. D’autant qu’il n’est pas rare pour un assistant aux urgences de travailler plus de 60 heures par semaines.
Je ne reviendrai pas sur les raisons de cet état de fait. Le plus intéressant est la réponse apportée a ce problème par la direction de l’hôpital. Devant l’ampleur des heures supplémentaires effectuées par les médecins assistant (tous services confondus), la décision a été prise d’engager… un chef de projet en management du personnel! Son rôle: analyser nos horaires et optimiser les planning pour améliorer l’efficience.

Merci Anne pour ces 2 articles qui reflètent malheureusement bien le quotidien des soins hospitaliers et très bon rétablissement.

36)
Jambo
, le 18.12.2014 à 09:41

@babydoc: c’est le « nouveau » syndrôme de toutes les sociétés. Y’a un problème de « sous staffing », on engage un ou plusieurs managers payés à prix d’or pour étudier des solutions au lieu de recruter du personnel… Cherchez l’erreur, ce d’autant plus que ces personnes s’auto-créent du travail sinon s’ils proposaient des solutions, disons pragmatiques, leur poste de ne justifierait plus. Pas question de scier la branche (le tronc) sur lequel ils sont assis. Moralité, leur efficacité est biaisée, pour rester poli, et ils deviennent indéboulonnables puisqu’en plus ils font parti du management…

37)
Nept
, le 18.12.2014 à 19:11

Pour ce qui est du sous-staffing, je crois que les urgences hospitalières sont très particulières.
En effet, un bon service doit être capable d’accueillir à tout moment un ou plusieurs patients critiques. Ceci oblige fonctionnellement à la présence d’un staff relativement important.
Et ce staff n’est payable que si il est en moyenne assez utilisé… donc si les urgences sont envahies de pathologies diverses, qui n’ont rien à y faire (contusions, rhumes, …). Celles-ci surchargeant le service, on doit augmenter le staff…qu’il faut payer.
C’est le serpent qui se mord la queue!

Problème que ma fonction de Chef de Clinique en médecine d’urgence m’amène à vivre au quotidien…

38)
Jean-Yves
, le 19.12.2014 à 22:57

Les urgentistes apparaissent souvent (par nature ou choix, rarement par hasard), un peu comme “pompiers des âmes” autant que médecins, et c’est tout à leur honneur.

Que les “Urgences” de nos pays se disant civilisés, développés et humanistes soient calibrées par le seul filtre de la rentabilité à court terme m’inquiète. Inquiétude pour mes enfants, petits enfants, et tous leurs copains et copines.

Soins adaptés en cas de nécessité ? Sinon, qui en paie les conséquences ?
L’équilibre économique de cette activité “Urgente” est-il si difficile à mesurer sur le long terme ?

Précision : J’ai passé l’âge de l’angélisme !

39)
pcst
, le 21.12.2014 à 15:52

Rien à faire. Kafka règne.

Bon rétablissement !
Mais quel récit sordide !
Je suis horrifié de lire que passé l’âge des premières rides, on ne peut même plus se faire poser un pacemaker. On se fait séquestrer ses affaires, ses papiers, et sauf à cacher son iphone, ses moyens de communication.
Au secours ! On entendait il y a vingt ans de semblables horreurs du côté de l’Angleterre, bien entendu en ricanant d’auto-satisfaction vu la supériorité de notre système de santé.
Et nous y voilà. Mais comme c’est réjouissant.

Allez, haut les pacemakers, et bonne santé à tous !
Luc

40)
zit
, le 21.12.2014 à 22:14

Quelle histoire !

Tout d’abord, content que tu t’en sois sortie !

Et puis une question indiscrète à la romancière, peut–être un peu hors sujet :
quel effet cela fait–il d’être devenue ce que l’on appelle un ciborg ?

z (mmmmm, le « psy du travail de la phynance », quel bel exemple, je répêêêêêêêêêêêête : on vit vraiment une époque formidable…)